Les Républicains veulent renforcer les sanctions contre les organisateurs

Free parties : "nous n'irons pas en prison pour vous avoir fait danser!"

  • Publié le 5 août 2018 à 09:52

Selon certains députés Les Républicains, les sanctions qui existent déjà pour les organisateurs de free parties, à savoir 1 500 euros d'amende et la saisie du matériel pour 6 mois maximum, ne sont pas assez "dissuasives". Puisque "les rave-parties continuent à perturber certaines régions avec leurs lots de conséquences néfastes", Les Républicains ont décidé de proposer une loi visant à renforcer ces sanctions. En allongeant la durée maximale de saisie du matériel à un an, et en faisant passer la peine encourue d'une contravention de 5ème classe, à un délit. Un délit passible d'une peine d'emprisonnement de trois mois et d'une amende de 3 750 euros. Pour les organisateurs de "teufs" réunionnais, ce projet de loi n'aura aucune conséquence sur la tenue des soirées illégales. Pour le contester, ces derniers n'ont pas hésité à signer une pétition clamant : "Nous n'irons pas en prison pour vous avoir fait danser!".

Ces sanctions prévues contre les organisateurs de free parties concernent ceux qui rassemblent plus de 500 personnes et qui font la promotion de leur évènement en amont sans déclarer quoique ce soit à la préfeture.

Une déclaration qui doit être faite un mois avant la date prévue de la soirée et qui est assortie d'engagements tels que garantir la sécurité, la salubrité, l'hygiène et la tranquilité publique. En installant des toilettes et en faisant appel à un service de sécurité par exemple. 

Des sanctions trop "légères"? 

Pour les députés Les Républicains, c'est parce que les sanctions sont trop légères que les oganisateurs "font fi de ces obligations".

Selon eux, le résultat est le suivant : "les raves-parties continuent avec leurs lots de conséquences néfastes". Parmi elles, les députés pointent du doigt "l'abus de la consommation d'alcool et de stupéfiants (qui) entraine régulièrement des comas éthyliques et des overdoses, avec une déconnexion de responsabilité pour l'organisateur" et "la musique assourdissante ainsi que les terrains dévastés".

Pour y faire face, les parlementaires proposent de durcir les sanctions contre les organisateur de free parties

Mais les personnes visées ne comptent pas se laisser faire : pour contrer cette proposition de loi,  une pétition tourne actuellement sur le site internet Change.org. Pétition que les acteurs réunionnais n'ont pas hésité à signer. 

C'est, par exemple, le cas du fondateur du site web "Teufin974". Un site qui recense les soirées organisées localement. Et notamment les quelques free parties de La Réunion. 

Ce fondateur, qui a accepté de répondre à condition de rester anonyme, l'affirme : "En Métropole, les free parties sont organisées à une échelle beaucoup plus importante que celles qu'on peut voir à La Réunion". Pour preuve, sur l'île, on recense seulement une ou deux soirées illégales par mois.

Pas plus de 300 personnes à La Réunion

En lien constant avec les organsiateurs, ce Réunionnais tente de leur faire passer le message suivant : "Pour ne pas avoir d'ennuis, il ne faut pas que la soirée attire plus de 500 personnes".

A La Réunion, la règle est respectée puisque le nombre de participants ne dépasse jamais les 300 personnes. Pour limiter ce chiffre, les organisateurs font jouer la "sélection naturelle". Autrement dit, ils ne font pas la promotion de leur soirée et ne donnent le lieu du "spot" qu'en dernière minute.

"Il est aussi important de gérer le parking pour qu'il n'y ait pas de débordements sur les routes et pour que les pompiers puissent accéder à la soirée en cas de besoin" ajoute le fondateur de Teufin974. Autre astuce : la fête doit être gratuite ou sur donation pour ne pas faire concurrence aux bars ou encore aux boites de nuit. 

"On veut condamner à trois mois de prison des gens qui veulent faire danser les autres"

Si ce jeune homme comprend qu'en Métropole, les free parties puissent être un véritable problème, notamment du fait "du tapage" qu'elles peuvent provoquer, il confie : "Les sanctions sont déjà trop importantes. Et là, on veut condamner à trois mois de prison, des gens qui veulent faire danser les autres". "Les autorités auraient plus intérêt à accompagner les organisateurs et à leur trouver des spots réglementés pour l'organisation de soirées", propose-t-il. 

Le créateur du site intenet Vokane.re, qui recense lui aussi les évènements musicaux locaux, tient le même discours : "À La Réunion, les autorités savent plus ou moins où les free parties vont avoir lieu mais ils laissent faire car le nombre de participants ne dépasse pas les 300 personnes". Si, sur l'île, le nombre de rave parties est bien plus limité qu'en Métropole, il convient pour les acteurs comme lui, de participer à la pétition qui tourne sur le Web : 

Selon lui, cette proposition de loi est "encore un attirail de plus pour interdire ce genre de manifestations où les gens viennent pour s'amuser. 

Le collectif de reggae/dub Equality HiFi organise des soirées illégales de temps en temps. Mais ses membres se produisent aussi en festival. Comme ce fut le cas, par exemple, lors des Electropicales, à la Cité des arts (Saint-Denis). 

"Les gens sont à la recherche de soirées alternatives"

"En général, les soirées se passent très bien explique un membre du collectif. Les gens sont très à la recherche de soirées alternatives, pour ne pas aller dans des bars ou dans des boites de nuit, là où les boissons sont chères et où la musique est souvent commerciale".

Les soirées, qu'Equality HiFi organisent ce sont des soirées gratuites, qui ont souvent lieu sur des aires de pique-nique éloignées des habitations. Pour le collectif, il n'est pas question de vivre de ces soirées. Le but principal est de "partager" : "ce sont des évènements qui sont ouverts à tout le monde, il n'y a pas de filtre à l'entrée. C'est la liberté de s'amuser et de se réunir pour +kiffer la vibe+. C'est aussi un moyen de s'évader sans se ruiner".

Bloquer tout le mouvement en durcissant la répression

Renforcer les sanctions, "je trouve que c'est dommage, réagit le passionné de musique. Les lois actuelles visent à bloquer tout ce mouvement en durcissant la répression. On va risquer la prison, en plus d'une amende et de la saisie de notre matériel uniquement pour avoir voulu réunir des gens". Aussi, selon lui, le renforcement des sanctions ne dissuadera pas davantage les organisateurs : "Il y en aura toujours qui feront des soirées illégales, on a envie de se sentir un peu libres". 

D'ailleurs, le collectif n'envisage pas une seule seconde d'arrêter son activité : "On a investi une dizaine de milliers d'euros de matériel pour être à la hauteur des sound systems de Métropole. On a aussi monté une association pour participer à des évènements légaux". Quant aux autorités, selon lui, elles feraient "mieux de se concentrer sur les boites de nuit et sur tout ce qui tourne à l'intérieur". Il ajoute : "ça fait six ans qu'on a créé le collectif, on n'a jamais eu un seul souci durant l'une de nos soirées". 

Tous s'accordent à dire qu'à La Réunion, les free parties ne font jamais l'objet de débordements. D'ailleurs "le site, on le rend souvent plus propre que quand on l'a trouvé", réagit le fondateur de Teufin974, "les collectifs font toujours en sorte de nettoyer et de faire de la prévention", ajoute, quant à lui, le créateur de Volkane.re. "En général, il suffit de laisser un message au micro et les participants nous aident à ranger", indique le membre d'Equality HiFi qui ajoute : "ça fait partie de l'esprit des free parties". 

sw/www.ipreunion.com (mis en ligne le 5/08/18 à 3:00 actualisé à 09:52)

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