Les seniors davantage taxés

Complémentaires santé : le reste à charge zéro fait exploser les cotisations

  • Publié le 13 novembre 2018 à 02:58
  • Actualisé le 13 novembre 2018 à 06:15

Avec la réforme du reste à charge zéro, certains frais de prothèses dentaires et auditives, ainsi que l'optique, seront intégralement remboursés. Le coût de la réforme est évalué à 1 milliard d'euros par an : 750 millions pour la Sécurité sociale et 250 millions pour les mutuelles. Cela entraînera de fait une flambée des prix des mutuelles et des complémentaires santé. Les seniors devraient être davantage taxés que les autres assurés, du fait de leurs besoins en soins plus onéreux. Sauf que ce n'était pas le scénario annoncé au départ. Hubert Gorron, directeur de la Mutuelle CCMO, explique à Imaz Press comment un autre modèle aurait permis d'éviter la hausse.

Depuis quelques années, le transfert de charges de l’assurance maladie vers les complémentaires santé sont de plus en plus fréquents. Et donc coûteux pour les assureurs et les mutuelles. Avec la réforme du reste à charge zéro sur les prothèses dentaires et auditives et sur l'optique, la perspective d’une hausse conséquente de la cotisation se fait de plus en plus certaine. Pourtant, à l'origine de la réforme, aucun surcoût ne devait concerner l'assuré, selon le Ministère de la Santé. Mais une étude, publiée fin octobre, démontre sans doute possible la hausse des cotisations. 

La réforme, une avancée sociale qui a un coût

La réforme doit donner à tous les Français un accès à des soins pris en charge à 100% dans le domaine de l’optique, du dentaire et de l’audioprothèse. " Sur ces trois secteurs, le reste à charge est très important, explique Hubert Gorron, directeur de la Mutuelle CCMO, présente en Picardie et à La Réunion. Pour cette raison une personne sur cinq renonce à des prothèses dentaires et une personne malentendantes sur trois refuse de se faire appareiller. En effet, c’est sur les audioprothèses que le reste à charge est le plus élevé, environ 57%". De ce fait, le reste à charge zéro, qui sera appliqué progressivement d’ici à 2021, est plutôt une bonne chose.

Hubert Gorron n'en disconvient pas : "La réforme est une avancée sociale mais aura de grosses conséquences sur les coûts et l’équilibre global du budget des complémentaires santé. Cela nous contraint à appliquer une politique moins sociale qu’on ne le voudrait."

9% de plus pour les 60 ans et plus

En effet, selon la première étude publiée, le reste à charge zéro ne peut qu'encourager l'augmentation des cotisations des complémentaires santé.  "Et les adhérents qui vont trinquer, ce sont les populations les plus fragiles", s'indigne le directeur de la CCMO. Parmi ces précaires, les personnes de plus de 60 ans qui devraient voir leurs cotisations augmenter de 9% alors que les adhérents plus jeunes ne subiront qu'une augmentation de 4,8%.

La distinction par l'âge, qui s'éloigne du slogan bien connu "chacun paye selon ses moyens et reçoit selon ses besoins" est une notion nouvelle, surtout pour les mutuelles. La meilleure solution n'aurait-elle pas été d'augmenter légèrement toutes les cotisations et de lisser de manière équitable ?

"C'est tout à fait vrai, reconnaît Hubert Gorron. Tenir compte de l'âge est un principe un peu contre nature pour une mutuelle comme la nôtre, mais nous nous retrouvons en concurrence avec des assurances privées. Si les mutuelles choisissent d'harmoniser les cotisations de manière équitable entre les adhérents, les plus jeunes se dirigeront vers les assureurs qui tiennent compte de l'âge. Donc nous n'avons pas le choix au risque de perdre une grande part de nos cotisants, ce qui déséquilibrerait nos comptes."

Pousser à la consommation pénalise

Pour Hubert Gorron, il aurait mieux valu laisser les mutuelles proposer des packs plutôt que d'imposer des process très standardisés : "Chaque adhérent devrait pouvoir choisir ce qu'il met dans son pack en fonction de ses besoins et bénéficier d'un tarif adapté à ses besoins réels".

Par exemple, alors que les complémentaires santé sont tenues de rembourser un forfait optique et monture tous les deux ans, cela doit-il être la norme ? Hubert Gorron plaide pour une offre plus diversifiée : "Tout le monde n'a pas besoin de changer ses verres tous les deux ans, ni sa monture. Ce système pousse à la consommation et au final ce sont tous les cotisants qui paient."

La prévention, source d'économies

Pour le directeur de la CCMO, toute la réglementation qui pénalise les complémentaires santé augmentent les frais de fonctionnement et les transferts de charges. "On fera tout ce qu'on peut pour ne pas finir en système à l'américaine où seuls les riches peuvent se soigner", conclut-il. Avec prévention en mot clé : privilégier les informations données par un médecin sur une ligne téléphonique dédiée pour limiter les consultations, opter pour des garanties prévoyance "maladies redoutées" pour financer les médicaments très coûteux afin de ne pas pénaliser la majeure partie des adhérents non concernés par ces maladies...

ml/www.ipreunion.com

 

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1 Commentaires
Jiudix
Jiudix
5 ans

L'enfer est pavé de bonnes intentions.