Politique - Crise économique

Paul Vergès : "Il faut un sursaut devant la menace"

  • Publié le 12 mai 2010 à 06:00

"Face à la combinaison des crises européenne, nationale et structurelle de l'île, je lance un SOS et en appelle à un sursaut des Réunionnais. Il faut un sursaut devant la menace. Sinon nous allons vers une aggravation de la situation sociale déjà dramatique sur l'île" a martelé Paul Vergès ce mardi 11 mai 2010 en conférence de presse. Le dirigeant du PCR souhaite que "les professionnels, les politiques et la société civile se concertent, arrivent à une position commune et demandent au gouvernement de faire les réformes attendues depuis un demi-siècle sur l'île".

Indicateurs du chômage en hausse, 52% de la population réunionnaise qui vit sous le seuil de pauvreté, 34% des personnes âgées au minimum vieillesse, crise du secteur du bâtiment, selon Paul Vergès, la crise a de "graves" conséquences à La Réunion et le bilan "ne fera que s'aggraver si une autre politique de développement n'est pas menée dans les 25 années à venir".

Alors que les analystes se contredisent sur une issue éventuelle à la crise économique et sur la date de la reprise, "l'activité économique ne redémarre pas" assure l'élu de l'Alliance. "Après la faillite de la Grèce, on se demande à qui le tour? 750 milliards d'euros ont été injectés pour sauver ce pays de la zone euro et faire repartir les bourses à la hausse, mais c'est un sursis. La crise va encore durer de nombreuses années" estime le responsable du PCR.

Face à ces sombres perspectives, Paul Vergès évoque la réponse du gouvernement français qui a annoncé un plan d'austérité et un gel des dépenses de l'Etat pour les trois années à venir. "Il s'agira de bloquer au même niveau les recettes sans tenir compte de l'inflation qui, elle, va jouer sur les dépenses. Aussitôt, les syndicats ont réagi en programmant une grève générale le 27 mai. Et ce n'est que le début de l'affrontement" affirme l'ancien président du conseil régional.

Selon Paul Vergès, ce plan de rigueur combiné à la réforme des retraites va avoir des conséquences "décuplées" à La Réunion. "Le déséquilibre du système des retraites par répartition ne fera que s'accentuer ici, compte tenu des donnés démographiques de l'île cumulées avec un poids des actifs qui diminue de plus en plus". L'élu de l'Alliance a également abordé les spécificités de La Réunion : "Ici le problème des cotisants est majeur. 80 % de la population active travaille dans les services. Pour ce qui est de la fonction publique, une sur-rémunération de 30% en est vigueur par rapport à la métropole. Par ailleurs 3 années d'annuités à La Réunion correspondent à 4 années en métropole. Aujourd'hui, 34% des personnes âgées sont au minimum vieillesse, parce qu'ils n'ont pas les annuités nécessaires. Si on ajoute l'horizon de 1 million d'habitants en 2030, au regard des mesures annoncées par le gouvernement et la durée de la crise, la situation va devenir insupportable" estime Paul Vergès.

Le responsable du PCR cite quelques chiffres de l'Insee pour étayer son propos : "1 milliard d'euros de pensions est versé chaque année. 597 millions concernent les retraités de la fonction publique (27 000 personnes) qui perçoivent en moyenne 1 845 euros. Les 400 millions restants vont aux retraités du secteur privé (63 448 personnes) qui touchent en moyenne 580 euros " Pour Paul Vergès, ces deux mondes vont "continuer de s'éloigner".

Pour l'ancien président de Région, il est essentiel de garder en tête les grands enjeux que représentent les futures négociations sur l'octroi de mer, le règlement sucrier et la dotation des nouveaux contrats de fonds structurels de 2013. "Compte tenu du gel des dépenses de l'Etat sur trois ans, tous les éléments sont réunis pour que le situation sociale explose" affirme Paul Vergès. Il insiste sur la nécessité de "saisir toutes les occasions pour faire redémarrer l'emploi et sur la responsabilité considérable des élus locaux dans ce domaine" a-t-il lancé en fustigeant la renégociation des accords de Matignon.

"Il faut que les Réunionnais se rassemblent. Il faut un sursaut face à la crise économique. Sinon le réveil risque d'être plus dramatique qu'en Guadeloupe en février et mars derniers" prévient Paul Vergès. Pour rappel, une grève générale de 44 jours avait débuté en Guadeloupe le 20 janvier 2009, puis s'était étendue à la Martinique. La grève avait paralysé pendant un mois et demi tous les secteurs, privés et publics.

Annabelle Ovré pour
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