Bulletin de l'observatoire volcanologique

Le Piton de la Fournaise a tremblé 1463 fois au mois d'août

  • Publié le 2 septembre 2019 à 10:44
  • Actualisé le 2 septembre 2019 à 17:49

L'observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPF) a publié ce lundi 2 septembre 2019 le bulletin mensuel de l'activité du volcan. Au mois d'août, il a tremblé 1463 fois, et est entré en éruption du 11 au 15. Le bulletin complet est à retrouver ci-dessous (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Activité du Piton de la Fournaise

Sismicité

Au mois d’août 2019, l’OVPF a enregistré au niveau du massif du Piton de la Fournaise au total :

• 1455 séismes volcano-tectoniques superficiels (0 à 2 km de profondeur) sous les cratères sommitaux
• 8 séismes profonds (> à 2 km de profondeur)
• 341 effondrements (dans le Cratère Dolomieu et au niveau des remparts de l’Enclos Fouqué)

L’activité volcano-tectonique sous le sommet du Piton de la Fournaise en août 2019 aura été principalement marquée par la crise sismique ayant précédé l’éruption du 11-15 août (avec 1289 séismes enregistrés lors de la journée du 11 août).

Lors de cette crise sismique les séismes étaient localisés sous la bordure sud-est du sommet et sous le flanc sud sud-est du volcan (à l’intérieur de l’Enclos Fouqué) au niveau du secteur intrudé par le magma en profondeur et au niveau de la zone où les fissures éruptives se sont ouvertes après environ 9h20 de crise.

Les 10 jours précédant l’éruption, du 1er au 10 août, une augmentation progressive de la sismicité a été enregistrée, passant de 2 séismes volcano-tectoniques superficiels le 2 août à 33 le 9 août.

Déformation

Comme ce fut le cas après l’éruption du 11-13 juin 2019, l’inflation (gonflement) de l’édifice a repris directement suite à la fin de l’éruption du 29-30 juillet 2019. Ainsi entre le 30  juillet et le 10 août une élongation d’environ 2cm max. de la base du cône terminal a été enregistrée.

Cette phase d’inflation est liée à une mise en pression du réservoir magmatique superficiel localisé à 1,5-2km de profondeur sous le sommet, et précéda l’éruption du 11-15 août. L’injection du dike conduisant à l’éruption fut accompagnée de déformations rapides, décimétriques. Suite à la fin de l’éruption du 11-15 août, l’inflation (gonflement) de l’édifice a repris aussitôt.

Géochimie des gaz

Concentration en CO2 dans le sol

En champ lointain (secteurs Plaine des Cafres et Plaine des Palmistes): une nouvelle augmentation des concentrations en CO2dans le sol est enregistrée depuis début avril 2019, atteignant des niveaux intermédiaires, et ayant précédé les trois dernières éruptions de juin, juillet et août 2019. Depuis l’éruption du 11-13 juin, les flux de CO2 ont commencé à baisser.


Phénoménologie

Le mois d’août 2019 aura été marqué par une éruption, du 11 au 15 août, localisée sur le flanc sud sud-est de l’édifice (à l’intérieur de l’Enclos Fouqué), et caractérisée par l’ouverture d’un complexe de deux fissures éruptives à 1700 m et d’une fissure éruptive à 1500m d’altitude.

Bilan

L’inflation continue de l’édifice enregistrée suite à la fin de l’éruption du 29-30juillet2019, les flux de CO2dans le sol ainsi que l’augmentation progressive de la sismicité entre le 30 juillet et le 10 août furent le témoin d’une réalimentation profonde en magma et d’une pressurisation du réservoir magmatique superficiel. Cette pressurisation a conduit à l’éruption du 11-15 août 2019, qui n’a vidangé, une fois encore, que très partiellement ce réservoir(environ 3 Millions de m3).

L’éruption du 11-15 août 2019

Les signaux précurseurs

A long terme :

L’éruption du 11-15août 2019 a été précédée par une dizaine de jours d’inflation (gonflement) de l’édifice (i.e. depuis la fin de l’éruption du 29-30 juillet 2019) témoignant de la mise sous pression du réservoir magmatique superficiel (localisé aux alentours de 1,5-2 km sous la surface). Au cours de cette période la sismicité à augmenter progressivement jusqu’à atteindre 33 séismes volcano-tectoniques superficiels le 9 août.

Sur le plus long terme, les éruptions du Piton de la Fournaise ont lieu après de longues phases de recharge profonde du système magmatique. Cette éruption s’inscrit dans une phase de réalimentation magmatique profonde qui se poursuit de manière discontinue depuis la reprise d’activité de juin 2014.

Les cycles d’augmentation et de diminution du flux de CO2dans le sol le long du flanc du volcan sont attribués à de nouveaux apports de fluides magmatiques alimentant la partie la plus profonde du système (phase d’augmentation) et à leurs transferts consécutifs vers des niveaux plus superficiels (phase de diminution).

A ce titre, une nouvelle augmentation significative des flux de CO2 a été enregistrée en avril 2019, marquant le début d'un nouveau cycle.

A court terme :

Le 11 août 2019, à 07h00 heure locale, une crise sismique, témoin de la rupture du toit du réservoir magmatique superficiel (sous la pression à l’intérieur) et de la propagation finale du magma vers la surface, est enregistrée.

Au total, ce sont 1289 séismes volcano-tectoniques superficiels (< 2 km de profondeur) qui ont été enregistrés le 11 août. Cette crise fut accompagnée par des déformations rapides du sol. A noter que le champ de déformation associé à l’éruption du 11-15 août 2019 ne s’est pas étendu à l’extérieur de l’Enclos Fouqué. Ceci montre que le dike (" conduit d’alimentation ") ayant alimenté l’éruption ne s’est pas propagé au-delà de cette structure.
L’éruption

Le trémor, synonyme d’arrivée du magma proche de la surface, est apparu vers 12h20 heure TU le 11 août. L’activité éruptive fut caractérisée par l’ouverture de fissures sur le flanc sud sud-est du volcan (à l’intérieur de l’Enclos Fouqué), à 1700 m (complexe de deux fissures) et 1500m (une fissure) d’altitude, les deux fissures les plus éloignées étaient distantes de 1400 m environ. Du fait des mauvaises conditions météorologiques, une reconnaissance aérienne n’a pu être faite que le 13 août au matin. A cette date seule la fissure la plus en aval et la plus basse en altitude restait active.

Du fait des pentes importantes dans le secteur (pente maximale de 53% et pente moyenne de 30%), les coulées ont atteint rapidement le bas des "Grandes Pentes", mais une fois arrivée sur la zone de replat au niveau du secteur du "Piton Tremblet" les coulées n’ont guère progressé du fait des faibles débits. Le front de coulée le plus bas est ainsi resté figé à environ 560m d’altitude, soit environ 2km de la RN2, même si de nombreux bras de coulées continuaient à se développer plus en amont

Les débits de surface estimés, à partir des données satellites via les plateformes HOTVOLC (OPGC -université d'Auvergne) et MIROVA (université de Turin), étaient compris entre 0,3 et 9 m3/sec.

Ces valeurs de débit correspondent à des débits minimums en effet les mauvaises conditions météorologiques sur le volcan lors de l’éruption ont atténué les signaux satellites. En raison de la localisation du site éruptif à basse altitude, un risque non négligeable que les coulées de lave atteignent la route était présent.

Les trajets de coulées de lave ont été modélisés en utilisant le modèle DOWNFLOWGO, et ont été communiqué à l'Etat-Major de Zone et de Protection Civile de l'Océan Indien lors de la gestion de crise. Compte tenu du débit d'épanchement maximal de 9 m3/s mesuré pendant l’éruption, cette simulation estimait que la coulée devait s’arrêter à environ 1,5 km de la route.

L’éruption s’est arrêtée le 15 août 2019 vers 22h00 heure locale après 4h10 de pause dans l’activité de surface entre 4h20 et 8h30 heure locale, et après un peu plus de 6 heures d’activité de "gaz piston" ou "bouffées de trémor". Environ 3 Millions de m3 de coulées de lave ont été émis lors de cette éruption. Les coulées associées aux sites éruptifs à 1700 m et 1500 m d’altitude ont parcouru respectivement 2,9 et 2,7 km, et la plus basse s’est arrêtée à environ 2 km de la route nationale 2.

Activité sismique locale et régionale

Sismicité locale et régionale

Au mois d’août 2019, l’OVPF a enregistré au niveau local et régional :

• 30 séismes locaux (dans un rayon de 200 km de l’île, majoritairement sous l’île, côté massif du Piton des Neiges)
• 3 séismes régionaux (dans la zone océan indien).

 

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