Mobilisation

1er mai historique à La Réunion et en Métropole mais pas pour les mêmes raisons

  • Publié le 3 mai 2019 à 05:00
  • Actualisé le 3 mai 2019 à 06:15

Les syndicats avaient promis un 1er mai exceptionnel, la surannée expression " convergence des luttes " était sur toutes les lèvres, l'idéologie marxisme, de nouveau dans l'air du temps. Mais peut-on leur jeter la pierre ? Les syndicats, en perte de vitesse depuis plusieurs années, ne fédèrent plus, c'est un fait. Les Gilets jaunes, ça a dû être une sacrée claque pour eux. Un mouvement citoyen a réussi là où eux échouent depuis bien longtemps : une mobilisation forte et franche. Les syndicats se sont donc dits qu'ils pourraient bien inviter les gilets jaunes à se joindre au traditionnel défilé du 1er mai, plus on est de fous, plus on rit. À La Réunion, une vague rouge tachetée de jaune a déferlé dans les rues du Port, un succès. À Paris, par contre, rien ne s'est passé comme prévu. Ça a foiré dans les plus grandes largeurs, résultat des courses, les syndicats métropolitains se sont fait sucrer leur 1er mai...

La Réunion, le modèle de la convergence des luttes

17 ans que ça n’était pas arrivé. 17 ans que le traditionnel défilé du 1er mai n’avait pas slalomé dans les rues du Port, le berceau du syndicalisme à La Réunion. Et la CGTR à l’initiative de cette délocalisation a mobilisé ses militants en masse. On a vu du rouge, du rouge et encore du rouge mais pas que… La FSU était de la partie, des syndicats enseignants, des activistes pour le climat, des retraités, des fonctionnaires, des Gilets jaunes et même des anarchistes, c’est bien la première fois !

La convergence des luttes était bien de mise sur l’île. Cela faisait longtemps que La Réunion n’avait pas vu défiler plus d’un milliers de personnes le 1er mai. Ambiance festive et familiale, aucun débordements… Seule ombre au tableau, le manque de cohérence des syndicats qui appelaient à une convergence des luttes sans être capables de mettre leurs différends de côté pour manifester ensemble.

En Métropole, tout le contraire 

Le 1er 2019 restera historique pour les organisations syndicales métropolitaines mais pas pour de bonnes raisons.

Un an plus tôt, un millier de black blocs avaient semé la zizanie lors du défilé du 1er mai. Ces militants anticapitalistes vêtus de noir et non identifiés proche d’une idéologie d’ultra gauche se joignent aux manifestations " classiques " pour s’en prendre aux symboles du capitalisme. Dégradations, débordements, affrontement avec les forces de l’ordre, le 1er mai 2018 avait mal tourné.

On aurait pu penser que les syndicats, totalement dépassés en 2018, n’auraient pas refait la même erreur un an plus tard. Raté, le 1er mai 2019 a une fois de plus défrayé la chronique. Mais après 25 actes des Gilets jaunes marqués régulièrement par des débordements, on finirait presque par ne plus s’étonner de voir des affrontements entre forces de l'ordre et manifestants. 

Un événement marquant

Mais cette fois, on a encore franchi un cap. L’événement marquant de ce 1er mai 2019, qui a l’heure actuelle fait encore couler beaucoup d’encre, c’est cette intrusion à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière en marge de la manifestation du 1er mai à Paris. Une certaine confusion règne quant aux circonstances exactes des faits.

Deux versions :

La première, une cinquantaine de manifestants agressifs auraient tenter de pénétrer dans le service réanimation chirurgicale de l’hôpital. Ils auraient été arrêtés par des membres du personnel hospitalier. Une irruption qualifiée d’ "attaque " par le gouvernement et la direction de l’établissement.

L’autre version, ce seraient des manifestants, qui, pour échapper aux affrontements entre forces de l’ordre et black blocs qui faisaient rage à l’extérieur notamment au nuage de gaz lacrymogène qui enveloppait les lieux, se seraient réfugiés dans l’établissement hospitalier. Une version soutenue par des soignants qui ont qualifié la situation de " non violente " et ont expliqué n’avoir vu " aucune agressivité " de la part de ces personnes.

Une enquête a été ouverte pour tenter de démêler le vrai du faux. Quoi qu’il en soit, que des manifestants mal intentionnés ou pas se retrouvent dans un hôpital en marge d’un défilé du 1er mai est une grande première.

Une tentative de déstabilisation du gouvernement ?

Ce défilé du 1er mai, au delà des heurts entre forces de l’ordre et black blocs, une violence qui nous émeut de moins en moins, il y a l’attitude du gouvernement. Deux jours avant la fête du travail, Christophe Castaner était en boucle " entre 1000 et 2000 black blocs sont attendus à Paris. " Selon le ministre de l’Intérieur, ces black blocs appelaient, sur les réseaux sociaux, à transformer Paris en " capitale de l’émeute ". Le président de la République prônait la tolérance zéro. Le dispositif de sécurité était renforcé, 7400 membres des forces de l’ordre était mobilisés dans le chef-lieu.

Finalement, il n’y aurait eu qu’entre 200 et 300 black blocs sur place. Le gouvernement a-t'il volontairement fait planer la menace de potentiels débordements pour dissuader des manifestants de venir ? Le défilé du 1er mai est traditionnellement un moment familial, quand le ministre de l’Intérieur martèle à qui veut bien l'entendre que des radicaux d’ultra gauche seront de la partie, ça vous fait rapidement passer l’envie d’y emmener vos marmailles.

Et si tout cela n’était qu’une opération de communication de l’exécutif pour que ce défilé du 1er mai sur le thème de la convergence des luttes ne draine pas trop de monde ? Ce qui serait un nouvel aveu d'échec quelques jours après les annonces du président censées mettre fin à la crise des Gilets jaunes.

Des débordements, il y en a eu

Si les black blocs étaient beaucoup moins nombreux qu’annoncé, des heurts ont éclaté entre eux et les forces de l’ordre avant même le démarrage du défilé. Un nuage de gaz lacrymogène enveloppait Montparnasse. Là encore, une image qui devient presque banale.

Sauf que cette fois, les forces de l’ordre sont allées au contact. Matraquant tout ce qui se trouvait sur leur passage. Leur faute ? Oui et non, surtout la faute de l’État qui, semaine après semaine leur fait faire le sale boulot. Car ces mobilisations, violentes ou pas sont le fruit d’un goût amer de " pas assez " qui reste en bouche aux Gilets jaunes. Un désengagement de l’État qui n’annonce que des mesurettes quand eux, ont de réelles attentes et des revendications fortes.

Emmanuel Macron et sa stratégie du pourrissement

Car les forces de l’ordre, même si rien ne peut excuser ou expliquer les bavures, sont devenues la cible de certains manifestants. Évidemment, des brebis galeuses, il y en a. Mais il ne faut pas généraliser et jeter l’opprobre sur une corporation entière, surtout quand ces membres ne sont pas forcément mieux lotis que ceux qui manifestent. 

À croire que c’est ce que cherche le gouvernement. Monter les Français les uns contre les autres. Chaque semaine, il y a des débordements, d’un côté comme de l’autre. L’État regarde ailleurs, mais jusqu’à quand ?

Certains Gilets jaunes s’en prennent aux forces de l’ordre. Certains policiers ou gendarmes dépassent les limites, utilisant des moyens totalement disproportionnés, s’en prenant aux manifestants, à la presse, faisant preuve d’une violence rare. Les commerçants sur les itinéraires des marches des Gilets jaunes ferment boutique, de peur de voir leur gagne-pain vandalisé et comprennent en moins en moins le mouvement citoyen. Un véritable imbroglio où tout le monde s’en prend à tout le monde. Jusqu’à quand ?

Ce 1er mai 2019, un succès pour les organisations syndicales métropolitaines

Malgré cela, quand les syndicats hexagonaux font le bilan de la journée, on entend ça :" c’était une grande journée de mobilisation " se réjouissait Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Une grande journée de mobilisation ? Philippe Martinez a dû être exfiltré, trop de gaz lacrymogène a-t-il expliqué, il a ensuite accusé la police d’avoir " chargé la CGT ". On est loin du militantisme syndical de la deuxième guerre mondiale, loin du courage de ces syndicalistes, prêts à mourir pour leurs idéaux qui intégraient la résistance. En 2019, les leader syndicaux préfèrent aller se cacher quand ça dérape. Joli et très courageux, surtout quand on est l'organisateur de l'événement... 

Pendant ce temps-là, les syndicalistes de la FSU, après vu les premiers heurts éclater, se sont carapatés. Ni une, ni deux, ils ont pris la tangente sans même se retourner. Depuis, plus de nouvelles !

Et après, les syndicats s’étonnent de voir le nombre d’adhésions fondre comme neige au soleil et expliquent ne pas comprendre la crise de confiance. Pire, ils ont l’audace de se vanter, de dire qu’il y a eu une vraie convergence des luttes ce 1er mai 2019, que les gilets jaunes se sont ralliés à leur cause, évidemment, les débordements sont passés sous silence.

On était pourtant bien loin de l’exemplaire - sans vantardise - défilé du 1er mai réunionnais. Vraiment très loin. 

fh/www.ipreunion.com

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