
Les premiers signalements remontent à 2020. A l’époque, des salariés s’entretiennent avec l’Aide aux entreprises pour améliorer les conditions et la qualité de vie au travail des salariés (Aract) à la sortie du confinement, pour alerter, justement, sur leurs conditions de travail. Aucune amélioration concrète n’est cependant apportée.
C’est début 2021 que l’Union régionale 974 s’empare du dossier. Dès février 2021, la médecine du travail alerte sur "les risques psychosociaux" au sein de l’association. Un cabinet en ressources humaines intervient auprès des salariés, et préconise la réalisation de fiches de poste, un règlement intérieur, afin de structurer l’organisme. "Nous sommes en décembre et toujours dans l’attente" note l’UR 974.
- Burn-out et inquiétudes -
Le syndicat alerte de son côté la CINOR, qui subventionne l’OTI, sur le cas de "plusieurs salariés qui souffrent et d’autres détruits par ces techniques managériales anxiogènes subies depuis plus de deux ans déjà (des nombreux arrêts maladie et accidents de travail sont constatés)".
"C’est la première fois où on se retrouve en incapacité totale de travailler " confie Catherine Glavnik, employée depuis 20 ans à l’OTI. Victime d’un burn-out en 2021, cette dernière est restée cinq mois en arrêt maladie, pointant de doigt une impossibilité de réaliser son travail. "Ca fait trois ans qu’il n’y a plus d’actions qui mettent en avant nos partenaires touristiques, nous sommes en incapacité de proposer des actions à nos prestataires, qui forcément doivent s’éloigner de nous" détaille-t-elle.
Contacté, un de ces prestataires, Geoffrey Leduc des Aventuriers de l'est, confirme une dégradation graduelle du partenariat. "L'OTI a été notre premier partenaire institutionnel en 2016, nous avons réalisé de nombreux projets ensemble. Mais depuis 2019, à la suite du changement de direction, la situation s'est peu à peu dégradée, avec des projets entamés mais jamais terminés" explique-t-il.
"L'OTI n'est plus un acteur incontournable de la zone nord, nous développons donc nos prestations sans lui, nous lui adressons nos nouveautés par courtoisie mais sans attendre de résultat" ajoute-t-il. Il précise par ailleurs qu'en 2019, l'Association Réunionnaise des Guides et Accompagnateurs Touristiques s'est réunie pour présenter une dizaine de propositions de visite à l'OTI. Des propositions restées sans réponse.
Même son de cloche du côté de Roméo Egippa, guide touristique qui travaillait depuis 2014 avec l'OTI nord. "Il était l'OTI phare de l'île, aujourd'hui il est impossible de travailler avec, depuis trois ans plus aucun projet n'abouti pour de nombreux prestataires" confie-t-il. Son produit, une visite de la rue de Paris, a été supprimé du jour au lendemain. "L'argument avancé est que je n'ai pas le diplôme officiel, mais étant auto-entreprenneur il ne m'est pas nécessaire, je travaille avec la mairie de Saint-Denis, l'IRT, le Département...Et pourtant aucun échange n'a été possible avec la direction, malgré toutes ces années de partenariat" regrette-t-il.
- Des subventions en baisse -
"J’ai honte aujourd’hui de travailler pour l’OTI, cela fait 20 ans que je suis là, j’ai même été directrice par intérim, et nous avons toujours rendu des bilans corrects, on a toujours été réglo avec les subventions qui nous sont allouées, et aujourd’hui je me retrouve impuissante en tant que cheffe de pôle production, je n’arrive plus à travailler, nous n’avons même plus de site internet" liste-t-elle. "Je suis inquiète pour l’avenir de l’association, pour le futur des employés" souffle-t-elle.
Les subventions pour l’année 2022 ont par ailleurs été baissées, assurent les employés. Un audit a aussi été demandé, provoquant l’inquiétude. "Nous n’avons aucun véritable bilan, aucun plan d’action" notent-ils. En juillet 2019 déjà, suite à un audit de l’Office de tourisme de France, l’OTI a perdu ses avancées pour obtenir le label "Qualité tourisme". Sur trois pages de rapport, une demie-page est consacrée aux points forts. Le reste liste tous les points "sensibles", notant au passage qu'un "avis défavorable sans possibilité de rattrapage" a été décidé. "Le travail à fournir représente un travail de plus de six mois pour être efficace, opérationnel et utile" souligne le rapport.
Désormais, l'UR 974 craint un arrêt total des subventions si aucune action n'est entreprise. "On ne peut pas se présenter avec un bilan vide et espérer toucher des subventions financées avec de l'argent public" souligne-t-elle.
- Une plainte pour harcèlement envisagée -
Une ancienne employée a par ailleurs décidé de témoigner, auprès de la CINOR via l’UR 974. Elle dénonce, dans un courrier, des "agissements et des propos virulents et blessants. Je me suis sentie humiliée au quotidien, je venais travailler tous les jours avec la boule au ventre, je rentrais chez moi tous les soirs les yeux plein de larmes" énonce-t-elle. Elle assure avoir assisté à des scènes "d’intimidation, d’humiliation et de dénigrement".
En contrat professionnel pour trois ans, elle finit par quitter son poste après seulement deux ans. L’UR 974 réfléchit désormais une plainte pour harcèlement moral à l’encontre de la direction.
Suite au débrayage réalisé dans la matinée, un comité de pilotage est attendu jeudi pour tenter de trouver une solution à cette situation. Contactées, la CINOR ainsi que la direction de l’OTI n’ont pour l’heure pas donné suite à nos sollicitations.
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