Protection des usagers de la mer et respect de l'environnement

Une barrière magnétique pour repousser les requins testée à La Réunion

  • Publié le 8 février 2020 à 15:00
  • Actualisé le 8 février 2020 à 18:37

C'est un dispositif en place à La Réunion depuis janvier 2019 : la "SharkSafe Barrier" (SSB), sur laquelle le Centre sécurité requin mène actuellement une série de tests. Composée d'aimants, la technologie de la barrière fonctionne par ondes électromagnétiques pour repousser les squales sans les blesser. Le dispositif a fait ses preuves en Afrique du Sud contre les requins blancs, mais aussi contre les requins bouledogue aux Bahamas. C'est une chercheuse en biologie marine qui est à l'origine de la conception de cette barrière. Si cette technologie fait ses preuves à La Réunion, cela pourrait être une révolution face au risque requin. La scientifique explique tout dans une interview accordée à Imaz Press Réunion (Photos rb/www.ipreunion.com)

Protéger les baigneurs et protéger les requins. C'est le double effet recherché dans le projet de la Sharksafe Barrier ("shark" signifie "requin", et "safe" signifie "en sécurité"), une barrière à la fois physique et magnétique qui vise à isoler les squales des usagers de la mer. La chercheuse en biologie marine à l'origine du projet est la docteure Sara Andreotti, elle travaille essentiellement en Afrique du Sud.

La barrière est ainsi composée de quatre rangées de tuyaux noirs, espacés d’un mètre. Des aimants sont inclus dans la partie extérieure de la barrière, ce qui forme un champ magnétique visant à repousser les squales.

Des tests réussis à 100 %

L'aventure a commencé en Afrique du Sud, courant 2011. Une fois le matériel constitué, il a fallu le plonger dans la mer et tester à la fois son efficacité face aux squales et sa résistance dans l'eau. C'est d'abord sur les requins blancs que les équipes ont commencé leurs tests. De mai 2015 à août 2016 les expérimentations se sont renforcées.

Des appâts, thon ou sardine, ont été disposés dans les rangées internes de la Sharksafe Barrier, afin d'attirer les squales et observer leur réaction. En Afrique du Sud, 34 essais ont été enregistrés pour un total de 255 heures d'enregistrement, offrant un bon échantillon afin d'étudier l'attitude des requins blancs face à la barrière. C'est ensuite aux Bahamas que les équipes se sont rendues pour tester la barrière sur les requins bouledogue, l'espèce que nous retrouvons à La Réunion. La même technique fut utilisée.

Résultat, Sara Andreotti et ses collègues ont très vite observé l'efficacité du champ magnétique. "Tous les tests sont réussis. 84 requins blancs et 41 requins bouledogue ont été observés, aucun d'entre eux n'a passé la barrière" indique la chercheuse.

Magnétisme contre squales

Cela s'explique assez simplement, via ce que l'on appelle les "ampoules de Lorenzini", des organes sensoriels très spéciaux. "Ils ont une sensibilité très développée au niveau du nez, les ondes électromagnétiques les gênent énormément" indique Sara Andreotti.

L'utilisation d'ondes magnétiques pour faire fuir les requins n'est pas nouvelle. On la retrouve dans le "shark shield" (bouclier anti requin en français). Un système de câble faisant office d'antenne et installé sur les planches des surfeurs notamment. Celui-ci génère un champ magnétique sur 8 mètres de diamètre environ. Un dispositif qui n'est pas létal pour les requins, mais qui provoque des spasmes musculaires chez eux. Cela dit, ce mécanisme n'est pas suffisant et reste un investissement personnel pour les usagers de la mer.

"Eco-friendly"

Le respect de la biodiversité marine est au coeur du projet. Les éléments constituant la barrière, de couleur noire, visent à imiter une forêt d'algues pour s'inclure dans le paysage.

Seul le requin est gêné par les ondes électromagnétiques. "Les autres animaux marins peuvent traverser la barrière. C'est une technologie bien plus respectueuse de l'environnement, qui n'exclut que les squales des zones choisies. Les tuyaux aimantés ne blessent et ne tuent aucun animal" nous explique Sara Andreotti. Pour la chercheuse, le bénéfice est double : "les baigneurs seront protégés et la vie marine ne sera pas endommagée".

En tant que docteure en biologie marine et passionnée de requins, la chercheuse ne peut pas nier qu'elle est réticente face aux techniques visant à tuer les requins pour protéger les plages. "Mais je suis consciente que la crise requin est un sujet extrêmement sensible à La Réunion. Certains ont perdu des proches, attaqués par des requins, de nombreuses personnes ont souffert. En 8 ans, La Réunion a connu 24 attaques dont 11 mortelles... "Mais avec cette technique nous pourrions à la fois préserver les humains et les animaux."

Lire aussi : Crise requins : 11 personnes tuées en 8 ans

Le Centre sécurité requin au coeur du projet

Depuis début 2019, le Centre sécurité requin (à l'époque encore appelé CRA, Centre de Ressources et d'Appui pour la réduction du risque requin) a accepté de tenter l'expérience à La Réunion. Deux zones sont concernées par ces tests, l'une à Saint-Paul, l'autre à l'Etang-Salé. Les expérimentations devraient durer environ 2 ans, soit jusqu'en 2021.

Lire aussi : Des ondes électromagnétiques pour repousser les requins

A Saint-Paul, l'objectif est surtout de tester la capacité "d'exclusion" de la SharkSafe barrier, comme l'explique le Centre sécurité requin (CSR), pour "confirmer les effets de répulsion du système sur les requins bouledogue et tigre dans les conditions locales".

Le dispositif consiste en un enclos fermé de 10 mètres sur 10 "composé de 3 rideaux successif". Tout comme les prototypes de Sara Andreotti, une première rangée est constituée de tubes aimantés et deux autres rangées non aimantées. "Les tubes sont implantés dans 6 m de profondeur" complète le CSR.

A l'Etang-Salé, c'est la robustesse de cette barrière qui est mise à l'épreuve, pour vérifier que la SharkSafe barrier résiste aux houles australes et cycloniques de La Réunion.

Une barrière magnétique bientôt à La Réunion ?

Après des mois de tests à La Réunion, aucune maintenance n'a été nécessaire sur les 200 unités composant les barrières, assure Sara Andreotti.

Une question cependant et pas des moindres, le coût du projet. "Le coût total va dépendre de la largeur de l'installation. Cela coûtera forcément plus cher que les filets actuels mais la SharkSafe barrier peut être installée plus en profondeur" nous explique la chercheuse.

Le financement du projet, s'il est retenu, devrait revenir aux communes, selon le CSR. Pour la partie allant au moins de Boucan Canot jusqu'aux Roches noires, il faudrait compter plusieurs centaines de milliers d'euros.

Un point est prévu ce lundi 10 février entre les équipes venues d'Afrique du Sud, Sara Andreotti comprise bien sûr, et les équipes du Centre sécurité requin pour échanger sur les tests menés à Saint-Paul et L'Etang-Salé. Ils discuteront donc de la possibilité ou non d'installer ce dispositif à La Réunion de façon durable.

mm / www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

guest
4 Commentaires
sss
sss
4 ans

Oui repousser les requins, c'est facile il faut les pêcher, comme on a toujours fait pendant 3 siècles et comme font toutes les îles près de chez nous. Le requins c'est un poisson, c'est tout. Tout comme le thon, la sardine, le marsoin. Ne pas les pêcher est criminel. Bien que cela engraisse bien diverses associations bien makotes, les politiciens corrompus qui prennent ces décisions ont beaucoup de sang sur les mains à ce jour. Et ce n'est pas bon non plus pour la "biodiversité": trop de gros requins carnivores. Les petits requins plus rares et protégés sont en voie de disparition, on ne voit plus de baleines. Fmillions pour comprendre ce que le sens commun peut déduire sans un sou, avec un peu de logique et d'observation? Quand on voit où vont les sous de nos impôts!!!

Patou
Patou
4 ans

Dangereux pour les porteurs de défibrillateurs.....

Radigue Didier, depuis son mobile
Radigue Didier, depuis son mobile
4 ans

ça existe. ça s'appelle "élections"

Et pour les élus incompétents et affairistes
Et pour les élus incompétents et affairistes
4 ans

Si il pouvait exister la même chose pour les élus incompétents, voyageurs (avec nos impÃ'ts) et affairistes ?