Politique britannique

Antisémitisme au sein du Labour : Jeremy Corbyn interdit de siéger comme député travailliste

  • Publié le 18 novembre 2020 à 18:14
  • Actualisé le 18 novembre 2020 à 19:08

L'ex chef du Parti travailliste britannique Jeremy Corbyn ne pourra plus siéger comme député travailliste, a annoncé mercredi le dirigeant du Labour Keir Starmer, sanctionnant son prédécesseur pour sa gestion de l'antisémitisme dans la formation.

Secoué depuis des années par des incidents à répétition et une foule de démissions, le Labour a fait l'objet d'une enquête menée par un organisme indépendant, le Comité pour l'égalité et les droits humains (EHRC), qui avait conclu fin octobre à des défaillances "inexcusables" résultant d'un "manque de volonté de s'attaquer à l'antisémitisme". M. Corbyn, 71 ans, avait été suspendu du parti pour avoir mis en doute certaines des conclusions du rapport, reprochant notamment aux critiques internes et aux médias d'exagérer l'antisémitisme existant sous sa direction, de 2015 à 2020.

La réponse de M. Corbyn à ce rapport a "sapé et retardé notre travail pour restaurer la confiance dans la capacité du Parti travailliste à lutter contre l'antisémitisme", a expliqué Keir Starmer sur Twitter pour justifier sa décision. En refusant de réintégrer M. Corbyn dans le groupe parlementaire travailliste, Keir Starmer satisfait les associations juives, très remontées contre l'ex-chef du parti, mais risque de soulever la colère de l'aile gauche du parti que représente M. Corbyn. M. Starmer a laissé la porte entrouverte en ajoutant qu'il continuerait à "étudier la situation".

- "Eradiquer l'antisémitisme" -

Jeremy Corbyn avait annoncé mardi avoir été réintégré au sein de la formation d'opposition, après une décision favorable du comité des différends du Comité national exécutif (NEC) du Labour, l'instance dirigeante du parti. Avant la réunion du NEC, Jeremy Corbyn avait publié un communiqué pour clarifier ses propos, assurant que "les inquiétudes au sujet de l'antisémitisme ne sont pas +exagérées+".

"Ce que je voulais dire, c'est que la grande majorité des membres du Labour étaient et restent des anti-racistes engagés, profondément opposés à l'antisémitisme", a-t-il ajouté, disant regretter "le mal qu'a causé ce problème à la communauté juive". Keir Starmer a justifié sa décision en soulignant que "depuis que j'ai été élu chef du parti travailliste, je me suis donné pour mission d'éradiquer l'antisémitisme du Parti travailliste. Je sais que je serai jugé sur mes actes, pas sur mes paroles".

Sa décision a été saluée par des associations et personnalités juives, comme la députée travailliste Margaret Hodge qui a salué sur Twitter une "bonne décision". La réintégration de M. Corbyn dans le parti, mardi, avait provoqué "une souffrance et une angoisse incalculables dans la communauté juive, sapé les progrès accomplis et m'a fait remettre en question ma propre place dans le parti", a-t-elle dit sur le réseau social. Le secrétaire général du syndicat Unite, Len McCluskey, proche de M. Corbyn, avait au contraire estimé que sa réadmission dans le parti était une "décision correcte, juste et unificatrice".

John McDonnell, allié de longue date de M. Corbyn, a jugé "complètement erronée" la décision de M. Starmer, estimant qu'elle provoquerait "plus de division et de désunion dans le parti". Plus centriste et europhile que son prédécesseur, Keir Starmer a désormais la délicate mission de solder l'héritage de M. Corbyn et de réunifier son parti qui constitue la principale formation d'opposition au Royaume-Uni. Sa décision est un "geste bienvenu", a déclaré Fiona Sharpe, porte-parole de l'association Labour Against Anti-Semitism dans un communiqué. Toutefois, elle note que "l'autorité de Keir Starmer a été complètement sapée" par la décision du NEC de réintégrer M. Corbyn.

AFP

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