Édito - Vous ne pourrez pas dire "Je ne savais pas" (actualisé)

Du danger de croire que Marine Le Pen serait devenue fréquentable

  • Publié le 2 mai 2017 à 11:51

Quinze ans après la première qualification du Front National au second tour de l'élection présidentielle, l'histoire semble loin de se répéter. Si, en 2002, le barrage à l'extrême droite a joué son rôle, le scénario pourrait désormais ne plus se reproduire. Cette presque victoire du FN s'est construite sur une stratégie de banalisation et de dédiabolisation, qui conduirait aujourd'hui penser que Marine Le Pen serait devenue fréquentable. Et pourtant, le vernis des apparences n'est jamais loin de se craqueler complètement.

On le voyait plus ou moins venir. Maintenant que le Front National est arrivé à se hisser jusqu’au second tour, il est bon de faire un retour sur une ascension qui a fait feu de tout bois. Depuis maintenant plusieurs mois, la tendance voudrait que Marine Le Pen soit redevenue fréquentable. Et cette qualification fracassante pourrait aussi symboliser une autre victoire : celle de la dédiabolisation. Au terme d’une stratégie de banalisation sur laquelle s’échine la présidente du FN depuis 2011.

Au contraire de son père, la fille ne veut et ne peut plus se contenter de troubler le système politique. D’où le travail accentué sur le vernis des apparences, à l’aide de multiples couches de références, citations et promesses en faveur des habitants se sentant oubliés par la présidence actuelle. Son discours a changé, ôté de toute connotation antisémite, xénophobe ou raciste.

Une belle démonstration de camouflage mais qui ne résiste pas à tous les coups. On pense à la phrase malheureuse du 9 avril, lorsqu’elle déclare que la France n’est "pas responsable du Vél d’Hiv", lorsque plus de 13 000 juifs avaient été arrêtés dans le pays puis déportés dans des camps nazis en juillet 1942. Peut-être un écart de langage, qui n’en demeure pas moins exempt d’un parfum d’extrême droite.

Ou lorsque le président par intérim du FN, Jean-François Jalkh se retrouve contraint de démissionner au vu de son passé de "négationniste". Car, oui, le chef de file d’un parti qui pourrait se retrouver en tête de la France, mettait en doute la réalité des chambres à gaz durant la seconde guerre mondiale. Par extension, on se rappelle que le fondateur de cette formation politique jugeait les chambres à gaz comme un "détail de l’histoire". Difficile de qualifier ce dédain, ce mépris envers tout un pan historique aussi douloureux.

Ces fissures permettent de voir au travers du masque que s’est composé le FN au fil des années. Et lorsque l’on y jette un œil, on retrouve l’obsession de l’immigration, qui représenterait le mal absolu. L’idée d’une France au bord du gouffre qui ne pourrait relever la tête qu’en se débarrassant des étrangers, en se libérant de l’Europe, en s'isolant de tout et de tous. Une idéologie alimentée par la peur d’électeurs qui se sentent délaissés, oubliés, par l’élite politique actuel. Pour preuve : Marine Le Pen arrive en tête dans de nombreuses communes rurales de Métropole. Même situation en Outre-Mer, à la Réunion, qui, pour la première fois, plébiscite l’extrême droite.

Il est dangereux de penser que la candidate d’extrême-droite serait redevenue fréquentable en se défaisant de l’emprise de son père, façon complexe d’Œdipe.

La parole lepéniste bénéficie aussi d’un front républicain qui se fissure. En 2002, c’est cette union qui avait profité à Jacques Chirac lorsqu’il affrontait Jean-Marie Le Pen au second tour. Cette année, Emmanuel Macron devra visiblement faire sans.

L’appel à faire barrage à la crue de l’extrême droite semble encore plus fragile, lorsque l’on voit Jean-Luc Mélenchon refuser de donner une indication claire de vote pour le 7 mai. Ce même Jean-Luc Mélenchon qui avait été l’un des premiers à appeler à voter pour Jacques Chirac pour "abaisser au plus bas possible" le résultat du Front National. Même topo pour la majorité élus locaux, Didier Robert en tête, se contentant d'appeler à contrer le FN du bout des lèvres de peur de compromettre une hypothètique et dérisoire victoire personnelle aux prochaines législatives.

Par la grande irresponsibilité historique de ceux là, l'heure est donc au pesant silence des agneaux se presssant sans murmure sur le chemin de l'abattoir. Eux peuvent dire "je ne savais pas". Nous ne le pourrons pas...

mp/www.ipreunion.com

guest
12 Commentaires
Joseph
Joseph
6 ans

Pareil pour : Du danger de croire que Macron serait devenu compétant...

Il va nous servir du Hollande puissance 10, et vous ne pourrez pas dire que vous n'avez pas été prévenus.

Sans rire
Sans rire
6 ans

Un journal qui se permet de menacer ses lecteurs, cela montre bel et bien que votre intégrité journalistique est inexistante. D'ailler pour respecter l'équilibre d'influence, vous devriez dire de même pour Macron. Surtout que ni l'un ni l'autre ne sont des agneaux innocent œuvrant pour le peuple. Vous étiez meilleurs quand vous vous limitiez à de la photo.

Safe
Safe
6 ans

Le Pen gagnera.

loupy
loupy
6 ans

Vous ne pourrez pas EGALEMENT dire "Je ne savais pas" si Macron passe

Inn bann gatèr
Inn bann gatèr
6 ans

La croûte du vernis craquelle, La Réunion du "vivre ensemble" dévoile son vrai visage en faisant l'apologie de l'idéologie fasciste de M. Le Pen . Face à cela on aurait pu croire que la résistance s'organise, que les ardents défenseurs de "l'identité", de la "culture", de la "spécificité" réunionnaise se mobilisent. Mais non ! Oki bourik! .Silence assourdissant de nos élus, de nos intellectuels, de nos artistes. "Mon péi, mon nasyon "maintes et maintes fois fredonné en spectacle est pourtant en vrai danger . Inn bann gatèr zot tout!!

ptirup
ptirup
6 ans

@ "Ni banquier ni facho" :
il existe des pays sans journalistes, n'hésitez surtout pas à y faire un tour la vie y est merveilleuse en général

Ni banquier ni facho
Ni banquier ni facho
6 ans

Et la responsabilite de tous les trous du cul de journaliste dans le hold up de l oligarchie sur l appareil d etat grace a la mafia de la commission europeenne dont ke sfrancais n ont pas voulu et qui fait qu on en arrive la aujourd hui, on en parle?
Hitler etait financé par les grandes banques et entreprises de l epoque.Mais au moins a cette epoque les journalistes n etaient pas tous achetes par leur maitres financiers...

I kour kashèt
I kour kashèt
6 ans

La démonstration est faite : on ne peut pas compter sur nos chers élus en cas de danger. Le fascisme est à notre porte et zot i kour kashèt.

beotien
beotien
6 ans

cette fois ci elle ne passera pas, respirez et cessez de paniquer, mais que les politiques continuent de nous écraser et de nous imposer de l'europe à toutes les sauces, comme après le référendum de 2005, quand ça rrange leurs carrières d'opportunistes mondialisés, parce que en 2022 ils ne pourront plus dire "je ne savais pas", c'est un peu trop facile de nous prendre pour des inconscients maladroits qui votent de travers, si ça ne fonctionne pas avec elle, tenez le pour dit, le coup d'après ce sera avec mélenchon

Barbara Gence
Barbara Gence
6 ans

@José, oui la démocratie je connais, c'est pour ça que je suis d'accord avec cet article et que je dépêche de le dire pendant qu'il en est encore temps, que la liberté de la presse, d'opinion ont encore droit de cité. C'est cela la démocratie

Jose
Jose
6 ans

C'est quand même incroyable cette façon de vouloir descendre cette candidate, la démocratie, vous connaissez ?

RIPOSTE974
RIPOSTE974
6 ans

Chaque électeur est libre de choisir pour qui voter , tout le reste c'est du cinéma série D

Le malheur des uns fait le bonheur des autres.

Voltaire
Artiste, écrivain, Philosophe (1694 - 1778)