Peut mieux faire...

Quand le Recteur donne des leçons de pédagogie civique aux enseignants

  • Publié le 30 novembre 2018 à 02:58
  • Actualisé le 30 novembre 2018 à 12:20

Quelques écoles ont ouvert à nouveau leurs grilles sur le territoire à l'invitation du Recteur. Les enseignants, pour certains du moins, ont repris le chemin de leurs classes. Non sans un cours de rattrapage signé par l'Inspection Académique de La Réunion concernant la manière d'aborder dans le premier degré les mouvements sociaux qui ont forcément impacté les élèves. Si ce "devoir" de l'Inspection Académique était noté, pas sûr qu'il aurait eu la moyenne...

Le Rectorat ambitionne-t-il de déménager à Champ Fleuri ? Le document envoyé aux enseignants, après avoir listé une liste d'attitudes qui tombent sous le sens, genre "ne pas s'engager dans un dialogue improductif", prend un tournant clairement redresseur de torts. C'est un rappel à la Règle et à la Loi.

Ainsi les enseignants sont-ils encouragés à "prendre appui" sur la nécessaire "réparation envers celui ou ceux qui ont été́ victimes de la transgression", sur l'indispensable "ré-instauration de la loi". Mais, pire encore, l'académie demande aux enfants de devenir juges : "envisager avec les élèves des sanctions possibles". Ca ne dérape pas un peu, là ?

Un interrogatoire un peu manipulateur

Une fois ces "points d'appui" posés, l'inspection académique brieffe ses enseignants sur le déroulé pédagogique. Pour un peu, on éditerait un avenant au BO (ndlr, bulletin officiel), comme on dit dans la profession. Il est donc conseillé aux enseignants de faire un petit cours "connaissance de l'actualité" autour de questions dignes de la série des Incollables.

- Qui sont les Gilets jaunes ? Que font-ils ? Mais là, l'inspection académique sort son stylo rouge : "Surtout ne pas aborder les motifs de ce mouvement pour ne pas glisser vers les opinions non " argumentables " et risquer le dérapage du débat. Sauf qu'il n'y a rien de non-argumentable à dire que les Gilets jaunes trouvent que tout coûte trop cher à La Réunion, non ?

Ensuite l'Académie ouvre le chapitre des violences urbaines : est-ce que ce sont les mêmes personnes qui incendient et rackettent ? ; pourquoi les exactions commises pendant ces manifestations (citées dans le débat – voir article de presse) sont-elles répréhensibles ? ; alors, pour le coup, les réponses risquent bien de faire appel à la théorie de la relativité et  apparemment l'Inspection Académique n'y a pas pensé. Au mieux,les élèves pourront toujours réaliser un arbre de probabilités.

S'en suit une autre question piège : quels problèmes pose la présence de mineurs sur les lieux de manifestation ? Et là, on est un peu hors sujet (HS) sur les violences urbaines. Pour la bonne chronologie de la narration, nous, on aurait remonté cette question plus haut, au niveau des Gilets Jaunes, mais passons, on enlève juste deux points à l'Inspection académique alors qu'un HS vaut zéro habituellement.

Grille d'évaluation orientée

Ensuite, l'Académie sort la grille d'évaluation, les Valeurs de la République, avec de nouvelles questions : quels principes fondamentaux ces actions outrepassent-elles ? ; cela porte-t-il atteinte aux valeurs de la République ?, a-t-on le droit de ne pas respecter les Valeurs de la République ?, quelles limites faut-il placer entre les libertés de chacun ?

Occasion de demander aux enseignants de vérifier auprès des enfants les lacunes en matière de règle et de loi : - quelles conséquences entrainent les incendies, le racket de véhicules, les affrontements violents de tout ordre, la mise à sac de commerces et services "publiques" (avec faute d'orthographe, c'est services publics et non pas publiques, deux points de moins de nouveau pour l'Inspection académique), les exactions doivent-elles être sanctionnées ? ; quel rapport avec la notion de règlement ? pourquoi y a-t-il un règlement de la classe, de l’école ? les sanctions qui sont appliquées en cas d’infractions à ces règlements sont-elles justes ? ; à quelles conditions peut-on dire qu’elles sont justes ?

Et de suggérer la réponse, des fois que l'enseignant aurait des trous de mémoire : "si elles sont respectueuses des droits de la personne, adaptées à la gravité de la faute commise, identiques pour tous face au même délit, qu’elles soient approuvées dès le départ par toute la communauté"...

Bourrage de crâne et propagande

En clair, le Rectorat encadre le débat, ce qui est une manière de faire taire les débats. Le Rectorat limite le questionnement aux évènements violents, ce qui permet le rappel à la Loi. Et tant qu'à faire, on encourage les élèves à devenir censeurs, à être juge de ce qui s'est passé et à sanctionner.

Ne serait-on pas plus près de la pédagogie de la manipulation et du bourrage de crâne que de l'instruction bienveillante qui vise à aider des élèves à devenir des citoyens éclairés par leur propre capacité à réfléchir ?

L'Inspection académique, qui demande d'éviter les débats improductifs; vient d'en faire la démonstration : en suivant son vademecum, l'école se limite à la condamnation des faits plutôt qu'à l'accompagnement de la pensée civique en construction des élèves. Qu'en pensent les enseignants ?

ml/www.ipreunion.com

guest
9 Commentaires
jack daniel
jack daniel
5 ans

ca me fait rire un reunionais i prends son compatriote pou un gateur recteur ou la reste trop lontemps dans pays la frais, luè vois lu le blond aux yeux bleus reste zen coco sinon fume un joint

pmillery, depuis son mobile
pmillery, depuis son mobile
5 ans

L' École de la confiance a encore frappé ! Le Recteur doute tellement de ses enseignants qu'il leur apporte des éléments de langage. Une école qui ne fait pas confiance à ses enseignants est une école qui est vouée à disparaître...

gilet jeune
gilet jeune
5 ans

Comme la plupart des enseignants bien entendu je ne prends meme pas la peine de lire ce genre d inepties en droite ligne du ministere.

Van Ruynbek
Van Ruynbek
5 ans

"Il a une bonne tête de vainqueur" cet inspecteur d'académie, encore un spécialiste de tout et expert de rien !

mat, depuis son mobile
mat, depuis son mobile
5 ans

A africaqueen974
"je ne peut plus "
"je leur dit"
"des fonctionnaires qui fonctionne "

Grammaire CE2 à revoir.
( faut faire attention quand on commente une déclaration du recteur d'académie. Si on est enseignante!)

Jerry.
Jerry.
5 ans

A post 2.
Comment peut-on se dire enseignante avec autant de fautes d'orthographe ? Je comprends pourquoi nos enfants sont en échec scolaire, lorsque celles et ceux qui sont sensés leur transmettre le savoir en sont parfois dénués. Mes parents qui n'avaient que le certificat d'études savaient écrire sans fautes!

97424
97424
5 ans

Ces commentaires sont orientés, faux et surtout injustes.
En réalité, les enseignants ont juste été destinataires d’un vadémécum sur la laïcité comme ressources pédagogiques potentielles pour structurer les débats de la reprise autour des valeurs que nous partageons tous. Rien à voir avec vos délires

tazopinion
tazopinion
5 ans

Mon premier commentaire a été censuré visiblement ... Je réitère donc.
Voici des méthodes académiques qui rappelle une certaine école française qui se pliait volontiers aux exigences de l'Etat Français ... fut un temps.

Africaqueen974
Africaqueen974
5 ans

Je suis enseignante. Gilet jaune sur un rond point depuis le 17 novembre. J'ai sauté de ma chaise en lisant le mail. C'est un vade-mecum pour apprendre aux élèves à vivre en mouton plutôt qu'en citoyen éclairé capable de se mobiliser contre les injustices même si elles sont commises par l'Etat. C'est surtout un vade-mecum pour rappeler aux enseignants qu'ils doivent rester des moutons face à l'état parce que nous devons être des fonctionnaires qui fonctionne. Je suis gilet jaune parce que je ne peut plus dire honnêtement à mes élèves que s'ils travaillent bien à l'école, il pourront avoir leur métier de leur rêve et rester vivre sur leur île auprès de leur famille avec bonheur ! Je le leur dit pour les motiver pour les rassurer quand ils voient la situation matérielle de leurs parents mais j'y crois de moins en moins. Je trouve honteux que la France, 5ème puissance mondiale, pays des droits de l'homme, continue à traiter les réunionnais comme des citoyens en SOUS-FRANCE. Mais elle fait bien avec les continentaux, alors...