Des jumelles au sommet du podium

Soeurs Bertone : histoire de deux championnes d'escalade

  • Publié le 17 mars 2019 à 02:59
  • Actualisé le 18 mars 2019 à 09:07

Margot et Oriane sont jumelles et elles sont toutes les deux des reines de la grimpe. Différentes mais unies, elles s'entraînent ensemble depuis qu'elles ont 7 ans et c'est main dans la main qu'elles affrontent les compétitions. Respectivement vice-championne et championne de France, les deux soeurs ont l'habitude des podiums et font la fierté de leur famille et de leurs entraîneurs.

Elles s’appellent Margot et Oriane. La première a 14 ans et la seconde… 14 ans et deux minutes de moins. Deux jumelles d’origine italienne qui ne se ressemblent – physiquement – en rien, mais qui restent unies par une même passion, celle de l’escalade.

" C’est bien simple, il y a une grande blonde et une petite brune " témoigne leur entraîneur à la ligue Réunion du Pôle espoir Outre-mer, Philippe Gaboriaud. Et surtout, 20 centimètres les éloignent l’une de l’autre. 1m76 pour Margot, 1m57 pour Oriane. Pourtant les deux filles continuent à concourir dans la même catégorie, en minimes.

Âgées de 7 ans, les jumelles découvrent l’escalade " un peu par hasard ", explique Margot. " On est passées par plusieurs sports, et puis un jour on a découvert la grimpe en pleine nature et on a adoré. " Le moniteur qui les accompagnait n’en revient pas. " Il m’a demandé depuis combien de temps mes filles pratiquaient l’escalade ", raconte Stefano Bertone, le père des jumelles. " Quand j’ai répondu que c’était la première fois qu’elles en faisaient, il ne m’a pas cru. " De là, une passion est née.

Des rochers aux compétitions

" Très vite, on est rentrées dans le dur ", se souvient Margot. Un an après leurs jeunes débuts, les filles continuent dans un club et enchaînent rapidement avec la compétition. Au fur et à mesure, chacune découvre ses points forts et ses points faibles. " On est assez complémentaires ", détaille Margot. " Moi j’adore les mouvements dynamiques, ça me fait penser à la danse. C’est-à-dire tout ce qui est jetés, quand on attrape une prise au vol, ou quand on court sur le mur. Oriane, justement, elle préfère les mouvements plus classiques, et sa spécialité ce sont les blocs. "

Justement, Margot se souvient bien de sa sœur sur les blocs lors du Championnat de France, en catégorie poussine. " Normalement on a plusieurs essais pour réussir chaque bloc… Oriane a réussi chaque bloc dès le premier essai. C’est incroyable d’avoir pu faire ça. "

La compétition plaît aux deux sœurs. Mais chacune gère son stress différemment. " Moi j’aime bien sentir la pression qui monte, l’adrénaline ", explique Oriane. " Je pense que c’est du bon stress, ça me permet d’être concentrée et de tout faire pour gagner. " Margot elle, est plus modérée. Elle n’y va pas pour la gagne, c’est surtout l’ambiance des compétitions qui lui plaît. Mais elle cumule malgré tout plusieurs titres non négligeables : 3e aux championnats de France en catégorie poussin-benjamin en 2016, et vice-championne de France en 2018… derrière sa sœur, Oriane.

Différentes mais complémentaires

Les jumelles, qui s’entraînent aujourd’hui 6 jours par semaine, on tout fait ensemble. " Je suis les filles depuis qu’elles sont microbes ", raconte Philippe Gaboriaud. " Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elles ont bien grandi. " Leurs gabarits sont pourtant bien différents maintenant. Margot a pris une dizaine de centimètres en une année seulement : " ça me désavantage à certains moments, parce que je suis toujours en catégorie minime et les prises sont assez resserrées et plus adaptées à la taille d’Oriane. "

Quand on demande aux filles comment on vit le fait de s’entraîner tous les jours côte à côte et de vivre dans la même maison, elles sont unanimes : " ça se passe très bien ". Les tempéraments sont différents, les chamailleries normales entre sœurs… mais " c’est super d’être ensemble ", s’exclame Margot. " On s’entraide souvent. Quand Oriane n’arrive pas à faire un mouvement, j’essaie de l’aider et inversement. "

L’une est plus caractérielle, l’autre plus posée. C’est ce qui fait leur force et leur réputation. Deux sœurs qui ne se ressemblent pas, mais s’assemblent bien pour filer jusqu’au podium.

De l’or autour du cou…

Il n’aura échappé à personne que la jeune Oriane rafle tous les prix. " Aucune jalousie de ma part ", rassure tout de suite Margot. " Je suis fière et contente qu’elle gagne ". Et c’est tant mieux, car Oriane ne lésine pas sur les victoires… Vice-championne de France, puis trois fois championne de France en épreuves combinées, et enfin championne de France dans la discipline blocs.

Lire aussi : Escalade : Oriane Bertone championne de France

Quand on lui demande ses impressions, Oriane reste modeste : " Le Championnat de France, j’ai essayé de voir ça comme une compétition habituelle. C’était un but mais c’est surtout une belle porte d’entrée pour moi ". En effet, la jeune fille va maintenant débuter une saison internationale, et vise plus haut, toujours plus haut.

… jusqu’au podium mondial ?

" Je pense ne prendre aucun risque quand je dis qu’Oriane pourrait être la future championne du monde de sa catégorie ", estime Vincent Etchar, son entraîneur au club 7A l’ouest. " Même localement, on a jamais eu un niveau comme ça. Elle a déjà un niveau senior et le profil pour finir à très haut niveau. "

L’autre entraîneur Philippe Gaboriaud confirme : " En France, nous sommes déjà plutôt bien placés dans la hiérarchie mondiale, et en Europe nous sommes dans les 2 ou 3 meilleurs. Pour vous donner une idée du niveau d’Oriane, elle est au-dessus du niveau français. "

La question maintenant est : comment Oriane va-t-elle réagir si elle doit faire face à un échec ? " Elle a tendance à être assez susceptible ", se risque Margot. " C’est quelqu’un d’impulsif, et assez têtu. Elle accepte mal les défaites. " Si " l’aînée " cherche au contraire à comprendre ses erreurs, Oriane, elle, est plutôt habituée à la gagne. " Elle n’a jamais connu l’échec ", explique Vincent Etchar. Est-elle imbattable ? " On est tous plus ou moins battables ", philosophe son père. " On verra, mais l’escalade reste, comme tous les sports, une façon d’apprendre la vie. " Pour lui, l’activité de ses filles leur enseigne aussi la frustration : " cela montre que rien n’est donné, que tout se gagne à la force du poignet et à la sueur du front. "

Le sport, une histoire de famille

Fier, le papa espère quand même que ses filles ne feront pas de l’escalade un unique projet de vie. " C’est agréable de voir ses enfants réussir, mais je leur souhaite de faire des études malgré tout et trouver un vrai métier. " Professeur d’EPS en collège-lycée, puis en faculté, voilà un père bien placé pour savoir que le sport à haut niveau est un milieu exigeant.

Reconnu dans le monde du judo, Stefano Bertone a su transmettre la passion de l'activité physique à ses enfants. Max, le benjamin de la fratrie, s’est d'ailleurs lui aussi laissé tenter par l’escalade. " Moi aussi je voudrais un jour tenter les Championnats du monde. L’escalade c’est toute ma vie ! " déclare le garçon, enthousiaste.

Il voudrait suivre le modèle de ses sœurs. " Je les vois de moins en moins avec les compétitions, mais je suis fier d’elles. " Le petit dernier de la famille a d’ailleurs des qualités non négligeables, selon l’entraîneur et ami de la famille Vincent Etchar : " Il a comme ses sœurs, de belles qualités de base. "

Des projets plein la tête

Souvent en vadrouille pour les compétitions, les jumelles suivent des cours par correspondance. Comme le petit frère, d’ailleurs, également inscrit au CNED pour pouvoir accompagner la famille sur certains déplacements.

" On rentre très souvent en métropole pour les compets. Là, on va repartir en mai, après plusieurs allers-retours et on ne reviendra qu’en septembre ", explique Margot. Un rythme intense, puisqu’en plus de l’escalade, les filles préparent leur brevet des collèges. Oriane n’est pas inquiète : " On révise, au même titre que les autres cours, on arrive à s’organiser. "

Et que se passera-t-il après le bac ? " On verra bien pour les études ", estime Oriane, qui, si elle aime particulièrement le français, ne s’inquiète pas pour l’instant des questions d’avenir. Quant à Margot, amoureuse des maths, elle se verrait bien architecte dans le futur. Mais pour l’instant, les filles ont d’autres rêves d’ascensions… faits de baudriers et de mousquetons.

mm/www.ipreunion.com

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