Enceinte portuaire

L'Histoire se raconte sur les murs

  • Publié le 3 janvier 2005 à 00:00

Le port Ouest de la Pointe des Galets (l'ancien port) ne connaît plus l'affluence de ses heures de gloire lorsque tout le trafic maritime, qu'il soit de marchandises ou de passagers, passait forcément dans ses bassins. L'ancien port n'en est pas mort pour autant. Il s'est juste légèrement assoupi devant les murs qui gardent trace de sa gloire passée (reportage paru le 19 mars 2002)

Depuis une dizaine d'années maintenant, la majorité des bateaux, aussi inconstants dans leur amour que la mer dans son humeur, préfèrent le port Est au port Ouest. Plus jeune, plus moderne, plus équipé, plus fonctionnel, c'est lui qui reçoit désormais le gros du trafic maritime
L'ancien port n'est pas totalement inactif pour autant. Il continue d'accueillir quelques navires. Il les regarde décharger leurs marchandises, récurer leurs coques, débarquer leurs hommes. Il regarde tout cela et il se souvient.
Il se souvient de ces bateaux qui arrivaient de l'autre bout du monde, de Turquie ou de Grèce, de Thaïlande ou du Pakistan, d'Australie ou de France et de bien d'autres pays encore. Il revoit ces marins aux visages burinés par les vents salés et le soleil impitoyable. Il entend encore les clameurs des dockers déchargeant à dos d'homme des caisses et des sacs pesant deux ou trois fois le poids de leurs porteurs. Il sent aussi la caresse des pinceaux que ces marins trempaient dans des peintures vives avant de tracer des lettres et des dessins sur le long mur faisant face au bassin ou carrément sur le sol du quai.

Le monde entier pour maison

Harassés par de longues et pénibles semaines de mer, ces hommes peignaient leur joie de retrouver la terre ferme. Marins ayant le monde entier pour domicile, ils marquaient de leur empreinte ce morceau d'île qui avait accepté de les recevoir. Ils peignaient pendant que les dockers déchargeaient les marchandises qu'ils avaient amenées à bon port.
Les marins inscrivaient le nom de leur navire bien sûr, mais aussi celui de leur capitaine, celui du pays dont le bateau battait pavillon, la date de leur passage dans le port. Ils inscrivaient les noms de tous les hommes d'équipage. Ils s'appelaient Guevara, Doulos, Makris, Mahmutoglu, Villegas, Mohammed, Burrows... Ils dessinaient une rose des vents ou des étoiles comme donner une touche d'espoir à leurs ?uvres. Ils utilisaient toujours des couleurs très vives. Pour que les dessins et les noms soient le plus voyant possible. Pour qu'on ne les oublie pas.
Leurs ?uvres sont toujours là, marquées à jamais dans la pierre du mur aux souvenirs. Témoignages vivants d'une histoire passée mais pas effacée.
guest
0 Commentaires