Coronavirus

En Italie et en Espagne, l'épicerie, ultime lieu de sociabilité sous haute sécurité

  • Publié le 25 mars 2020 à 18:20
  • Actualisé le 25 mars 2020 à 18:33

Fini les discussions sans fin au café du coin.

A l'heure du coronavirus, les épiceries et supermarchés, seuls commerces encore ouverts, s'avèrent les seuls endroits où subsiste un semblant de sociabilité, même si c'est sous haute sécurité. "C'est l'unique moment où je vois des gens en vrai!" s'exclame Massimo Moi, un Romain de 56 ans qui vit seul et sort faire ses courses deux fois par semaine dans le vieux quartier de Monti, près de la gare centrale.

"Avec trois-quatre amis, on se donne rendez-vous pour se retrouver ensemble à la supérette du coin: on se met l'un derrière l'autre dans la queue, en respectant le distance de sécurité bien sûr, et on discute", raconte à l'AFP ce petit homme sympathique au crâne rasé et au visage mangé par de grosses lunettes. "Ensuite, à l'intérieur, on se suit à distance dans les rayons, on plaisante, et on se retrouve enfin à la caisse, avant de se saluer sur le trottoir. Après je rentre chez moi retrouver mes deux chattes, Odette et Anita: je les aime beaucoup, mais elles n'ont pas beaucoup de conversation!", s'esclaffe-t-il. "Les appels vidéo c'est sympa, mais ça ne remplacera jamais les vraies rencontres", soupire-t-il.

Dans les déserts urbains créés par les mesures de confinement, les commerces alimentaires, devenus les seuls lieux de "rassemblement" encore autorisés, font l'objet d'une attention particulière de la part des autorités locales et nationales pour éviter qu'ils ne deviennent des foyers de contagion. A Rome, la maire Virginia Raggi a ainsi annoncé des opérations de désinfection des "zones particulièrement fréquentées par la population, notamment les pharmacies, marchés, supermarchés et hôpitaux".

A l'intérieur des commerces, la plupart des enseignes imposent aux clients le port de gants en plastique, fournis à l'entrée. Le personnel en porte aussi, de même que des masques et souvent des charlottes. "On se croirait presque dans un hôpital!" s'étonne Massimo Moi.

- "Epée de Damoclès" -

En Espagne, où la pandémie est arrivée plus tard mais a déjà fait près de 2.700 morts, les clients, souvent masqués notamment à Madrid, s'évitent encore plus qu'ils ne se retrouvent dans les commerces, qui exigent parfois de se laver les mains, mettre des gants et laisser ses effets personnels à l'entrée. Certains magasins italiens ont aussi installé des panneaux en verre ou plexiglas aux caisses pour empêcher tout contact rapproché entre caissières et clients. En effet, si employés et clients s'évitent soigneusement dans les rayons, difficile d'en faire autant arrivés devant le tapis roulant et au moment de payer.

"Les employés sont vraiment gentils, et presque plus accueillants que d'habitude, surtout les plus jeunes", observe notre témoin romain, qui y voit une "sorte de solidarité complice face à cette épée de Damoclès flottant au-dessus de nos têtes". "Un sourire, une blague deviennent vraiment précieux en ces moments difficiles, j'apprécie beaucoup".

Dans la capitale espagnole, Celestino Lopez, un charcutier installé derrière son comptoir, observe en revanche que "les conversations avec les clients sont maintenant beaucoup plus courtes". Devant son étal, un ruban sur le sol indique aux clients la limite à ne pas franchir. A Madrid, en première ligne face aux risques de contagion, les vigiles et les caissiers des supermarchés sont plutôt tendus, pris entre des normes sanitaires drastiques et des cadences plus soutenues. Dans les épiceries et supérettes, on trouve néanmoins des clients qui, comme à Rome, profitent de leur unique sortie pour discuter avec le personnel.

En Lombardie (nord), la région la plus touchée d'Italie avec plus de 4.000 morts, certaines chaînes de supermarchés ont même commencé à contrôler avec des scanners thermiques la température de leurs clients à l'entrée des magasins.

AFP

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