Conflit

En Libye, les autorités rivales annoncent un cessez-le-feu et des élections

  • Publié le 21 août 2020 à 18:05
  • Actualisé le 21 août 2020 à 18:35

Les autorités rivales en Libye ont annoncé séparément vendredi l'organisation d'élections et la cessation des combats dans le pays meurtri par des années de conflits, une "entente" saluée par l'ONU.

Cette annonce surprise est intervenue après plusieurs visites de responsables étrangers en Libye ces dernières semaines. Elle apparaît comme la première entente politique depuis l'accord de Skhirat au Maroc conclu en 2015 sous l'égide de l'ONU et en vertu duquel a été créé le Gouvernement d'union nationale (GNA).

Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi après un une révolte populaire en 2011, la Libye, un pays pétrolier, est en proie à des conflits et à des luttes d'influence. Aujourd'hui deux autorités se disputent le pouvoir: le GNA de Fayez al-Sarraj basé à Tripoli et reconnu par l?ONU, et un pouvoir incarné par Khalifa Haftar, homme fort de l'Est soutenu par une partie du Parlement élu et de son président, Aguila Saleh.

Dans un communiqué, Fayez al-Sarraj, également président du Conseil présidentiel, a appelé à la tenue d'"élections présidentielle et parlementaires en mars prochain sur une base constitutionnelle qui bénéficie du consensus de tous les Libyens".

Après plus d'un an de combats meurtriers, M. Sarraj a "ordonné à toutes les forces armées un cessez-le-feu immédiat et l?arrêt des opérations de combat sur tout le territoire", ce qui permettra selon lui, de créer des zones démilitarisées dans la région de Syrte (nord) et dans celle de Joufra, plus au sud, toutes deux sous contrôle des pro-Haftar.

- Syrte -

Dans un communiqué distinct, Aguila Saleh a annoncé des élections, sans avancer de date, et demandé à "toutes les parties" d'observer "un cessez-le-feu immédiat et d?arrêter tous les combats".

Cependant, M. Saleh, ne mentionne pas une démilitarisation de Syrte et Joufra mais propose l'installation d'un nouveau gouvernement qui remplacerait le GNA et serait basé à Syrte, ville natale de Mouammar Kadhafi puis bastion du groupe jihadiste Etat islamique (EI) qui en a été chassé en 2016.

Plusieurs tentatives, parrainées par l?ONU et des acteurs internationaux, dont ceux impliqués directement dans le conflit libyen, n?ont pas réussi à faire aboutir à un cessez-le-feu durable ces dernières années.

Même si la Libye d?après-Kadhafi n?est toujours pas dotée d?une nouvelle Constitution, des "élections parlementaires sont en théorie possibles" mais en pratique il serait difficile de réaliser des élections "pluralistes" et dans un climat "serein", estime Jalel Harchaoui, chercheur à l'Institut Clingendael de La Haye.

"Saleh demande un nouveau Conseil présidentiel depuis plusieurs mois (...) Cela, couplé avec un emplacement à Syrte, participerait à un processus qui permettrait petit à petit de transformer Syrte en une capitale administrative" du pays, selon lui.

- "Difficile" -

La question est de savoir si les annonces des deux rivaux seront "pleinement réalisables. (...) Selon toute vraisemblance, la mise en oeuvre sera difficile", affirme M. Harchaoui.

Dans le conflit, le GNA est soutenu par la Turquie, alors que M. Haftar a l'appui de l'Egypte, des Emirats arabes unis et de la Russie.

En juin, le GNA, aidé militairement par l'allié turc, a réussi à repousser une offensive du maréchal Haftar lancée en avril 2019 pour s'emparer de Tripoli. Le GNA a repris le contrôle de l'ensemble du nord-ouest du pays.

Après l'échec de leur offensive, les pro-Haftar se sont repliés vers Syrte (450 km à l?est de Tripoli), verrou ouvrant la voie vers les principaux sites pétroliers du pays et la base aérienne militaire d'al-Joufra et marquant une ligne de front à mi-chemin entre Tripoli et Benghazi (Est), autre bastion de M. Haftar.

Pour l'heure, les combats ont cessé, mais la libre circulation d'armes et de mercenaires continue.Quoi qu'il en soit, la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul) a accueilli "chaleureusement l'entente, appelant à un cessez-le-feu et à la reprise du processus politique".

A l'étranger, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays a envisagé de déployer des troupes en Libye voisine, a lui aussi salué les annonces libyennes.

AFP

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