La Saint-Leusienne dans l'élite mondiale

Surf : Johanne Defay classée 5ème mondiale

  • Publié le 28 novembre 2018 à 11:19
  • Actualisé le 28 novembre 2018 à 11:38

Cette nuit, la Réunionnaise Johanne Defay s'est classée 5ème de la dernière manche du World Tour à Maui (Hawaii) sur le spot de Honolua Bay, éliminée par la nouvelle championne du Monde Stéphanie Gilmore. Avec ce top 5 mondial, Defay réitère sa meilleure performance sur le World Tour (2016), qui est aussi le meilleur résultat historique d'une Européenne à ce niveau. Pour la 5ème saison consécutive, la Saint Leusienne figure parmi le top 10 mondial et signe donc une requalification pour le World Tour 2019, quasi synonyme de sélection olympique pour Tokyo 2020. Chapeau. D'autant plus que sur ce Tour 2018, avec l'annonce du surf comme sport olympique et ses critères de qualification, le niveau féminin a subitement grimpé en flèche... et Defay a brillé.

Pourtant, l'histoire n'est pas aussi belle qu'elle en a l'air et cette fin de saison est une fois encore ternie par l'absence d'impartialité flagrante de la part des juges. Johanne Defay n'a pas impressionné au 1er tour de compétition lundi à Honolua Bay, elle a même déçu, soyons honnêtes. Au second tour, elle relevait un peu la barre et éliminait facilement Bethany Hamilton, secouée malgré elle par des conditions solides. Au 3ème tour, la surfeuse péi montrait enfin un peu plus d'engagement dans son surf mais était ultra dominée par une Sally Fitzgibbons en feu qui scorait des tubes de deux fois sa taille.

Montée en puissance

Clairement, c'était laborieux pour la Réunionnaise qui pourtant affectionne ces conditions solides. Malgré cela, elle se classait seconde de la série et validait son ticket pour les quarts de finale du lendemain. On le sait, Defay est parfois longue à la détente et prend le temps de trouver ses marques, comme en 2016 lorsqu'elle remporte le Fiji Pro après avoir frôlé l'élimination aux 2ème et 4ème tours. Si les scores ne décollaient pas, on sentait pourtant que la Réunionnaise gagnait en confiance et en combativité au fil des rounds ; clairement, elle montait en puissance, laissant entrevoir un lendemain différent.

Mardi donc, dans des conditions plus petites et moins régulières, elle affrontait la nouvelle championne du Monde australienne, Stéphanie Gilmore (titrée dès le second tour après l'élimination de Lakey Peterson). Sur le permier échange, la setuple championne du monde scorait avec grâce un 7,17 mérité et Defay répondait avec un 6,50 bien engagé et honnêtement récompensé.

A n'y rien comprendre

Le tournant de la série était marqué par une vague de l'Australienne notée 5,77 pour deux petits turns coupés et une chute dans le tube... De quoi se poser des questions quand la Réunionnaise tentait une grosse manoeuvre et un tube manqué pour seulement 3 points. Le coup de massue venait en toute fin de série : à 10 secondes de la fin, Defay, prioritaire, s'élançait sur une belle vague après 12 longues minutes de traversée du désert et s'engageait corps et âme sur cette opportunité venue récompensée sa patience légendaire, pour tenter d'assommer sa rivale avec le score requis de 6,45.

Le job était fait avec deux gros turns serrés et un solide reentry à faire pâlir certains de ces messieurs du World Tour. En cabine, le légendaire Barton Lynch commentait et imaginait logiquement Defay en demie, saluant au passage son engagement sur cet ultime tentative.

A l'eau, Gilmore semblait avoir compris, tout comme Rosy Hodge, la commentatrice aquatique venue interviewer Defay au sortir de sa vague en attendant le score officiel. Mais l'Australienne esquivait le coup de massue, qui venait finalement des juges et frappait directement la Réunionnaise en pleine face : 6,07 points ! Insuffisant. Gilmore s'imposait 12,94 face à Defay 12,57. A n'y rien comprendre.

Si le score de Gilmore n'avait pas été surévalué...

Impassible pourtant, la Saint Leusienne fuyait l'interview pour regagner le bord, dépitée mais pas surprise. Cette fois-ci, Defay s'était préparée à ce genre d'annonce après avoir vécue la même mésaventure début août à l'US Open, déjà en quart de finale contre Gilmore. Rien ne sert de crier au scandale face à une organisation américaine pro-australienne qui ne fait pas son beurre sur les surfeurs européens... Mais tout de même ! Après réclamation à l'US Open, les juges avaient mis en avant le flow de l'Australienne sans vraiment convaincre le clan Defay.

Clairement, Gilmore est ce qui se fait de mieux dans le surf féminin, avec un style hors normes et un vrai esprit de compétition, mais elle est aussi humaine et pas infaillible, capable du meilleur comme du pire... Hier, à Maui, après une autre réclamation, la réponse était beaucoup plus évasive : le chef juge admettait même avoir laissé l'entière décision aux juges sur la dernière vague, sans intervenir comme il le fait habituellement pour harmoniser les scores en regardant le replay des autres vagues.

A demi-mots, il laissait entendre que l'écart entre le 5,77 de Gilmore et le 6,07 de Defay était injustifié, admettant que le score de l'Australienne avait été surévalué. Mais le mal était fait, et si le score de Gilmore n'avait pas été surévalué, la Réunionnaise aurait accéder enfin aux demi-finales à Maui pour la première fois de sa carrière, sans rien changer au classement mondial, mais cela aurait été un petit évènement dans la carrière de la tricolore.

Elle a écrit l'histoire du surf tricolore

La surfeuse péi n'est pas du genre à se plaindre mais plutôt du genre à comprendre pour s'améliorer. Quand les juges attendent de l'engagement, elle leur donne le mieux de ce qu'elle sait faire. Aujourd'hui (mardi), nul ne sait ce qu'ils attendaient finalement, puisqu'eux mêmes n'ont pû répondre à cette question. Dans ces conditions, cela paraît compliqué pour les surfeuses de proposer quelques choses qui va convaincre.

Retenons seulement que Johanne Defay est 5ème mondiale, avec plusieurs incidents de ce genre. Cela arrive fréquemment dans les sports artistiques où ce sont finalement des critères plus ou moins objectifs évalués par des êtres humains.

Dommage que les juges de la WSL soient hypnotisés par le lycra jaune de la numéro une mondiale. Car si ces incidents se reproduisent souvent, ils ne le sont que très rarement en faveur de la Réunionnaise qui doit sans arrêt prouver qu'elle a sa place dans l'élite mondiale alors que d'autres ont une voie toute tracée.

La Saint Leusienne continuera pour sûr à donner le meilleur de ce qu'elle sait faire et ne baissera pas les bras dans ce milieu où elle se sent parfois bien seule. A Maui, elles étaient 8 Hawaiiennes, 4 Américaines et 4 Australiennes sur les 18 compétitrices. Malgré cela, Johanne Defay a encore écrit l'histoire du surf tricolore en s'emparant de la 5ème place du classement mondial 2018 avec une belle victoire d'étape à Uluwatu en juin, contre vents et marées.

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1 Commentaires
Juju
Juju
5 ans

Bravo Pekpek, malgré tout ça, tu leur as montré ce que tu valais! Meilleure réunionnaise et meilleure française mondiale :)