Etats-Unis

A Rome, Pompeo appelle le pape au "courage" pour combattre les persécutions religieuses

  • Publié le 30 septembre 2020 à 15:16
  • Actualisé le 30 septembre 2020 à 15:37

Le secrétaire d'État américain Mike Pompeo a appelé mercredi à Rome le pape François à faire preuve de "courage" pour combattre les persécutions religieuses, en particulier face à la Chine avec laquelle le Vatican est sur le point de renouveler un accord sur la nomination des évêques.

"J'appelle tous les chefs religieux à trouver le courage d'affronter les persécutions religieuses de leurs propres communautés, et celles d'autrefois", a déclaré Mike Pompeo au cours d'un séminaire, en présence de l'archevêque britannique Paul Gallagher, en charge des relations du Vatican avec les autres Etats.

"Les dirigeants chrétiens doivent défendre leurs frères et soeurs", a-t-il ajouté après une violente charge contre Pékin qu'il accuse de réprimer ses minorités catholique et musulmane ouïghoure.

"Nulle part ailleurs qu'en Chine la liberté de culte n'est aussi attaquée", selon Mike Pompeo, qui a cité à plusieurs reprises l'engagement du pape Jean-Paul II dans les années 1980 contre le bloc soviétique au nom de ce que le souverain pontife polonais appelait "le risque de la liberté".

"Puissent l'Eglise, et tous ceux qui savent que nous rendons des comptes à Dieu à la fin, être aussi audacieux à notre époque", a martelé le chef de la diplomatie américaine.

Les relations entre les Etats-Unis et le Vatican sont tendues depuis la signature en septembre 2018 d'un accord "provisoire" historique entre le Saint-Siège et Pékin sur la nomination d'évêques.

L'accord, voulu par le pape pour rassembler une Eglise chinoise scindée en deux (les Eglises officielle et clandestine), lui donne le dernier mot pour nommer des évêques chinois et deux prélats ont été ainsi choisis depuis l'accord.

L'intervention de M. Pompeo avait pris très frontalement à partie la diplomatie vaticane dix jours avant son arrivée, via un article dans la revue religieuse américaine conservatrice "First Things". Critiquant son accord avec la Chine, il avait lancé un appel au Saint-Siège pour qu'il condamne les persécutions religieuses en Chine, exigeant son "témoignage moral".

Ces commentaires ont été "fraîchement accueillis" au Vatican, a lâché mercredi l'archevêque Gallagher, sortant de sa réserve en marge de la conférence.
Le "ministre des affaires étrangères" du Vatican a jugé contraires "aux règles de la diplomatie" les propos publics de Mike Pompeo en amont de sa visite.

- L'ombre de la présidentielle américaine -

Mike Pompeo ne rencontrera pas le pape François dans le contexte sensible des élections présidentielles américaines, a confirmé Mgr Gallagher. Un tête-à-tête n'a du reste jamais été au programme, précise une source vaticane. Il sera en revanche reçu jeudi au Vatican par son numéro deux, le cardinal Pietro Parolin.

A la veille de son arrivée sur le sol italien, le cardinal hondurien Oscar Maradiaga, proche conseiller du pape François, avait estimé que les Américains "ne doivent pas s'immiscer dans nos relations avec la Chine", dans un quotidien italien.

Pour Massimo Faggioli, historien et théologien italien enseignant à l'université Villanova aux Etats-Unis, "il y a actuellement une chasse aux votes des catholiques aux Etats-Unis".

"On assiste à la tentative de transformer un certain sentiment anti-pape François et anti-Vatican en votes pour Trump", avance cet expert à l'AFP. Le pape argentin est attaqué par une frange ultra conservatrice catholique, tout particulièrement américaine, qui le traite de "communiste". Certains jugent qu'il parle trop d'inégalités sociales, de migrants et d'exclus, au détriment de points de doctrine traditionnels sur la famille ou la morale sexuelle.

Le pape François a déjà donné son feu vert au renouvellement de l'accord avec la Chine en mode "expérimental" pour deux autres années en octobre, précise à l'AFP une source proche du dossier.

Mercredi, Mike Pompeo rencontrait aussi son homologue italien Luigi di Maio, ainsi que le chef du gouvernement Giuseppe Conte. Au programme: les relations bilatérales, la crise du Covid-19 ou encore le déploiement de la technologie 5G.

La Chine s'invitera-t-elle aussi dans les débats ? Le chef de la diplomatie chinoise Wang Yi avait signé fin août à Rome deux nouveaux accords commerciaux.

Et en mars 2019, les gouvernements italien et chinois avaient signé un protocole d'accord pour sceller l'entrée de l'Italie dans les "nouvelles routes de la soie, projet pharaonique d'infrastructures maritimes et terrestres lancé par Pékin en 2013.

AFP

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