Très mauvaise saison

Entre 10 et 15 baleines (à peine) recensées cette année à La Réunion

  • Publié le 12 septembre 2021 à 02:59
  • Actualisé le 12 septembre 2021 à 07:13

C'est une déception pour Globice et pour les amoureux des baleines : cette année les géantes des mers se sont faites très rares. L'association a recensé entre 10 et 15 individus différents seulement pour cette saison, qui est donc particulièrement mauvaise. Si un couple mère-baleineau continue de faire le show au large de Saint-Gilles, il s'agit des rares baleines visibles cette année. La faute, peut-être, au réchauffement climatique. Tout l'hémisphère Sud semble avoir souffert cette année d'une faible fréquentation. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

262 baleines identifiées en 2018 contre... une dizaine cette année. "La saison a été très mauvaise" concède Jean-Marc Gancille, responsable sensibilisation de l'association Globice. En trois ans, la fréquentation des géantes des mers s'est considérablement amenuisée. Ce qui ne veut pas dire pour autant que la baisse va continuer au fil des ans, mais il faut le reconnaître : les baleines ont été très (très très) discrètes cette année.

A noter qu'il s'agit uniquement d'individus nouveaux, aucune "recapture" (identification d'animaux déjà identifiés par le passé, ndlr) n'a été faite cette année. Mais face à cette saison franchement mauvaise, impossible (à nouveau) de poser les balises Argos, censées suivre la migration des baleines, sur le chemin du retour vers l'Antarctique. "Après un trop faible nombre de cétacés en 2019 - seule une balise avait pu être posée sur la baleine Ousanousava, ndlr - puis la crise sanitaire en 2020, voilà que nous devons encore différer le projet" se désole Jean-Marc Gancille. Aspect financier oblige, il ne sera pourtant pas possible de décaler l'étude éternellement.

- Les couples mère-baleineau majoritaires -

Entre 10 et 15 baleines observées en 2021, des données qui sont encore en-dessous des chiffres retenus en 2015 et 2016, années réputées mauvaises avec respectivement 27 et 25 baleines recensées. Les dernières photos de caudales prises et reçues par l'association sont en cours d'analyse, mais le bilan ne devrait pas changer beaucoup, "sauf arrivée tardive d'autres baleines mais ce serait totalement inhabituel" note le responsable. Il est déjà arrivé cependant par le passé que des baleines restent jusqu'en novembre.

"Nous avons reçu très peu de photos de caudales, avec notre programme de photo-identification. C'est une saison très atypique, avec des individus furtifs" note Jean-Marc Gancille. Les couples mère-baleineau ont été très majoritaires, représentant environ deux tiers des observations faites pour quelques rares mâles, "en tout cas pas des combattifs". Les hydrophones déployés par l'association permettent également de confirmer la présence de quelques mâles, bien cachés, mais dont les chants résonnent à travers l'océan.

Actuellement un couple mère-baleineau reste encore visible au large de Saint-Gilles. "Cela fait trois semaines environ qu'on peut les voir, avec un petit baleineau très démonstratif, qui fait beaucoup de sauts." Dernière observation en date : deux mâles, aperçus près de Saint-Leu par un club de plongée.

"Attention, ce n'est pas parce qu'on voit des baleines tous les jours pendant trois semaines qu'il y a beaucoup d'individus dans nos eaux... là en l'occurrence il s'agit du même couple mère-baleineau. D'où l'intérêt de la photo-identification" rappelle le responsable sensibilisation de Globice.

- Quels éléments d'explication ? -

Comme toujours, difficile de savoir dans l'immédiat ce qui peut expliquer une aussi faible fréquentation. "On va bosser sur nos modèles, intégrer de nouvelles variables. Notre modèle prédictif avait pourtant bien marché jusqu'ici, mais là il a tapé à côté" conçoit Jean-Marc Gancille.

Vie l'étude de la présence de chlorophylle (ressource alimentaire du krill en Antarctique, la nourriture principale des baleines, ndlr), Globice avait en effet dressé quelques tendances pour la saison à venir, qui s'annonçaient plutôt bonnes. Finalement, les pronostics se sont avérés inexacts. La vie sauvage est parfois difficile à anticiper.

A noter que ce phénomène de faible fréquentation s'est ressenti ailleurs dans l'hémisphère Sud : côte Est de l'Afrique du Sud, Sainte-Marie à Madagascar, Mayotte... "Même la Nouvelle-Calédonie fait part de son étonnement. C'est une tendance globale" note Jean-Marc Gancille.

Le réchauffement climatique est-il la cause de cette faible concentration de cétacés dans les eaux de l'océan Indien ? Il est toujours complexe d'émettre une telle hypothèse, mais elle est sur la table. "Le monde entier est soumis à des phénomènes nouveaux. La hausse des températures dans les océans peut entraîner une modification des zones de nourrissage" explique le responsable sensibilisation. Et donc, potentiellement, impacter les migrations.

mm/www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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