Polémique sur des agressions pédophiles

Pour permettre de "tourner la page", le pape accepte la démission de Mgr Barbarin

  • Publié le 6 mars 2020 à 18:54
  • Actualisé le 6 mars 2020 à 21:07

Relaxé par la justice des hommes, le cardinal Philippe Barbarin a vu sa démission acceptée vendredi par le Pape François, condition nécessaire pour qu'une "page se tourne" dans un diocèse de Lyon marqué par ses silences passés sur les agressions pédophiles de l'un de ses prêtres.

"Cette démission n'est pas une surprise. (Mgr Barbarin) l'a annoncée, l'a réannoncée (...) mais pour autant nous sentons que nous vivons un moment très important pour le diocèse", a déclaré devant la presse Mgr Michel Dubost qui assurait au quotidien la gestion du diocèse depuis la mise en retrait du Primat des Gaules.

Dans une déclaration diffusée au même moment sur la chaîne catholique KTO, le cardinal a souligné que "ces quatre années (avaient) été des années de grande, grande souffrance". "C'est d'abord" pour les victimes "qu'il faut prier". "C'était des actes affreux et il est important qu'une page se tourne et que vienne quelqu'un qui parcoure une nouvelle étape avec tout le diocèse de Lyon", a-t-il poursuivi.

Peu après l'annonce de sa relaxe par la cour d'appel de Lyon le 30 janvier, le prélat avait annoncé qu'il remettrait une nouvelle fois sa démission au pape. Le pape François s'était laissé un délai de réflexion pour répondre à cette nouvelle demande.

Faisant valoir la présomption d'innocence, François avait refusé qu'il démissionne en mars après sa condamnation en première instance, dans l'attente de la décision de la cour d'appel sur cette affaire symbole des défaillances de l?Église face à la pédocriminalité dans ses rangs.

- "Une mission" ou "rendre service" -

Saluant auprès de l'AFP une "bonne décision", le président de l'association de victimes La Parole Libérée François Devaux a estimé toutefois que celle-ci n'arrivait "que parce que le pape François est acculé". "Si cette décision avait été prise dès le départ, il n'y aurait pas eu tous ces recours", a-t-il ajouté.

Après sa condamnation en première instance à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé les agressions sexuelles commises par un prêtre du diocèse sur de jeunes scouts entre 1971 et 1991, l'archevêque de Lyon s'était mis en retrait du diocèse.

La nomination de son successeur pourrait intervenir dans un délai de "deux à quatre mois". D'ici là, Mgr Dubost continuera d'assurer l'intérim. Une messe solennelle sera tenue le 15 mai en présence de Mgr Barbarin à la primatiale de Lyon "pour lui dire au revoir et merci", a précisé le prélat.

Quid de son avenir? Le pape va lui "confier une mission", selon Mgr Dubost. L'intéressé, lui, a assuré sur KTO ne rien savoir: "Ou bien le pape me demande quelque chose, et évidemment je dirai oui, ou bien il ne me demande rien et dans ce cas-là, comme tous les évêques émérites, j'irai rendre service quelque part".

Dans un entretien au Point publié le 5 février, le cardinal Barbarin avait confié que, malgré cette relaxe qui l'avait "réconforté", cette affaire l'avait "changé" mais qu'elle resterait "toujours collée" à son visage.

Comme à son procès, le cardinal y répétait qu'il ignorait les agissements du prêtre avant de rencontrer une victime en 2014. "Ce n'est qu'à la fin de l'année 2014 (...) que je prends conscience, brutalement, de la réalité des actes commis, de ce qu'ils signifiaient concrètement, de la souffrance des victimes (...) Je me rends compte que je n'ai pas pris les bonnes mesures", expliquait-il.

A l'origine de l'affaire, l'ancien prêtre Bernard Preynat, défroqué l'été dernier, sera fixé sur son sort le 16 mars. Une peine d'au moins huit ans d'emprisonnement a été requise à son procès devant le tribunal correctionnel pour les abus sexuels qu'il a reconnu avoir commis sur des scouts de 7 à 15 ans.

AFP

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