Un rapport de confiance à réhabiliter

"Sécurité globale" : Macron à la recherche d'une porte de sortie

  • Publié le 30 novembre 2020 à 16:13
  • Actualisé le 30 novembre 2020 à 16:19

A la recherche d'une porte de sortie de la crise politique autour de la loi "Sécurité globale", Emmanuel Macron réunit lundi gouvernement et patrons de la majorité, tandis que le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin doit se retrouver face aux députés.

Au lendemain d'un week-end de manifestations fournies contre un texte conspué par la gauche, les journalistes et les défenseurs des libertés publiques, le chef de l'Etat réunit à midi à l'Elysée le Premier ministre Jean Castex, des ministres et les présidents des groupes de la majorité au parlement, selon des sources gouvernementale et parlementaires. Il avait demandé la semaine passée que lui soient faites "rapidement des propositions pour réaffirmer le lien de confiance" entre police et population.

Resté en retrait pendant l'examen à l'Assemblée du texte "Sécurité globale" à l'article 24 controversé sur la pénalisation de la diffusion malveillante d'images de policiers, le chef de l'Etat a fustigé vendredi le tabassage à Paris d'un producteur noir par des policiers, révélé par des images de vidéosurveillance - "des images qui nous font honte" a dit M. Macron. Gérald Darmanin sera entendu lundi à 18H15 par la commission des Lois de l'Assemblée, après une visioconférence à huis clos en matinée avec les commissaires LREM aux Lois, puis mardi à 17H00 avec l'ensemble du groupe.

Les tensions engendrées par la proposition de loi votée mardi par l'Assemblée en première lecture ont explosé jeudi après la diffusion des images du passage à tabac du producteur. Parmi les quatre policiers mis en examen ce week-end, trois le sont pour "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique (PDAP)", avec des circonstances aggravantes dont "des propos à caractère raciste". Ils ont aussi été mis en examen pour "faux en écriture publique par personne dépositaire de l'autorité publique", un crime passible des assises.

- "Atout" -

Sur les quatre policiers, deux ont été écroués, et deux placés sous contrôle judiciaire. Mais la pression ne retombe pas, et de nouvelles vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré ce week-end des policiers cette fois frappés par des manifestants. Alors que certains à gauche, dont le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon, ont réclamé la démission de M. Darmanin, incarnation d'une aile droite, la majorité lui réitère son soutien. "C'est un bon ministre de l'Intérieur", a assuré lundi le délégué général de LREM Stanislas Guerini.

"La priorité mise sur la sécurité est légitime. Mais il y a la personnalité du bonhomme qui est fort en gueule. Et il entretient une forme de mimétisme par rapport à Sarkozy qui ressort", glisse toutefois un député LREM. A "en faire beaucoup pour faire (de ce texte) un marqueur idéologique et donc électoral", "Gérald Darmanin s'est laissé prendre à son propre piège car cette majorité n'est pas prête à accepter ce genre de choses", estime dans l'opposition Gilles Platret, vice-président des Républicains. Ainsi l'idée, sous l'impulsion de M. Darmanin, d'une commission indépendante chargée de "réécrire" l'article 24 a-t-elle explosé en vol, victime du courroux de parlementaires de tous bords criant au "mépris" du gouvernement pour leur travail.

- "L'art de créer des crises" -

Que faire désormais de l'article 24 ? Reculer ouvrirait un boulevard aux critiques de la droite sur un laxisme supposé de l'exécutif sur les questions régaliennes; s'entêter conforterait la gauche dans ses accusations de velléités "liberticides". Certains dans la majorité ne doutent plus: "Parfois, renoncer est plus sage que s'obstiner", estimait dès vendredi le député et vice-président LREM de l'Assemblée Hugues Renson. La présidente LREM de la commission des Lois à l'Assemblée Yaël Braun-Pivet se dit, elle, "fermée à rien".

S'il était retiré, l'article pourrait être recyclé dans le projet de loi contre les "séparatismes", dont l'article 25 reprend l'esprit de la mesure, selon des responsables de la majorité. Le ministre des Relations avec le parlement Marc Fesneau juge que ce "peut être une des voies" en soulignant qu'il reste encore "des mois de travail". Car le calendrier législatif, qui prévoyait le passage du texte au Sénat en janvier, n'est "plus garanti", confirme le sénateur LR Philippe Bas, pour qui "ce gouvernement a l?art de créer lui-même des crises politiques et de les aggraver en voulant les résoudre".

AFP

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