Par arrêté préfectoral, une palangre pourrait être installée en zone de protection renforcée de la Réserve

Les requins peut-être bientôt pêchés à Boucan Canot

  • Publié le 16 février 2017 à 12:40

Depuis le 8 février 2017, une consultation publique a été lancée sur l'ouverture d'un secteur de pêche professionnelle à Boucan Canot. Le projet d'arrêté préfectoral devrait, pour la première fois, concerner une ZPR (zone de protection renforcée) et s'étendre sur une superficie de 1,28 hectares. La Réserve Marine a émis un avis défavorable à ce projet, motivant entre autres sa décision par le risque humain encouru.

Dans le cadre du programme Cap Requins 2, un projet d’arrêté a été émis pour ouvrir un secteur de pêche professionnelle supplémentaire à Boucan-Canot. Plus précisément dans la bande des 300 mètres au delà de la zone de baignade où un jeune homme s’est fait attaquer par un squale en août 2016. Les filets de protection étaient alors endommagés. C’est la deuxième attaque qui intervient en ZPR (zone de protection renforcée de la réserve naturelle marine) sur cette plage depuis 2011, soit le début de ce qui va ensuite être appelé "la crise requin".

Le concept de pêche est sensiblement le même que celui déjà utilisé dans la baie de Saint-Paul ou à Sainte-Marie. Une palangre verticale amovible avec alerte de capture serait ainsi installée sur le secteur concerné pour une durée de 12 heures : dès le coucher du soleil, vers 18 heures, avant d’être relevée vers 6 heures du matin. Les opérations se déroulent toujours sous la direction du comité régional des pêches et des élevages maritimes.

D’abord soumis à une consultation publique, si l’arrêté entre ensuite en vigueur, il sera mis en place pour une période de six mois. Une évaluation du dispositif devra ensuite être réalisée à mi-parcours, en concertation avec le conseil scientifique de la Réserva Naturelle Marine. Car la spécificité de ce nouveau secteur, c’est qu’il se situera "en zone de protection renforcée de la réserv"", précise Olivier Bielen, directeur du centre de ressources et d’appui sur le risque requin. Ce n’est donc pas particulièrement la proximité de la zone de baignade qui ferait barrage à la mise en place de l’arrêté : aux Roches Noires, un engin de pêche similaire est déjà ponctuellement déployé depuis un an et demi, plus proche encore des baigneurs. Au Port de Saint-Gilles, la palangre verticale se situe, elle, par exemple, en zone de protection générale.

- Le conseil scientifique de la Réserve dit non -

Mais la réponse du conseil scientifique de la Réserve Naturelle Marine est quant à elle sans appel. Réuni ce 9 février, le conseil a émis un avis défavorable sur ce projet destiné à s’installer en zone de protection renforcée. Car, selon le CS, un renouveau de la population de requins de récifs pourrait "éventuellement" faire barrage à l’installation de nombreux juvéniles requins bouledogues. Mais, pour ce renouveau, "il est nécessaire d’avoir pu reconstituer une ressource en poissons récifaux", soit la nourriture de ces requins de récifs. Une restauration qui est un peu l’essence de la réserve naturelle, de ses zones de protection renforcée et de ses sanctuaires.

- Le projet d’arrêté motivé par un "déséquilibre de l’écosystème" -

Selon les résultats du programme Charc (Connaissances de l’écologie et de l’habitat de deux espèces de requins côtiers sur la côte ouest de La Réunion), l’écosystème marin sur la côte ouest serait en proie à un déséquilibre. La mobilité des requins pourrait ainsi expliquer leur présence à l’intérieur des ZPR de la réserve. Le projet d’arrêté met ainsi en avant "l’intérêt scientifique majeur" de la capture des requins "pour la détermination de leurs caractéristiques écologiques et physiologiques".  Mais le CS de la Réserve Marine n’est pas du même avis : "compte tenu de l’existence d’un linéaire côtier limité à La Réunion (…), et de la mobilité avérée des espèces ciblées (…) le positionnements de dispositifs en zones de protection renforcée (8,2% du linéaire total de l’île) ne paraît pas nécessaire" indique l’avis du Conseil.

- La réduction du risque d’attaque mise en doute -

Outre ce point bloquant autour de la ZPR, la Réserve pointe du doigt la proximité des activités humaines. L’avis du CS rappelle que "Cap Requins 1 a démontré que les requins pouvaient être présents autour des drumlines sans pour autant toucher les appâts". Le programme est d’ailleurs défini comme une pêche de régulation et non un dispositif de protection des usagers.

La Réserve souligne aussi que "plus de 15 sites de plongée" sont situés à "quelques centaines de mètres de la zone de pêche proposée". Un risque d’attaque pourrait ainsi s’accroître, selon le CS, particulièrement dans le cas de plongée de nuit.

 - Une consultation ouverte au public -

Chacun est invité à s’exprimer sur ce projet d’ouverture d’un secteur de pêche professionnel à Boucan Canot. Il est mis à disposition du public depuis le 8 février sur le site internet de la Préfecture. Les observations peuvent être transmises à l’adresse mail dm-soi@developpement-durable.gouv.fr jusqu’au 28 février.

mp/www.ipreunion.com

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