Drame

Guinéen tué près de Rouen: un suspect interpellé, sa garde à vue levée pour raison médicale

  • Publié le 22 juillet 2019 à 17:15
  • Actualisé le 22 juillet 2019 à 17:42

Moins de soixante-douze heures après l'agression mortelle d'un jeune universitaire guinéen près de Rouen, qui a suscité un fort émoi pour son caractère présumé raciste, un homme de nationalité turque, aux antécédents psychiatriques, a été interpellé lundi matin mais sa garde à vue a été levée pour raison médicale.

Le suspect, de nationalité turque, selon des sources policières, né en 1990, a été interpellé "ce matin à Rouen à 9H30". Il présente des "antécédents psychiatriques" et est "sous curatelle renforcée".

"C'est un petit voyou connu pour des délits mineurs, comme de stupéfiants", a indiqué à l'AFP une autre source policière. "Il a été identifié sur la base de l'exploitation de vidéos et de témoignages", a ajouté cette source, précisant que le suspect était originaire de Canteleu, dans la banlieue de Rouen, où s'est déroulée l'agression, mais n'y habite plus. De même source, le suspect portait "un maillot du club turc de Galatasaray", un club de football d'Istanbul, au moment des faits qui ont eu lieu vendredi vers 20h20, peu avant la finale de la Coupe d'Afrique des Nations entre l'Algérie et le Sénégal.

Le procureur de Rouen Pascal Prache, qui avait confirmé l'interpellation et la garde à vue d'un suspect, a indiqué à l'AFP en début d'après-midi qu'"à la suite de l'examen médical, la garde à vue allait être levée" et le suspect "hospitalisé". Selon l'avocat de la famille Me Jonas Haddad, "il s'agit d'un crime raciste, sans aucun doute, mais rien ne permet d'établir que c'est en lien avec la finale de la CAN". "Rien ne permet de dire aussi qu'il a été agressé par un supporteur algérien", avait-il dit lundi matin à l'AFP alors que certaines personnalités et associations pointaient du doigt la communauté algérienne.

- Marche blanche vendredi -

Vendredi soir, Mamoudou Barry, enseignant-chercheur à l'Université de Rouen-Normandie, a été invectivé par son agresseur, à la hauteur de l'arrêt de bus Provence à Canteleu, alors qu'il rentrait chez lui en voiture avec son épouse, selon des proches de la victime et l'avocat.
"L'agresseur les a pointés du doigt et a dit: "Vous les sales noirs, on va vous niquer ce soir", a expliqué Kalil Aissata Kéita, enseignant chercheur à l'Université de Rouen, lui aussi Guinéen et "ami proche" de la victime. M. Barry serait descendu de sa voiture pour demander des explications. L'agresseur "l'a frappé à coups de poings et de bouteilles", puis, "la victime est mal tombée, il a perdu beaucoup de sang. Quelqu'un a tenté de lui faire un massage cardiaque", a expliqué Me Haddad.

Transporté au CHU de Rouen, Mamoudou Barry, père d'une petite fille, est mort samedi. Mamoudou Barry, âgé de 31 ans, avait soutenu une thèse de droit le 27 juin à Rouen sur les "Politiques fiscales et douanières en matière d'investissements étrangers en Afrique francophone", selon le site de l'Université. Une marche blanche doit être organisée vendredi à Rouen, a précisé l'avocat. Cette agression mortelle avait suscité dimanche une cascade de réactions politiques, de droite comme de gauche. Eric Ciotti (LR) avait dénoncé un "crime barbare", Olivier Faure (PS) voyant dans l'agression "le racisme à en pleurer". Lundi, le président guinéen, Alpha Condé, s'est déclaré "très touché". "Le gouvernement guinéen suit de très près l'évolution des enquêtes diligentées par les autorités françaises", indique un communiqué de la présidence, en précisant que le chef de l'Etat "s'entretiendra avec l'ambassadeur de France en Guinée pour la suite à donner".

L'ex-Premier ministre guinéen et opposant Sidya Touré s'est lui aussi dit "très peiné par la mort du jeune enseignant Mamoudou Barry dans des conditions aussi tragiques". A Dakar, le président sénégalais Macky Sall a condamné sur Twitter un "crime odieux".
Dans un communiqué, SOS Racisme a demandé que "toute la lumière" soit faite, estimant qu'"il flotte sur cet acte criminel un parfum de racisme sur lequel les services enquêteurs doivent rapidement se prononcer".

 © 2019 AFP

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