Entièrement faites à la main

Des lunettes "made in Luxembourg", artisanat caché au pays de la finance

  • Publié le 23 février 2020 à 02:57

Des lunettes en bois précieux ou en corne de buffle entièrement faites à la main: l'artisanat tisse sa toile au Luxembourg et fournit de nombreux emplois, plus que les grosses multinationales, banques et autres institutions internationales, vitrine de ce petit pays.

Le grand-duché compte 7.303 PME artisanales, un nombre en hausse de 80% depuis le début du siècle, selon la Chambre des métiers. L'artisanat est devenu le plus gros employeur du pays - deux fois plus que le secteur financier - avec un emploi sur cinq.

Ce boom reflète le dynamisme de l'économie qui touche tous les secteurs. "On n'en parle peut-être pas beaucoup, car ces entreprises n'ont pas le rayonnement des grandes banques ou des compagnies d'assurances, mais il y a ici un tissu de très petites PME qui est important", souligne Maurice Léonard, fondateur de Gold & Wood, une marque de montures de lunettes haut de gamme.

Ce fils d?agriculteur issu d'une fratrie de 12 enfants a été clerc de notaire, fonctionnaire et même gérant d?une agence bancaire avant de trouver sa voie dans l?artisanat.
Aujourd'hui, quelque 450 entreprises artisanales sont labellisées "made in Luxembourg", dont celle de M. Léonard.

Située à une heure de route au nord de la capitale, sa firme lancée en 1995 revendique un rôle de pionnière pour les lunettes en bois. Des feuilles de bois découpées puis plaquées avec un jeu de couleurs et de textures avant d'être soigneusement polies et vernies, les montures prennent vie en passant par les mains expertes d'une vingtaine de salariés. Certaines allient le bois au titane ou à l?inox.

"Au départ, il faut que les gens aient quelques aptitudes techniques, mécaniques, voire électromécaniques. Après pour les tâches de finition, le polissage, le finissage, c?est une formation sur le tas", explique M. Léonard, 59 ans. Il faut compter six mois pour former un salarié. "A partir du moment où on reçoit une branche, il faut savoir la positionner, de façon à pouvoir la polir correctement", explique Daniel Fillieux, 57 ans dont 22 ans passées dans l'entreprise. Cet ébéniste de formation a appris les gestes minutieux qu?il transmet à ses collègues, dont certains viennent d'horizons professionnels très variés comme la coiffure.

- Stallone, Snoop Dog...-

Polyvalence, rigueur et précision sont requises pour réaliser ces pièces qui démarrent à 500 euros et dont certaines dépassent les 10.000 euros pour des modèles sertis de diamants.
"On ne va pas être en compétition avec des grandes marques (?), c'est une niche à part", admet M. Léonard. L'entrepreneur tient à mettre en avant l'identité luxembourgeoise de ses produits. "Quelque part, on est entre le +french kiss+ et la rigueur allemande. D?ailleurs, on se vend parfois comme ça", commente-t-il.

Des bois nobles plaqués aux bois ornés de soie peinte à la main, il affirme travailler avec des fournisseurs locaux pour ses produits bien que leur origine soit plus lointaine.
On trouve notamment dans la gamme du tanganika, un bois ambré en provenance d'Afrique équatoriale, mais aussi le bolivar et l?érable moucheté d?Amérique du nord, ou encore la loupe de noyer européenne.

Depuis une vingtaine d'années, l'entrepreneur s'est aussi lancé dans une gamme en corne de buffle. "La corne de buffle pour certains marchés a un attrait particulier: (?) ça fait très chic, ça fait luxe, chaque produit est unique puisque c?est la veine, c?est le dessin, la couleur de la corne naturelle, on ne pourra jamais reproduire la même", souligne-t-il.
Son entreprise a réalisé l?an dernier 4 millions d?euros de chiffre d?affaires en distribuant ses produits en Europe mais aussi en Amérique du Nord qui représente 40% de son marché. La PME compte parmi ses clients quelques célébrités comme l?acteur Sylvester Stallone, le patron d?Apple Tim Cook ou le rappeur Snoop Dog.

AFP

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