Sports - Football féminin

Le ballon rond au pied des filles

  • Publié le 16 juillet 2011 à 06:00

L'époque des Zidane, Deschamps, Lizarazu ou encore Desailly est dorénavant révolue, et la relève de l'âge d'or du football français n'est peut-être pas à attendre du côté des hommes. Cette année 2011, les nouvelles icônes du ballon rond se nomment plutôt Elise Bussaglia, Louisa Necib, Marie-Laure Delie ou Sonia Bompastor. Avec l'équipe de France, elles ont réalisé un joli parcours en Coupe du monde, atteignant les demi-finales, et grâce à elles, le football féminin gagne un peu en visibilité et en popularité. A La Réunion, la discipline sportive est "en plein essor" selon Jean-Claude Payet, président de la commission du développement à la pratique du football féminin, même si des progrès sont encore à faire.

"Le football féminin est apparu à La Réunion dans les années 1970", indique Jean-Claude Payet. "A l'époque, il n'y avait pas de championnat comme pour les garçons, juste des jeunes femmes avec une envie de jouer. Elles ont commencé à constituer des équipes de quartiers aux quatre coins de l'île et à organiser entre elles des rencontres amicales, dans un esprit convivial", se souvient-il. "Quelques années après, elles se sont demandées pourquoi est-ce qu'elles n'auraient pas droit à un championnat officiel comme les garçons, et sont allées réclamer ce droit à la ligue de football", ajoute le président de la commission du développement à la pratique du football féminin. De nos jours, l'île compte 1268 licenciées, incluant seniors et juniors. Le championnat féminin comprend lui deux divisions.

Cependant, même si les Réunionnaises jouent au foot depuis une trentaine d'années, il est encore difficile pour la discipline d'avoir une reconnaissance, aussi bien auprès du public qu'auprès des dirigeants. "Il est évident que le football féminin n'a pas le même statut que le football masculin. La discipline est encore mal connue. Parfois elle est même mal vue par certains parents, qui considèrent le foot comme un sport masculin et refusent que leur fille joue, sous prétexte qu'elle devienne un garçon manqué", explique Pascale Boyer, ancienne joueuse et maintenant présidente du club de l'OFFT (olympique football féminin tamponnais). "Le football féminin est aussi desservi par la concurrence des autres sports qui sont considérés comme plus élégants et plus féminins. Ainsi, les fillettes sont plutôt dirigées vers la danse, la natation ou la gymnastique. Ce qui est dommage car à La Réunion, il y a un vrai potentiel féminin pour le football", regrette Pascale Boyer.

La ligue réunionnaise de football fournit pourtant des efforts pour aider le football féminin à se développer. "Le ballon rond n'est pas réservé aux garçons, les filles sont aussi les bienvenues. On essaie de diversifier les formations, de les ouvrir aux plus jeunes. Les fillettes qui veulent jouer sont de plus en plus nombreuses, elles ont besoin qu'on les soutienne. C'est pourquoi on les invite à s'inscrire dans les clubs, elles n'ont pas à avoir peur. On organise également des plateaux d'animation plus souvent, pour les jeunes de moins de 12 ans et de moins de 15 ans", assure Jean-Claude Payet. Dernièrement, c'est au stade Théophile Hoarau de Saint-Louis que des rencontres ont eu lieu entre les jeunes footballeuses. "Il faut aussi arrêter avec les préjugés, il n'y a qu'à assister aux matchs pour se rendre compte que les filles et les femmes ont de l'élégance sur le terrain", signale par ailleurs Jean-Claude Payet.

Autre effort accompli par la ligue et les dirigeants : "Nous essayons de proposer des formations dans les écoles et les collèges, pour faire évoluer les mentalités et montrer que le foot est accessible à tous", indique Pascale Boyer. La dirigeante de l'OFFT a baigné dans le milieu du foot depuis toute petite et a évolué dans plusieurs clubs de l'île, de Saint-Joseph à l'AS Pont d'Yves, en passant par l'USST et les Pélicans. Pour elle, "le football est avant tout un sport collectif et représente un moyen de s'amuser et de ne pas rester toute seule à la maison". "Les filles montrent un réel plaisir de jouer sur la pelouse. Elles donnent leur maximum sur le terrain, elles n'ont plus peur du ballon, elles le maîtrisent", précise Pascale Boyer.

Pour Karine Gorée, footballeuse à Saint-Louis, l'envie de jouer est venue en regardant son frère Thierry sur la pelouse : "Quand j'étais petite, je m'amusais bien avec mon frère et ses copains, c'est comme ça que je suis entrée dans le monde du football. Et puis c'est un sport dans lequel on transmet certaines valeurs, comme la force et la discipline". La jeune femme a passé trois années au centre de formation de Lyon, club qui a remporté la Ligue des champions il y a quelques mois. Elle a aussi joué dans le club de Saint-Pierre, avant de rejoindre Saint-Louis. "En métropole, le foot féminin a plus évolué qu'à La Réunion. Là-bas, on propose aux filles des centres de formation à part entière. Ici, on commence à proposer des tournois aux jeunes filles, mais il y a encore des progrès à faire", estime Karine Gorée. Parmi ces progrès, la footballeuse pense notamment qu'il faudrait "faire une sélection régionale pour les seniors et organiser davantage de rencontres pour les jeunes".

Jean-Claude Payet considère lui aussi qu'il reste des efforts à faire. "Le foot féminin commence à prendre ses marques. Les mentalités évoluent, le succès de l'équipe lyonnaise et la demi-finale de l'équipe nationale en Coupe du monde participent déjà à une meilleure reconnaissance de la discipline. De notre côté, on va continuer à faire le maximum pour aider les filles à vivre leur passion. On espère qu'elles seront également soutenues par le public parce qu'elles le méritent", conclut-il.

Samia Omarjee pour

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