Des consignes par milliers

Education nationale : un protocole pour la reprise de l'école... long de 58 pages

  • Publié le 2 mai 2020 à 15:17
  • Actualisé le 2 mai 2020 à 15:29

Un document du ministère de l'Éducation nationale et de la jeunesse, que s'est procuré Imaz Press, fait état du protocole sanitaire à mettre en place dans les établissements scolaires lors du déconfinement. Long de 58 pages, il détaille l'accueil des élèves, l'aménagement des classes, la récréation, la gestion de la cantine... Tout y est listé pour tenter de guider les différents rectorats en prévision de l'après 11-mai, où la reprise des classes devrait se faire progressivement, par niveaux. Si le nombre de règles est impressionnant, leur application pose question. Ce sera, en grande partie, aux établissements scolaires de s'organiser. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

C'est un document qui donne les grands axes de la reprise des classes après la sortie du confinement. Se voulant guide face aux incertitudes que provoque la mention du terme "déconfinement", le ministère de l'Education nationale instaure de nombreuses règles à suivre pour limiter tout risque de propagation du virus.

58 pages de texte, de recommandations, d'appels aux établissements scolaires à s'organiser, aux enseignants à anticiper, aux parents à se responsabiliser. Suite au résumé de ces nouvelles réglementations on trouve des "fiches thématiques" qui détaillent au geste près la conduite à tenir pour chaque situation et dans chaque recoin des écoles. Un document dédié aux établissements "secondaires" soit les collèges et les lycées, bien que de nombreuses consignes s'appliquent également pour les plus petits. Mais il y a fort à parier que le protocole équivalent pour les plus jeunes existe également...

Un document qui finalement, angoisse peut-être davantage qu'il n'informe. Les professeurs avec qui nous nous sommes brièvement entretenus ne cachent pas leur détresse voire leur colère face à une telle charte parfois impossible à mettre en place.

- Des règles physiques strictes -

Si le retour en classe dépend déjà du choix des parents, leur responsabilité est de taille avant d'aller à l'école : en cas de moindre doute ou de trace de symptôme, l'enfant doit rester à la maison. "Les parents sont notamment invités à prendre la température de leur enfant avant le départ pour l’école. En cas de symptômes ou de fièvre (37,8°C), l’enfant ne devra pas se rendre à l’école" peut-on lire. "Les personnels devront procéder de la même manière."

Une fois sur place, les enfants devront appliquer la règle de distanciation physique : un mètre entre chacun pour éviter les contacts directs. Une règle à appliquer dans tous les recoins de l'établissement scolaire : cantine, salles de classe, sanitaires, cour de récréation…

Mission impossible selon certains parents et professeurs qui pointent du doigt le caractère parfois intrépide et imprévisible d'un enfant, mais selon le ministère, "les différents avis scientifiques insistent sur la nécessité de la faire respecter, tout en étant conscient de la difficulté que cela peut représenter notamment en classe de maternelle". Il faudra également veiller à ce que lavage des mains soit le plus régulier possible.

- Port du masque plus ou moins obligatoire -

Concernant le port du masque, il est fortement recommandé et "le ministère de l’Education nationale mettra donc à disposition de ses agents en contact direct avec les élèves au sein des écoles 2 masques par jour" précise le document.

Pour le Conseil scientifique, le port du masque est obligatoire pour les collégiens et lycéens, et "pour les élèves en école élémentaire, le port du masque n’est pas obligatoire mais les enfants peuvent en être équipés s’ils le souhaitent et s’ils sont en mesure de le porter dans des conditions satisfaisantes". Quant aux élèves en école maternelle, "le port du masque est difficile et même déconseillé" sauf pour les enfants à la santé fragile.

Le document précise bien qu'il "appartiendra aux parents de fournir des masques à leurs enfants lorsque les masques seront accessibles aisément à l’ensemble de la population". Dans l'attente, le ministère de l’Education nationale s'en chargera. Mais cet approvisionnement venu de l'Etat n'est pas appelé à durer, faut-il croire…

- Pas de "brassage des élèves" -

Le document du ministère veut établir une "stratégie" visant à "réduire le brassage des élèves". Difficile dans une école, pourtant le gouvernement y croit. Ainsi il revient aux établissements scolaires de "définir, avant leur réouverture et en fonction de la taille de l’établissement, l’organisation de la journée et des activités scolaires de manière à intégrer cette contrainte".

Il faudra donc s'assurer que les différentes classes se croisent le moins possible entre niveaux et entre étages/bâtiments. L'arrivée et la fin des cours devra donc être adaptée elle aussi pour éviter que tous les élèves soient massés devant l'école en même temps. Et donc le ministère le précise : "ce fonctionnement suppose que les transports scolaires puissent éventuellement s'adapter".

Les déplacements des élèves hors classe doivent être "limités au strict nécessaire, organisés et encadrés". On conseille d'ailleurs – ce qui concerne davantage les collèges et les lycées – d'attribuer une salle à chaque professeur pour éviter trop de mouvement.

- Des récréations "par groupes de classes" -

La grande question des parents comme des professeurs c'est : et que fait-on pendant la récréation ? Difficile de contrôler les gestes barrières et d'éviter un "brassage d'élèves".

Ainsi, le ministère a pensé à tout : "les récréations devront être organisées par groupes de classes en tenant compte des recommandations en termes de distanciation et de gestes barrières".

Si c'est trop difficile – et on doute fortement que ce sera le cas – ces récréations "pourraient être remplacées par des temps de pauses en classe à la fin du cours". Adieu le grand air, donc.

- Nettoyage ultra-renforcé -

Les classes devront également être suffisamment ventilées. "L’aération est un geste qui doit maintenant être systématique et durer au moins 10 minutes à chaque fois" précise le document. "Les salles de classe et autres locaux occupés pendant la journée doivent être aérés le matin avant l’arrivée des élèves, pendant chaque récréation, au moment du déjeuner et le soir pendant le nettoyage des locaux."

Par ailleurs, tout jeu ou ustensile "ballons, jouets, crayons etc." devra être accompagné "de modalités de désinfection après chaque utilisation".

Mais qui va s'occuper de ces nettoyages et désinfections constantes allant du simple crayon aux pupitres et en passant par la salle de classe elle-même ? "Il convient à chaque école et établissement scolaire, avec l’appui de leur collectivité territoriale de rattachement, de l’organiser" indique le ministère. Une fois de plus, aux écoles d'improviser.

Le ministère conseille en tout cas un nettoyage approfondi, à l'aide de désinfectants ménagers. "Les pièces qui ont été utilisées doivent faire l’objet d’un bionettoyage avant la rentrée des personnels et des élèves."

- Une communication maîtrisée, s'il vous plaît -

Ce n'est pas tout. S'il faut surveiller les élèves, nettoyer, désinfecter, ranger, organiser, planifier et… aussi enseigner, il faut communiquer.

"La direction des écoles et des établissements scolaires, avec l’appui des services académiques, doit avoir un plan de communication détaillée à destination des cibles ci-après. Il est nécessaire de sensibiliser et impliquer les élèves, leurs parents et les membres du personnel à la responsabilité de chacun dans la limitation de propagation du virus" peut-on lire dans le document.

Ainsi les parents "devront être informés clairement". Si la chose paraît évidente, elle passe cependant par bon nombre de documents, fiches à placarder probablement dans l'établissement et e-mails par milliers à envoyer aux familles.

Car il faudra alors détailler les "conditions d’ouverture de l’établissement", "leur rôle actif dans le respect des gestes barrières", "la surveillance de l’apparition de symptômes", "la procédure applicable lors de la survenue d’un cas", "les points d’accueil et de sortie des élèves", "les horaires à respecter pour éviter les rassemblements au temps d’accueil et de sortie", "l’organisation de la demi-pension"… etc etc.

- Et les profs dans tout ça ? -

On y arrive… à la fin seulement du document du ministère. Les enseignants, personnels de direction et tous les autres personnels "doivent être formés aux gestes barrières, aux règles de distanciation physique et au port du masque pour eux-mêmes et pour les élèves dont ils ont la charge le cas échéant".

Une formation qui devra s'appuyer sur les nombreuses fiches thématiques fournies en annexe du document. Elle doit par ailleurs être "commencée avant la réouverture des écoles". Pour une réouverture à partir du 18 mai à La Réunion, il s'agira donc de former les professeurs avant.

Les élèves, eux, abordés en dernier, devront bien entendu être renseignés sur tout ceci et en priorité sur les gestes barrières. "Cette éducation devra être adaptée à l’âge des élèves (création graphique, vidéo explicative, chanson,...). Cette sensibilisation doit être répétée autant que nécessaire" précise le ministère, qui annonce fournir prochainement des "kits de communication adaptés".

A noter également que les élèves devront "bénéficier de séances d’éducation à la santé concernant les différentes sortes de microbes, leur transmission, les moyens de prévention efficaces". Un site internet est conseillé, nommé "e-Bug !", et "validé par le ministère" pour s'appuyer sur des ressources en ligne. Un nouveau travail pour les enseignants qui devront donc intégrer ces cours dans leur programme existant.

Rappelons que la réouverture des établissements scolaires pourrait dépendre des départements, en fonction de leur couleur. Depuis ce jeudi 30 avril, le ministère de la Santé attribue un code couleur (vert, orange, rouge en fonction de la circulation virale) pour définir la situation sanitaire de chaque territoire. La décision finale de cette répartition sera prise le 7 mai, où seules deux couleurs seront conservées : vert et rouge.

La Réunion, en vert quel que soit le critère, devrait en toute logique le rester. Certains niveaux pourraient alors reprendre le chemin de l'école plus vite que dans d'autres départements, comme les collégiens.

mm / www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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4 Commentaires
Ti Léon 4
Ti Léon 4
3 ans

Qui êtes-vous Mme Prof ?
La secrétaire de M. le recteur ?
La chargée de communication du ministère ?
Pour ma part, je n'ai pas plus d'appréhension que d'habitude. Selon l'Ars le virus ne circule peu ou pas.(Faut-il la croire? C'est un autre débat )
Par contre exercer mon métier d'enseignant ne sera pas conciliable avec le respect du protocole rédigé par les services du Ministère dont les agents n'ont pas vu ni un élève ni une école depuis bien longtemps.

Jack974
Jack974
3 ans

58 pages de consignes. Vous comprenez pourquoi la France n'a remporté aucune guerre. On renforce le nettoyage des locaux, sanitaires et autres mesures mais le nombre d'agents dans les Établissements sont en diminution. Tous des rigolos.

Prof2
Prof2
3 ans

Rien de secret dans ce protocole qui devrait rassurer les parents, voici le lien vers de document original
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Documents/docsjoints/protocole300420.pdf

Prof
Prof
3 ans

Quel deontologisme journalistique ... je suis prof et je ne suis ni angoissée, ni en colère par ledit document. Certains collègues veulent le retour à l'école, d'autres non (bien souvent motivée par une peur primaire pour leurs enfants) Pouvez faire preuve de mesure et de nuance dans vos propos ? Vous n'écrivez pas un pamphlet, vous êtes un média d'information. À moins que cet article fait pour aller dans le sens de l'hystérie générale vous classe juste dans la catégorie putaclic car vous â?oedevez vivre?.
En Suède, les élèves vont en classe et les écoles tournent avec ces mesures inapplicables ... Mais bon, je me suis peut-être fourvoyée. Il se peut que cette page soit juste un blog. Nulle raison d'y rester abonné donc.
(Quelle colère ! Si vous êtes de fait abonné.e à notre site - bien que tous nos articles soient gratuits et en accès libre donc nul besoin d'abonnement mais passons - vous saurez alors que certains de nos articles sont volontairement éditorialisés. C'est donc le cas de celui-ci. Quant à votre avis personnel, nous entendons que certain.e.s profs approuvent le retour à l'école, mais ce n'est pas le cas de tout le monde et nous avons mis en évidence dans cet article celles et ceux qui s'en offusquaient. Merci de nous lire malgré tout - WEBMASTER)