Huguette Bello se raconte dans son livre "Rêves d'enfants, convictions d'adultes"

"Me taxer de raciste alors qu'il y a tous ces combats que j'ai menés... c'est mal me connaître"

  • Publié le 28 janvier 2016 à 04:00

Huguette Bello se dévoile dans son premier recueil intitulé "Rêves d'enfant, convictions d'adulte". Le livre se présente sous la forme d'un entretien de 60 pages avec l'auteur Camille Coutans. La présidente du PLR revient sur son enfance, sa séparation avec le PCR ou encore la polémique sur les zorey. Elle exprime sa volonté de se montrer telle qu'elle est pour que les Réunionnais la connaissent mieux.

Pourquoi décider de vous livrer aujourd’hui, pour la première fois, dans ce recueil?

C’est un petit livret qui aurait dû sortir pour la compagne mais, pour des raisons techniques, ça n’a pas pu être fait. Je crois qu’on a une image tronquée de ma personne, qui ne correspond pas entièrement à ce que je suis. Je viens moi même d’une famille très modeste, mon papa était un petit cultivateur qui était colon, je viens d’une fratrie de 6 enfants, j’étais la seule fille. On nous a inculqué des valeurs extraordinaires.

Il était important pour vos parents que vous ayiez une bonne instruction?

L’éducation est essentielle pour toutes les sociétés et ça l'était pour La Réunion, c'était juste après la départementalisation. Il fallait instruire, alphabétiser les enfants réunionnais. Le lycée était très loin, il n'y en avait que deux sur l'île. Ma mère et mon père se sont fait un grand devoir de nous y envoyer et de nous faire donner quelques cours particuliers pour qu’on progresse.

Ma mère ne m’a pas élevé à des travaux de fille, elle a toujours refusé de m’apprendre à faire la cuisine et laver le ballot de linge dans la rivière. A cette époque, les aînées des familles était sacrifiés, pour aider les enfants qui arrivaient, c’était des familles nombreuses, on ne connaissait pas encore la contraception. En moyenne on comptait 7 enfants par femme. Ma mère me répétait toujours qu'"un garçon qui n’est pas indépendant c’est terrible, mais une fille qui ne l'est pas, c’est encore bien pire". Elle-même a été vraiment dépendante de mon père et elle a voulu pour moi cette indépendatce économique, cette liberté. Les femmes étaient très entravées à l’époque. Pour travailler avant la majorité (21 ans), il fallait demander au tribunal une émancipation, par exemple.

Tout cela a-t-il contribué à vous forger, à faire émerger ce combat pour la justice qui vous a animé plus tard?

C’était la grande misère, les inégalités étaient criantes, les familles n’avaient pas de quoi manger. Il n'y avait pas d’eau courante, on connaissait encore des maladies comme la parasitose où les enfants avaient le ventre gonflé parce qu'ils avaient des vers. C’était l’époque aussi où de nombreuses femmes étaient exploitées comme femmes de ménages.

Il y avait 13 grandes familles, de grands propriétaires terrriens qui dominaient toute la Réunion. Mon père était agriculteur. C’était la domination de l’usinier sur les petits planteurs. On est évidemment forgé à la lutte pour la justice sociale, c’était la grande injustice sociale.

Racontez-nous comment a commencé votre engagement au parti communiste...

J’ai enseigné jusqu’à ce que je sois devenue députée, après je ne pouvais plus faire les deux. Je suis rentrée au PC parce que c’était celui qui défendait les planteurs,

A l'époque, il y avait les satellites, l'organisation des travailleurs, des planteurs... c'était un grand travail commun. Nous avons mené un beau combat pour l'égalité sociale. Je n'ai pas de regret là-dessus.

Comment avez-vous vécu cette séparation avec le parti communiste?

Il y a toujours eu des différends qu'on a lissé depuis mon engagement en 1974. Mais, à un moment donné, en 2012, on n'en pouvait plus. Déjà en 2004 ça n'allait plus, au moment de la composition de la liste pour les régionales - lorsqu'on m'a dit qu'il fallait venir en 4ème position derrière quelqu'un qui était à l'UMP. On m'a imposé un certain nombre de choses. A un moment il faut dire non. Je dis non lorsqu'il y a des valeurs que l'on écrase. C’est pareil en 2012, alors que je suis sortante de la 2ème circonscription, qu’on me dit d’aller dans la 7ème et qu’on met en face de moi deux hommes.

Aujourd'hui quels sont vos rapports avec vos anciens camarades?

J’ai de bonnes relations avec les militants de base, mais je n’en ai pas avec la direction du parti. C'est terminé.

Dans ce livre, vous racontez aussi d’autres choses qui vous ont touché, notamment le fait que vous soyiez taxée de raciste...

Je suis une anti raciste de tout temps. Moi qui suis arrière-arière petite fille d’esclave et qui suis issue de l'histoire d’un peuple réunionnais qui est né lui-même de quelque chose d'abominable, du racisme le plus extrême, de l’esclavage. Me taxer de raciste alors qu’il y a tous ces combats que j’ai menés... C’est mal me connaître, mal connaître qui je suis et ma famille. Est ce que c’est être raciste que de dire que je connais mon pays? Quelle offense il y a là-dedans? C’est l’amour que j’ai pour cette terre et les hommes et les femmes qui y vivent.

Quels sont pour vous les prochains grands objectifs que vous vous êtes fixé?

C’est toujours le combat, pour la jeunesse, contre l’illettrisme, pour le savoir à la Réunion. L’ignorance est responsable de toutes sortes d’incompréhensions. Il y a encore beaucoup de combats à mener pour que notre société soit plus juste, plus égale, plus solidaire et je ne baisserai pas les bras.

C'est votre premier livre, est-ce qu'il y en aura un deuxième?

Moi-même j’aimerais écrire mais je vais prendre le temps. Ecrire ce n’est pas se précipiter, j’ai beaucoup de choses à dire que je n’ai pas dites.

www.ipreunion.com

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2 Commentaires
héva
héva
8 ans

Eclairante cette interview : en fin de compte, ce n'est qu'une question de pouvoir, de frustration et de revanche. Huguette Bello n'a pas digéré qu'une autre femme soit devant elle sur la liste des Régionales en 2004. Pourtant, elle ne peut se plaindre avec tous les mandats qu'elle a eus en tant que PCR : conseillère régionale en 83, conseillère générale en 88, adjointe au maire de St-Pierre en 83, puis adjointe au maire de La Possession, maire de St-Paul en 2008. Quant au mandat de députée, elle le détient depuis1997. Lors des prochaines législatives de 2017, cela fera 20 ans ! la pasé, mèt ankor ?

toto
toto
8 ans

que du bla bla, Mme BELLO essaie de se rattraper parcequ'elle sait très bien que son mandat de député se termine bientôt