Restauration

"Fait maison" un label au goût inachevé

  • Publié le 4 août 2014 à 05:02

L'entrée en vigueur du label "fait maison" depuis le 15 juillet 2014, s'installe doucement mais sûrement chez les restaurateurs locaux. Ce label est accueilli positivement par la profession car, disent les professionnels de la restauration, "il vient confirmer une cuisine traditionnelle et authentique". Reste que le texte régissant l'obtention de ce titre demeure flou, au point de pouvoir s'accommoder de l'assemblage de différents produits surgelés pour la réalisation d'un plat réputé "fait maison". Le logo est représenté par une casserole couverte d'un toit de maison. Il peut être apposé soit sur la carte présentant le menu ou sur la devanture des établissements (Photo d'ilustration).

Ce petit logo serait l’assurance pour le consommateur d’une cuisine faite sur place à base de produits bruts. Selon le texte, " un produit brut (…) est un produit alimentaire n’ayant subi aucune modification importante y compris par chauffage, marinage, assemblage ou une combinaison de ces procédés ". Il peut être attribué plat par plat. Pour le moment le logo n’a pas encore fait son apparition à l’enseigne Cap Méchant, restaurant de plats préparés à emporter du chef-lieu. Jimmy, chef cuisinier de l’établissement et responsable traiteur, n’a pas encore reçu de consigne de la part de la direction : " le dispositif est récent et pour le moment il n’a pas encore en vigueur chez nous. "

Et quand on l’interroge sur l’intérêt du label, il se montre plutôt optimiste : " sur le principe c’est pas mal, ça permet de valoriser le savoir-faire des professionnels de la restauration locale et de garantir une cuisine de qualité à nos clients. Il faut savoir que chez nous le client est informé de l’origine de nos viandes, poissons, s’il s’agit de produits frais, locaux ou surgelés. On ne travaille quasiment qu’avec du frais, tout est fait chez nous sur place, à quelques rares exceptions comme des produits qu’on ne trouve pas localement et dont les coûts à l’importation seraient beaucoup trop élevés." Au Reflets des îles, restaurant traditionnel incontournable de Saint-Denis, le logo " fait maison " là encore, n’a pas fait son apparition : " il s’agit d’une simple formalité administrative, pour nous, le fait maison c’est depuis toujours, c’est ce qui fait la valeur de notre établissement.

Pour autant le label est valorisant et permettra surtout aux consommateurs d’avoir une traçabilité de ce qu’il a dans son assiette" explique David Banon directeur de l’établissement. Autre table de renom, le Bistrot de la Porte des Lilas, ou le label " fait maison " fait un peu chou blanc. En effet l’établissement déjà détenteur du titre "maître restaurateur " qui garantit aux consommateurs 80% de produits frais, peut largement se passer de cette nouvelle mention.

Dans certains cas, le fameux décret relève du mystère, au Yok du rond-point, petit snack de Sainte Clotilde, le personnel perplexe ne sait quoi en dire : " non, on n’est pas au courant, peut-être prochainement, mais nous on fonctionne avec du frais, on épluche nos légumes, enfin voilà ça ne changera pas grand-chose. "

De l'assemblage "fait maison"...

Si ce premier pas vers une démarche plus qualitative est salué, certaines catégories de produits décrites au sein du décret semblent un peu floues. Ainsi selon le texte officiel peuvent entrer dans la composition d’un plat " fait maison " les produits qui ont été réceptionnés par le professionnel : " épluchés, à l’exception des pommes de terre, pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus ou broyés; fumés, salés ; réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide. " Une liste non exhaustive qui donne une définition très large des produits pouvant prétendre au label fait maison.

On apprend entre autres que la crème fraîche, le lait, les biscuits secs mais également la pâte feuilletée crue, sont également acceptés. Aussi une tarte aux pommes confectionnée en cuisine à partir de pommes prédécoupées surgelées, et de pâtes feuilletées crues industrielles, pourra bénéficier de l’appellation " fait maison ". Un simple exemple qui nous montre combien la frontière entre la cuisine d’assemblage et le fait maison, tel que nous le décrit le décret, semble trop ténue.  Un label qui gagnerait donc à être peaufiné dans le temps afin de permettre une lecture plus claire autant aux consommateurs qu’aux professionnels du secteur.

Même si le décret requiert quelques améliorations, le chef cuisinier du Cap Méchant ne s’en inquiète pas outre- mesure : " le label c’est un plus, mais le client sait reconnaître une cuisine de qualité, il ne faut pas oublier que le bouche à oreille c’est ce qui fonctionne le mieux à la Réunion et partout ailleurs. "

A noter pour les professionnels concernés, qu’ils ont jusqu'au 1er janvier 2015 pour mettre en application la nouvelle législation. Passé cette date, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes effectuera des contrôles. Tout contrevenant au décret sera passible des " sanctions prévues par le Code de la consommation en matière de tromperie et de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur le consommateur ", indique le ministère de l'économie.

Ingrid Koenig

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5 Commentaires
daaazibao
daaazibao
9 ans

La France ou le pays des demi-lois, des lois oui-mais... aussi des oui-sauf...
Petit exemple un fromage "pur chèvre" peut contenir jusqu'à 50% de lait de vache...
A croire que nos législateurs ne se relisent pas ou font un suprême effort pour nous faire des lois contournables... serait-ce pour mieux se servir???

bimalt
bimalt
9 ans

le cuisinier du cap méchant a tout dit, c un sage, on sait reconnaître la qualité, et on en parle......

daaazibao
daaazibao
9 ans

La France ou le pays des demi-lois, des lois oui-mais... aussi des oui-sauf...
Petit exemple un fromage "pur chèvre" peut contenir jusqu'à 50% de lait de vache...
A croire que nos législateurs ne se relisent pas ou font un suprême effort pour nous faire des lois contournables... serait-ce pour mieux se servir???

Simple
Simple
9 ans

@JP Hoarau : il suffit de manger chez soi (la pizza, c'est très facile à faire et le reste aussi). La marchandise joue avec le feu avec ce genre de label obtenu de haute lutte par lobbying contre le gouvernement et ses possibilités de surveillance de la qualité de l'alimentation : en tant que consommateur, je boycotte depuis toujours les surgelés, l'assemblage et la mauvaise alimentation. Pourquoi aller payer cher de mauvais produits ?

jl Hoarau
jl Hoarau
9 ans

comment être certain de ne pas manger de fromage de synthèse dans une pizza? Au supermarché il y a l’étiquette. A la pizzeria "fait maison"....