Les syndicats menacent, le recteur rassure

Bac perturbé ou pas : la grande incertitude

  • Publié le 14 juin 2019 à 10:04

L'intersyndicale se dit "dos au mur", en se lançant dans cette grève de la surveillance le jour de l'épreuve de philosophie, les enseignants hostiles à la politique du gouvernement sur le volet éducation, jouent leur dernière carte. Ils comptent frapper fort et obliger le ministre de l'Éducation nationale si ce n'est à renoncer, au moins à rouvrir le dialogue social. Mais face à eux, Jean-Michel Blanquer ne se démonte pas, il garde le cap affirmant que malgré la menace qui plane "les épreuves du baccalauréat se dérouleront normalement". Cet appel à la grève est suivi localement, après un tour des forces en présence, un constat : on ne connaît toujours pas l'impact qu'aura cette grève pour les 12 592 candidats au baccalauréat de l'Académie de La Réunion. (photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Qui en est ? 

La philosophie, c’est l’épreuve qui ouvrira les hostilités ce lundi 17 juin et elle pourrait bien être perturbée. Dans quelle mesure, c’est la grande inconnue…  Si au niveau national, onze syndicats appellent à la mobilisation, au niveau local, c’est un peu plus flou. "On ne s’est pas vraiment coordonnés, c’est plus unitaire au niveau national" admet Jérôme Motet, le vice-président académique du Snalc (Syndicat national des lycées et collèges).

Malgré cela, la détermination est bien là "cette grève le jour de l’examen, c’est notre ultime arme pour nous faire entendre, nous voulons un sursaut politique. Le gouvernement a fait passer ses réformes en force, contre l’avis des partenaires sociaux, nous en avons ras-le-bol de la non-écoute des pouvoirs publics. "

Jérôme Motet regrette aussi que malgré les actions régulières des syndicats contre la réforme du lycée ces derniers mois, rien n’ait bougé "cette réforme du lycée n’est qu’une excuse pour supprimer des postes, les élèves vont perdre en qualité d’enseignement et et notre métier va se précariser encore un peu plus".

Le syndicaliste, pourtant séduit par le plan de communication du gouvernement au début est passé de "désillusion en désillusion", il précise qu’à la rentrée prochaine, 53 équivalents temps plein dans le secondaire seront supprimés "on enterre l’éducation nationale, on enterre le service public, on n’a jamais vu une politique aussi libérale et budgétaire" s’indigne-t-il.

Cette grève va-t-elle vraiment perturber le déroulé des examens ? 

Un état des lieux que partage Victor Rodriguez, le secrétaire académique du Snes-Fsu (Syndicat national des enseignements de second degré). À l’heure actuelle, le syndicaliste ne s’avance pas sur l’impact que pourrait avoir la grève sur l’épreuve de philo "il y a quelques jours, nous avons posé une question à nos adhérents ‘êtes-vous prêts à faire grève le jour de la surveillance du bac et du brevet’, 80% d’entre eux ont répondu favorablement".

Mais suivront-ils tous le mouvement ? Car aujourd’hui, force est de constater qu’il est difficile pour les syndicats enseignants de mobiliser les troupes, c’est donc un grand point d’interrogation qui plane sur cette épreuve de philo "on ne connaît pas le nombre de collègues qui seront convoqués pour surveiller les épreuves du baccalauréat, il nous est donc difficile de savoir à l’avance le nombre de grévistes et l’impact qu’aura la mobilisation".

Et les élèves dans tout ça ? 

Victor Rodriguez espère que le mouvement sera bien suivi. Quand on lui demande s’il n’a pas l’impression de mettre ces plus de 12 500 candidats au bac en porte-à-faux, sa réponse est claire "on ne veut pas détruire le bac au contraire, on veut le conserver, qu’il reste un diplôme national. Aujourd’hui, nous n’avons pas d’autre choix, c’est terrible mais c’est comme ça" explique-t-il. "De plus, je pense que l’institution pourrait faire repasser une épreuve si cela est nécessaire, c’est déjà arrivé " poursuit-il. 

Et encore, si la grève a lieu... Car pour le syndicaliste, il est encore temps de reculer. "Si Jean-Michel Blanquer rouvre le dialogue, fait un moratoire sur la réforme du lycée, la loi dite de l’école de la confiance, la loi de transformation de la fonction publique et les salaires, je suis persuadé que nous ne serons pas obligés d’en arriver à la grève". 

Des parents d'élèves fermement opposés à cette grève

Les parents d’élèves, eux, sont consternés que l’idée d’une grève le jour de l’examen ait pu germer dans la tête des enseignants "je suis agacé et en colère, comment peuvent-ils jouer ainsi avec l’avenir de nos enfants ? Les prendre en otages au motif de faire pression sur le gouvernement" s’emporte James Huet, le président départemental de la fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (Peep). Le père de famille ne redescend pas "cette réforme du bac était attendue, enseignants et parents d’élèves étaient d’accord sur le fait qu’il fallait dépoussiérer cet examen. Le gouvernement l’a fait, sans doute un peu rapidement mais il l’a fait…" 

James Huet se dit "hostilement contre" la grève du 17 juin "le plus aberrant, c’est que les jeunes qui passent le bac ne sont même pas concernés par cette réforme. On ne touche pas au bac, un point c’est tout. Je suis catégorique. Bien sûr, il faut qu’un consensus soit trouvé entre les syndicats et le gouvernement mais cela ne soit en aucun cas avoir un impact sur nos enfants. "

Le président de la Peep est excédé sur le principe mais il reste confiant sur la bonne tenue de l’examen "je sais que le rectorat met tout en œuvre pour que le baccalauréat ait lieu dans de bonnes conditions".

Le rectorat paré pour faire face

Effectivement, Vêlayoudom Marimoutou, le recteur se veut rassurant "nous avons anticipé, les chefs d’établissement sont des gens aguerris, et nous avons mis en place les dispositifs pour accueillir l’ensemble des élèves normalement ce lundi."

Pour le recteur - lui aussi dans le flou quant à l’impact que pourrait avoir la mobilisation - il faut éviter toute anicroche "je ne vais pas faire de spéculation sur l’intensité de ce mouvement mais nous, en tant qu’Académie, nous avons pris toutes les dispositions pour accueillir tranquillement et normalement les élèves pour qu’ils puissent passer leurs épreuves avec un nombre de surveillants suffisant. Dans les lycées on a surbooké le nombre de surveillants en faisant appel à tous les personnels possibles et je pense qu’il n’y aura pas de problème particulier concernant les déroulements d’épreuves. "

Le recteur reste dubitatif quant aux motivations des syndicats enseignants alors que les réformes ont été adoptées par l’Assemblée nationale et le Sénat "je trouve vraiment stupide de rajouter de l’anxiété chez ces élèves qui ont la joie et le plaisir de clore ce chapitre avant d’en commencer un autre, il y a d’autres manières de faire."

Dans l'expectative... 

Ce que redoute le plus Vêlayoudom Marimoutou, ce sont surtout les blocages d’établissements, une mesure a été prise pour éviter cela mais le recteur ne souhaite pas dévoiler ces cartes. Cette mesure exceptionnelle montre qu’il y a bien une appréhension du côté de l’Académie. Pour le moment, cette grève de la surveillance au bac reste une grande inconnue…

fh/www.ipreunion.com/redac@ipreunion.com 

guest
1 Commentaires
Mano
Mano
4 ans

Dommage....une forme de justice populaire et comd'hab, ce sont les innocents qui paient...au fait pourquoi est-ce-que semblet-il la CFDT n'adhère pas à cette grève....