Bientôt un travail de revégétalisation

Incendie du Maïdo : la faune et la flore endémiques ont échappé au pire

  • Publié le 21 novembre 2020 à 16:19
  • Actualisé le 21 novembre 2020 à 16:27

Alors que l'incendie du Maïdo est désormais considéré comme maîtrisé avec 181 hectares brûlés, il va être l'heure de tirer un bilan de l'impact sur les espèces endémiques de cet espace protégé et classé au patrimoine de l'Unesco. Alors que la faune et la flore locales semblent avoir été sauvées de justesse, un gros travail de replantage et d'arrachage de plantes invasives devra être effectué pour assurer leur pérennité. Le Conseil départemental a de son côté d'ores et déjà annoncé une enveloppe de 700.000 euros pour la réhabilitation du site. (Photo rb/www.ipreunion.com)

"Les zones les plus précieuses ont été épargnées", rapporte, soulagé, Jean-Philippe Delorme, directeur du Parc national de La Réunion. Le Maïdo, ravagé par les flammes depuis le vendredi 6 novembre au soir et maîtrisé depuis le 19 novembre, est protégé et inscrit au patrimoine naturel de l'Unesco. La faune et la flore endémiques semblent sauvées mais "ça reste encore difficile de connaître précisément les dégâts", nuance le directeur.

Ces zones "les plus précieuses", ce sont celles aux portes du Maïdo : celles du Grand Bénare et du Petit Bénare où de nombreuses espèces endémiques résident. "Le SDIS (Service départemental d'incendie et de secours) a réagi vite et mis les verrous rapidement", estime Jean-Philippe Delorme. Plus de 33 tonnes de retardant ont été dépêchées à La Réunion, pour contenir le feu et éviter qu'il ne se propage dans un premier temps. Les pompiers avaient dû mettre en place une ligne humaine pour le cerner. Ils ont ensuite arrosé abondamment les lisières et creusé des rigoles autour des points chauds pour éviter une reprise du feu.

Ce jeudi 19 novembre 2020, la préfecture a annoncé que l'incendie au Maïdo était désormais considéré comme étant maîtrisé, il ne progresse plus, la surface impactée est stable et il n'y a plus de flammes. 181 hectares de végétations ont finalement brûlé. Les renforts nationaux arrivés le 11 novembre sont donc désengagés et repartiront en Métropole en début de semaine prochaine.

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- Phelsuma, branle vert, et pétrel -

Le lourd travail des soldats du feu a permis en partie la protection du phelsuma, cette espèce de lézard vert appelé aussi "lézard de Bourbon". S'il est trop tôt pour établir un diagnostic sur l'impact de l'incendie sur cette espèce, Jean-Philippe Delorme se veut rassurant quant à sa survie par rapport aux incendies de 2010 : "tous les adultes avaient péri, seuls les œufs avaient survécu" se souvient-t-il. Un contexte qui n'a rien à voir.

Ce soulagement est partagé par Christian Léger, président de la Société d'études ornithologiques de La Réunion (SEOR), qui remarque que "les pétrels sont pour l'instant épargnés", leurs terriers étant placés à plus haute altitude. "Mais les flammes et les odeurs ont peut-être perturbé la période de reproduction, ce qui serait dramatique", ajoute l'ornithologue, précisant que le bilan devra aussi se porter sur les oiseaux forestiers (tec tec, oiseau vert, oiseau blanc). "Mais ça sera plus dur à établir, il est difficile de rencenser exactement leur population". 

Côté flore, le constat est plus radical : tamarin, fleur jaune, branle vert. Des espèces endémiques à La Réunion qui ont été ravagées par les flammes mais dont la survie n'est pas nécessairement menacée. Le "vrai enjeu, c'est l'après incendie", soutient le directeur du Parc national.

- Agir avant la saison des pluies -

Parmi les plantes brûlées, "il y a beaucoup d'espèces exotiques et autres espèces invasives, comme l'ajonc d'Europe", continue Jean-Philippe Delorme. "A l'occasion d'un incendie, les graines se retrouvent dispersées facilement pour fertiliser le sol rapidement. L'enjeu va être de les contrecarrer pour assurer le développement des espèces endémiques qui évoluent moins vite".

"Le risque n’est pas qu’elles disparaissent rapidement mais progressivement si rien n’est fait et si d’autres incendies reviennent", complète Sébastien Clément, paysagiste et directeur de l'école Jardin planétaire, qui évoque également la menace d'une fertilisation plus rapide avec l'arrivée de la saison des pluies. Un arrachage immédiat des plantes devra être fait pour empêcher le développement des plantes invasives. "Dès que ça fait 20-30 centimètres, la racine est déjà profonde et problématique."

- "L'effort sera considérable" -

Fleurs jaunes, ambaville, petit Tamarin des hauts, branles verts et branle banc, tamarins des Hauts, calumet bambous : toutes ces espèces endémiques feront l'objet d'un diagnostic, afin de connaître les plantes impactées. "Il y a toujours un appauvrissement de la biodiversité lors d'un incendie" regrette d'ailleurs Sébastien Clément, qui rappelle que "c'est grâce à toutes ces espèces endémiques que La Réunion est classée au patrimoine mondial de l'Unesco".

Mercredi 18 novembre 2020, le Conseil départemental annonçait qu'un budget de 700.000 euros avait été adopté en commission permenante pour la réhabilitation du site, qui débutera dès 2021. Un plan "post-incendie" a par ailleurs été voté, incluant la reconstitution des milieux naturels dégradés, l’ouverture du belvédère pour l'accueil du public et le rétablissement de l'accès au sentier de Roche Plate pour désenclaver l'îlet.

D'autant plus que ce travail de sauvetage des plantes s'annonce long et périlleux pour que l'écosystème retrouve un équilibre naturel. "Ça se fera au moins sur une génération" précise le paysagiste qui se plaît à citer la phrase du botaniste Francis Hallé : "il faut sept siècles pour créer une forêt primaire". Traduction : après l'incendie, "l'effort sera considérable".

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1 Commentaires
Mayaqui, depuis son mobile
Mayaqui, depuis son mobile
3 ans

Faut également se méfier de L'érosion après les feux , un sacré programme .....