Saint-Paul - Nouvel épisode de surmortalité

L'étang se vide, les poissons meurent...

  • Publié le 31 octobre 2014 à 15:45

Nouvel épisode de surmortalité chez les poissons de l'étang Saint-Paul. Consécutivement à deux épisodes de vidange partielle de l'étang, mercredi dernier et ce vendredi 31 octobre 2014, les utilisateurs et riverains de ce plan d'eau qui est aussi une réserve naturelle, n'ont pu que constater une évidente dégradation de la qualité de l'eau, devenu turbide, et une forte mortalité chez les poissons, qui n'épargne apparemment aucune espèce ; de grosses pièces sont échouées sur les rives et nombre de poissons morts ont été évacués en mer du fait de l'ouverture de la digue fusible.

Ces derniers temps le niveau de l'eau de l'étang était assez élevé, et en dépit de quelques épisodes de houle modérée, la salinité de l'eau était modérée, tout du moins au goût. Mercredi dernier, la digue-fusible qui sépare l'étang de la baie a été partiellement ouverte, entraînant une nette baisse du niveau des eaux, devenues opaques, car chargées de matières en suspension. La couleur de l'eau, claire au niveau de la roue du tour des roches, a viré au sombre, couleur café allongé, et le comportement des poissons qui nageaient à la surface, visibles par le friselis qu'ils provoquaient à proximité du ponton de ski nautique, signalait une baisse du taux d'oxygène dissous. Les activités de ski nautique, le sillage du bateau et celui des skieurs, présentent l'avantage de remuer la masse d'eau et donc de faciliter sa réoxygénation, ce qui expliquait la présence de petits bans de poissons à proximité immédiate des zones es plus remuées.

Entre mercredi et ce vendredi, l'état de la masse d'eau s'est dégradé entraînant la mort d'un grand nombre de poissons de toutes tailles. La réouverture de la digue a accentué le phénomène de vidange et le niveau de l'étang a considérablement baissé, abandonnant sur les rives le reliquat des poissons mort ces derniers jours.

Dans les faits, les eaux de l'Etang St-Paul qui sont globalement saumâtres, présentent une stratification minérale qui varie avec les zones et la profondeur, la densité, ou la minéralisation des eaux croissant du simple au double entre la surface et le fond. Et cette stratification est perturbée à chaque vidange de l'étang, quand bien même elle n'est que partielle, comme ce fut le cas mercredi dernier.

Le milieu de vie des poissons s'en trouve fort perturbé

A ce paramètre s'ajoute celui du taux d'oxygène dissous, qui varie lui aussi entre la surface et le fond. Si les eaux de surface présentent en période diurne une oxygénation importante due à la photosynthèse produite par le phytoplancton et les végétaux aquatiques, le phénomène s'inverse la nuit, les mêmes organismes consommant de l'oxygène quand ils produisent du CO2… La désoxygénation est par ailleurs accentuée faute de brassage des eaux, les activités humaines s'interrompant de nuit. Des études de milieu ont montré qu'en surface, dans le coude de l'étang, fin décembre, on peut enregistrer un taux de saturation en oxygène de 133%, quand dans le même temps, au même endroit, mais au fond, ce taux n'est que de 30 %.

Il convient d'expliquer que dans les couches basses des eaux, il se produit un phénomène de dégradation bactérienne des matières organiques qui, tout d'abord en suspension, rejoignent le fond et s'agglomèrent à la vase par décantation. Cette situation favorise la désoxygènation des eaux, et limite la décomposition des matières organiques ; d'où une eau trouble car chargée de matières organiques en suspension, qui produise cet effet de vase noire propre aux sédiments du fond de l'étang. Il en résulte un pourcentage de saturation en oxygène qui peut être inférieur à 30%. Que la vidange amène à la surface une telle qualité d'eau, et le milieu de vie des poissons s'en trouve fort perturbé.

C'est vraisemblablement ce qui s'est produit entre le 29 et le 31 octobre. La modification du milieu a été telle que les poissons ne l'ont pas supportée, ou qu'ils ont été suffisamment affaiblis pour succomber à d'autres atteintes, on pense évidemment aux pollutions multiples qui affectent l'étang Saint-Paul en dépit de la réglementation.

Fin juin de cette année, un précédent épisode de surmortalité de poissons de l’Etang avait été constaté, dans des conditions globalement similaires. Haut niveau, vidange… La thèse d'une trop forte salinité avait été abandonnée, les tilapias ayant été eux-mêmes affectés quand ils supportent très bien les eaux saumâtres ; quant à une piste bactériologique, on attend toujours les résultats des prélèvements alors opérés par les agents de la réserve.

Philippe Le Claire pour Imaz Press Réunion

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