Attentats contre le World Trade Center à Manhattan

17 ans après le 11-Septembre les Réunionnais se souviennent

  • Publié le 11 septembre 2018 à 03:00
  • Actualisé le 11 septembre 2018 à 12:38

C'était il y a dix-sept ans... Les images des tours jumelles du World Trade Center qui s'effondrent à Manhattan (New York) passent en boucle dans les médias. Les chaînes télé et radio ont cassé leurs programmes. À La Réunion, comme dans le monde entier, on suit, totalement abasourdi, l'attentat le plus meurtrier du début des années 2000. Près de 3000 morts et plus de 6000 blessés. Les États-Unis, plus grande puissance mondiale, touchés en plein coeur sur leur sol. Le monde découvre l'organisation terroriste Al-Quaïda. Certains découvrent même ce qu'est le terrorisme.

C'était il y dix-sept ans

Le premier constat est qu’environ un quart des réunionnais croisés dans une rue passante du centre ville de Saint-Denis a oublié ce 11 septembre 2001. Certes, c’était il y a dix-sept ans… Toutefois, pour ceux qui s’en rappellent, le souvenir est encore vif. Profondément ancré. Ils se souviennent exactement d’où ils étaient, de ce qu’il faisaient. Regardez.

Des notables réunionnais se remémorent aussi ce 11 septembre 2001

Richard Riani est un plasticien réunionnais. Il cultive un lien particulier avec les États-Unis. Le quinquagénaire se rend régulièrement à New-York pour y exposer ses toiles. Il se souvient de ce 11 septembre 2001. " J’étais sur la route en direction de Saint-André. Je travaillais sur un catalogue d’art en vue d’une exposition à New York. Puis là, j’entends ce qui s’est passé à la radio. Je n’y crois pas, je suis choqué. Je ne comprends pas pourquoi et au nom de qui on a pu tuer des milliers d’innocents. "

Pour l’artiste, il y a un avant et un après 11 septembre. " Pour moi, ce jour-là, le terrorisme est devenu réel. J’étais allé au World Trade Center un an avant. J’étais bouleversé.  Après ces attentats, j’ai arrêté de me rendre à Brooklyn, à Harlem. Je reste sur Manhattan, ça me rassure. Il y a une peur, une méfiance, on se dit que ça pourrait recommencer.

Ces événements ont aussi influencé sa manière de travailler " ça m’inspire d’essayer de trouver les raisons de cette barbarie. Aujourd’hui, je peins beaucoup de choses en lien avec Dieu, la mort, la fragilité de la vie car je sais que tout peut basculer en un instant"

Richars Riani a participé à une exposition collective à New York en hommage aux victimes et aux héros de ce drame en 2011, pour commémorer les dix ans de l’événement " c’était important pour moi de le faire. D’exprimer à travers mon art ce que je ressentais et de montrer aux américains que je compatissais".

Depuis ces attentats, Richard Riani admet être toujours en état d’alerte quand il voyage mais pas quand il revient sur l’île " À La Réunion, je suis en paix. On est loin de tout ça, on n’a pas de terroriste ".

Frédéric Vienne, le président de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d'exploitations agricoles) se souvient aussi très bien de ce jour-là. " Je sortais travailler et j’ai croisé un collègue, il m‘a dit de remonter chez moi et d’allumer la télé. Au début, je me suis dit ‘c’est loin tout ça’ puis au fur et à mesure, j’ai compris l’ampleur de ce que c’était. Le côté organisé de ces attentats voulait dire que plus personne n’était à l’abri.

À l'instar de Richard Riani, l’appréhension, c’est surtout quand il voyage qu’il la ressent. " Dans les aéroports, les contrôles, les portiques de sécurité. Ce n’était pas aussi drastique avant. Tout cela nous ramène à une réalité, nous ne sommes plus en sécurité. Ils ont détourné 4 avions ce 11 septembre. Et puis, les attaques se sont diversifiées, en plus des bombes, il y des attaques au couteau, à la voitures bélier, ça ne laisse pas indifférent. Aujourd’hui, je me rends compte qu’un bruit inhabituel, un bruit sourd, une porte qui claque peut me faire sursauter quand je suis en ville, à Paris par exemple. Avant, je n’étais pas sensible à tout cela".

Le président de la FDSEA rappelle aussi que ces attentats ont déstabilisé les pays du Moyen et du Proche Orient. "c’est aussi ce qui a ouvert la porte au djihadisme tel qu’on le connaît actuellement. Ce qui s’est passé en Irak, en Libye après, a bouleversé la carte géopolitique."

Concernant La Réunion, "je pense que La Réunion, est relativement épargnée. Il y a eu quelques cas isolés de radicalisés mais ils ont été rapidement maîtrisés. Je n’ai aucune inquiétude à ce sujet ".

Ce 11 septembre 2001, Gilles Clain, secrétaire départemental de l'Unité SGP Police - FO Réunion découvre le terrorisme "j’ai 21 ans, je rentre de la plage avec des amis, on est accueilli par mes parents et ils nous disent ‘c’est la guerre dans le monde. Les États-Unis ont été attaqués’. On est resté scotchés devant la télé. Le choc, des images de guerre de ce type, je n’en avais vu qu’une fois à la télé, dix ans plus tôt chez mes grands-parents pendant la guerre du Golfe. On n’y croyait pas et on avait beaucoup d’interrogations. Je me demandais qui avait fait ça, pourquoi ? Pour nous, la guerre ce n’était pas dans un pays occidental, dans un pays aussi proche de nous culturellement. Pour moi, c’est vraiment la découverte de ce que l’on appelle le terrorisme, malheureusement, le livre a été ouvert et ne s’est jamais refermé".

Mais à 21 ans, Gilles Clain n’a pas changé son mode de vie "j’ai gardé mon insouciance, à La Réunion, on était épargné. Le terrorisme, c’était totalement nouveau, c’était loin, c’étaient les États-Unis. Le jour même, on est tous restés scotchés devant nos écran mais le lendemain, la vie a repris son cours".

Ça, c’était il y a dix-sept ans. Car aujourd’hui, de par son métier, sa maturité et les événements récents, Gilles Clain a conscience que La Réunion n’est pas épargnée. " On doit faire attention, la voix de Daesh (ndlr Fabien Clain) est un Réunionnais, il y a eu la filière de recrutement de l’Égyptien et ce jeune radicalisé qui a tiré avec un fusil à pompe sur deux hommes du GIPN à Saint-Benoît. La France est menacée, La Réunion l’est aussi, malheureusement. Chaque citoyen doit faire attention ".

Jacky Balmine, le secrétaire général de la CGTR-BTP partage cet avis " il y a tellement de choses qui se passent aujourd’hui, il n’y a plus d’endroit tranquille. Il ne faut pas se voiler la face. Même si on est sur une île où il y a un réel vivre ensemble, il faut le préserver et espérer qu’il soit plus fort que le terrorisme".

Quand il repense au 11-Septembre, ce qui lui revient c’est "le choc, un choc qui vous coupe la respiration. C’était inimaginable. Je n’étais pas terrorisé, l’être, ça leur aurait donné raison. Mais j’étais vraiment choqué et en colère. Il n’y a rien qui justifie cela. Autant de morts, des innocents… Dans la plus grande puissance mondiale. Un drame.  Ça marque l’esprit. J’avais entendu parler du terrorisme mais pas comme ça. J’ai pris conscience que ça pouvait arriver en Occident, en Europe".

Jacky Balmine sait qu’il y a eu plusieurs signalements de personnes radicalisées à La Réunion "bien sûr, j’en ai conscience, mais je ne m’arrêterai pas de vivre ".

Sociologiquement parlant

Sandra Hoibian est directrice du pôle Evaluation et société du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Credoc) Elle est spécialiste du regard porté sur la cohésion sociale, la diversité, le lien social, la société collaborative et participative, les valeurs, la protection sociale et le modèle républicain, et l'impact des attentats.

"Selon une étude initiée par le CNRS, en France, les attentats du 11 septembre figurent parmi les actes les plus marquants depuis l’an 2OOO notamment pour les 25-39 ans. Plusieurs éléments expliquent cela, la proximité géographique et culturelle. Les français prennent conscience que le monde occidental peut être touché par le terrorisme et cela se passe aux États-Unis, un pays qui a influencé notre culture grâce au soft power. Sur 40 ans, 2001 est l’année où le sentiment d’insécurité est le plus fort chez les français. Les attentats du 11 septembre y sont pour beaucoup mais il y aussi mais la campagne pour la présidentielle de 2002, les préoccupations sécuritaires sont particulièrement mises en avant.

Les médias ont aussi joué un rôle, les chaînes en continu venaient de faire leur apparition en France. Ce sont des images fortes qui sont passées en boucle sur les téléviseurs. On suivait ce qui se passait sur place presque simultanément. Dix-sept ans après, ces images sont ancrées dans la mémoire collective. L'ère post-11 septembre ets aussi très marquante, la réaction de la classe politique américaine et internationale est directe. Les Etats-Unis et leurs alliés envahissent l’Afghanistan et l’Irak. La politique extérieure est totalement bousculée.

L’idée ‘d’ennemi intérieur’ fait son chemin. Depuis une dizaine d’années, on peut remarquer que la communauté musulmane est perçue de plus en plus négativement." 

La radicalisation à La Réunion 

En 2017, notre département est le DOM qui compte le plus de signalements pour radicalisation. 142 cas. De nombreuses perquisitions administratives en lien avec le djihadisme ont lieu.  Plusieurs réunionnais sont impliqués de près ou de loin dans avec Daesh.

Fabien Clain " la voix de Daesh ". C’est sa voix que l’on entend sur le message de revendication des attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Son nom est aussi apparu dans le dossier sur la mort de deux policiers dans les Yvelines en 2015. L’homme était aussi un ami de Mohamed Merah, l’auteur des tueries de Toulouse et de Montauban en 2012. Fabien Clain se trouverait aujourd’hui encore en Syrie, au sein de l’organisation de l’État islamique.

La voix du jihadiste d'origine réunionnaise, Fabien Clain, identifiée dans la vidéo de revendication de l'EI

Nail Varatchia " l’Égyptien " ; Le prédicateur salafiste a été condamné en juin dernier à sept ans de prison par le tribunal correctionnel de Paris pour "apologie du terrorisme" et "association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste ".  Il avait mis en place une filière locale de recrutement de combattants pour les rangs de Daesh en Syrie et en Irak.

Filière jihadiste - Arrêté en 2015 à La Réunion, "l'Égyptien" est jugé à Paris

Jérôme Lebeau : radicalisé depuis trois ans. Il avait ouvert le feu à deux reprises sur les forces de l’ordre venus le cueillir chez lui, à Saint-Benoît. L’homme est aussi suspecté d’avoir fomenter un projet d’attenta. Lui et sa ma mère ont été mis en examen et écroués.

L'enquête a été saisie par la section anti-terroriste du parquet, le radicalisé présumé de Saint-Benoît et sa mère transférés à Paris

fh/www.ipreunion.com

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1 Commentaires
@amadou
@amadou
5 ans

Vous êtes les meilleurs