Elle veut (beaucoup) mieux faire

Surf : début de saison mitigé pour Johanne Defay

  • Publié le 15 juin 2019 à 02:59
  • Actualisé le 15 juin 2019 à 06:50

Le World Tour est déjà bien entamé pour la Réunionnaise Johanne Defay qui peine à s'exprimer sur un nouveau format de compétition et parmi un peloton d'élite qui ne cesse d'élever son niveau à maintenant 14 mois des premiers Jeux Olympiques pour la discipline. (Photos rb/www.ipreunion.com)

Depuis la première épreuve début avril sur la Gold Coast australienne, la World Surf League a choisi d'instaurer un nouveau format de compétition plus adapté aux retransmissions télévisuelles, le but étant de gagner du temps et de la clarté pour les téléspectateurs non avertis. Forcément, tout cela est lié aux prochains Jeux Olympiques d'été à Tokyo en aout 2020. Mais pour les compétiteurs, ce changement est majeur. En effet, si rien ne change pour les quarts, demies et finale, tout est différent pour les trois tours précédents.

Au premier tour, pas d'élimination et toujours une série à 3 surfeurs: les 2 premiers passent directement au 3ème tour, le 3ème passe au second tour. Le second tour, synonyme de repêchage se déroule également sur le même modèle que le 1er tour: seule nouveauté, il n'y a que deux séries et donc deux filles éliminées seulement à ce stade contre six sur l'ancien format. Le gros changement intervient au 3ème tour qui se dispute désormais en man-on-man (duel), avec du coup 8 filles éliminées avant les quarts.

Pour Johanne Defay, ce changement a des répercussions importantes: "le nouveau format est plus dur, on a moins le droit à l'erreur et c'est donc plus de pression. Ça ne pardonne pas car avec le seeding et deux mauvais résultats, je me retrouve directement contre des filles plus difficiles à battre, avec plus d'expérience comme Sally Fitzgibbons... avec des adversaires plus difficiles, c'est l'engrenage: mauvais résultats, baisse de confiance... Mais à la fois, ça nous oblige à surfer à 100% et ça fait de belles séries. Ça va forcément me faire progresser en tant que compétitrice, ça va m'obliger à chercher d'autres pistes pour progresser".

- Le petit plus qui pourrait tout faire basculer -

Formatée pour gagner ses séries en man-on-man depuis ses débuts sur le Tour en 2014, la Réunionnaise a souvent apprécié ce genre de confrontation en duel, prouvant qu'elle avait d'excellentes aptitudes mentales pour ce genre de challenge. Puis en 2017, le format avait changé pour faire la part belle aux séries à 3 et Johanne Defay avait pris quelques semaines pour s'habituer au changement: en 2018, la Réunionnaise a disputé 16 tours à 3, sur lesquels elle s'est qualifiée au tour suivant 13 fois, soit un taux de réussite au delà de 80%! Cette année donc, Defay doit à nouveau apprendre à s'imposer en 1 contre 1 et nul doute qu'elle y parviendra. Car depuis début avril, sur les 4 manches disputées, elle n'a gagné que deux séries en man-on-man, atteignant les quarts une seule fois lors de la 1ère manche.

A chaque fois, la Réunionnaise a commis des erreurs de stratégie ou de placement, s'inclinant alors de justesse. Il lui manque donc ce petit plus qui pourrait faire basculer en sa faveur et vue les erreurs grossières commises sur certaines compétitions, elle devra pouvoir corriger cela pour les prochaines échéances: "Ce n'est pas mon meilleur début de saison mais les saisons sont différentes. On peut avoir des phases de moins bien mais l'important est de réussir à mettre des choses en place pour évoluer. Je ne suis pas satisfaite de mes résultats et de ma façon de gérer mes séries mais je ne peux qu'aller de l'avant pour faire mieux".

- Un niveau féminin en constante progression depuis 5 ans -

Autre facteur important et non des moindres, la discipline est désormais olympique, à quelques mois seulement de sa première participation aux Jeux de Tokyo. Et tout le monde veut participer à cette première historique! Si Defay est plutôt tranquille côté tricolore car elle est l'unique Française sur le World Tour et donc quasiment assurée d'être qualifiée au Jeux Olympiques, ce n'est pas le même cas de figure côté américain ou australien où les filles sont beaucoup plus nombreuses.

De ce fait, la concurrence est exacerbée au sein d'une même nation, ce qui tend à élever le niveau de chaque individu. Concrètement, le top 10 est actuellement occupé par 5 Américaines, 3 Australiennes, 1 Brésilienne (ex-Américaine) et 1 Costa-Ricaine (ex-Américaine). Et les 4 premières étapes de la saison ont été trustées par 4 filles différentes (3 Américaines et 1 Australienne), ce qui n'était pas arrivé depuis très longtemps! Le niveau féminin en constante progression depuis 5 ans, a clairement explosé cette année, et c'est tant mieux pour la discipline.

"Le niveau ne cesse d'augmenter chaque année. Les rookies sont excellents (Caroline Marks 2018, Brisa Hennessy 2019) et viennent bousculer la hiérarchie. Les filles s'entraînent beaucoup plus à l'eau et physiquement à l'approche des Jeux, ce qui n'était pas forcément le cas il y a 5 ans. J'étais une des premières à beaucoup m'entraîner physiquement (car je n'avais pas le talent de certaines filles!), et à gagner des étapes. Beaucoup de filles ont vu que c'était possible de s'imposer en travaillant et ont suivi cette voie. Aujourd'hui, ces filles là sont capables de gagner (Nikki Van Dijk, Tatiana Weston Webb, Lakey Peterson, Malia Manuel...) et la victoire n'est plus réservée à Gilmore, Moore ou Conlogue" constate Defay.

La Réunionnaise s'accroche et tente de rester dans la course mais la bagarre est rude. Dès le début de saison sur les épreuves WQS elle en avait fait les frais, éliminée sèchement au 3ème tour des deux épreuves 6000 de Newcastle et Manly, face à des filles largement à sa portée sur le papier. L'autre Réunionnaise, Cannelle Bulard, est l'exemple type du phénomène olympique: celle qui avait mis de côté sa carrière professionnelle pour devenir kiné est revenue à la compétition l'an dernier avec un rêve de qualification... éliminant sa copine Defay à Newcastle sans aucun complexe.

- Redresser la barre et briller à nouveau -

Heureusement pour Johanne Defay, la saison est encore longue et elle le sait. Les années où elle a démarré fort, la surfeuse péi n'a pas tenu la distance: en 2017, elle s'offrait une victoire en début de saison à Newcastle et une finale à Manly, sur le circuit WQS, puis une finale à Rio sur le WCT... malgré ses bons résultats, sa 2ème partie de saison était catastrophique. A l'inverse, elle a prouvé par le passé qu'elle était capable de terminer fort comme lors de sa 1ère saison sur le Tour où après 4 éliminations en début de compétition sur les premières épreuves, elle s'offrait consécutivement les 6 quarts de finale des épreuves suivantes.

Bref, les saisons se suivent mais ne se ressemblent pas pour la Réunionnaise qui vit actuellement sa 6ème année parmi l'élite mondiale, un record historique sur le plan français et européen: "il va falloir être très concentrée et forte mentalement. Je vais aborder ça en étant dans ma bulle, dans mon surf, revenir à des choses simples, à l'essentiel. Quand je suis trop focalisée sur la compétition, même avec beaucoup d'envie, j'en oublie mes basiques... Je vais être attentive à mon corps car tout s'enchaîne vite et il faudra tout remettre à zéro à chaque épreuve, que cela se passe bien ou non, prendre les étapes une par une."

Ce vendredi 14 juin 2019, Johanne Defay s'est envolée à Rio (Brésil) pour disputer la 5ème épreuve de la saison puis enchaînera début juillet à J-Bay (Afrique du Sud) et fin juillet à Oceanside et Huntington (Californie), fin août à Pantin (Espagne), début septembre au Surf Ranch (Californie), fin septembre au Japon pour les championnats du Monde ISA, début octobre à Hossegor (France) et fin octobre à Peniche (Portugal).

Un programme chargé d'opportunités pour redresser la barre et briller à nouveau.

sp/www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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