Le gouvernement comorien a interdit les reconduites à la frontière des clandestins

Mayotte - Le syndicat de la magistrature appelle à stopper les interpellations

  • Publié le 7 juin 2018 à 14:21
  • Actualisé le 7 juin 2018 à 14:23

Depuis le 21 mars 2018, les Comores ont interdit le retour au pays des clandestins de Mayotte. Ceci est intervenu après la décision du gouvernement français de ne plus délivrer de visa aux Comoriens. Les Comoriens en situation irrégulière faisaient l'objet d'une rétention administrative. Dans ce contexte, selon le syndicat de la magistratures "la préfecture de Mayotte multipliait les demandes de prolongation de rétentions". Or, les rétentions administratives ne sont prolongées qu'en vue d'une reconduction effective à la frontière. Reconduction qui n'est désormais plus possible. Face à cette impasse, le syndicat de la magistrature à Mayotte dénonce "une instrumentalisation de la justice" et appelle à stopper les interpellation de clandestins. Nous publions ci-après le communiqué du syndicat de la magistrature de Mayotte :

Depuis le début de la grève, en février 2018, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande   instance   de Mamoudzou   a   été saisi  à plus   de  sept   cent   reprises   par   la   préfecture   pour prolonger  la  rétention  de  personnes  étrangères  se  trouvant en  situation  irrégulière   et  retenues  au centre de rétention administrative.

Les décisions de ce magistrat donnent lieu à un rejet systématique de la requête puisque la loi française   n'autorise   la prolongation   de   la   rétention   administrative   qu'aux   fins   de   permettre   une reconduction   effective à la   frontière   dans   un   délai raisonnable.  Or,   les   autorités   comoriennes refusant depuis plusieurs semaines d'accueillir leurs ressortissants expulsés par la France, aucune perspective d'éloignement n'apparait envisageable.

Cette situation correspond sans aucun doute à une instrumentalisation de l'institution judiciaire par les autorités de l'Etat, qui ne sont jamais présentes ni représentées aux audiences du juge des libertés   et   de   la   détention   et   ne   font   jamais   appel de   ces   décisions   de   rejet.   Les   autorités préfectorales, contraintes de conduire une politique du chiffre, ne veulent en réalité pas prendre la responsabilité de libérer elles-mêmes les personnes placées en rétention.

Le syndicat de la magistrature s'indigne de ces pratiques des autorités préfectorales consistant à se   défausser   de   leurs   responsabilités   derrière   un   magistrat   qui   sera   immanquablement   taxé de laxisme alors qu'il ne fait qu'appliquer la loi.Il   est   vain,   en   l'état   actuel   des   relations   avec   les   Comores,   de   continuer   la   politique d'interpellation   des   personnes   étrangères   en   situation   irrégulière   puisque   celles-ci   seront immanquablement libérées. Continuer à agir ainsi revient à tromper la population mahoraise en leur faisant croire que de cette manière l'Etat lutte contre l'immigration illégale.

Le syndicat de la magistrature observe enfin que cette politique entraîne un véritable gâchis de moyens humains et financiers puisque policiers, greffiers, avocats et magistrats sont contraints de travailler sans relâche pour une efficacité inexistante. L'aide juridictionnelle accordée aux étrangers et   la   prise   en   charge   des   personnes   retenues à l'occasion   de   ces   recours   vains   ont   un   poids importants   pour   le   budget   de   la   justice   et   donc   de  l'État.   Ces   moyens   pourraient   être   beaucoup mieux employés.

Le   syndicat   de   la   magistrature   réclame   par   conséquent   l'arrêt   immédiat   de  cette   politique délibérément trompeuse, inefficace et contre-productive.


La Section mahoraise du Syndicat de la Magistrature

Mise en ligne le 07/06/18 à 12h02. Actualisé à 14h21

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