La Commission européenne a finalement donné son feu vert sur l'aide publique de 20 millions d'euros accordée à notre compagnie régionale Air Austral. C'est une véritable bouffée d'oxygène et je pense surtout aux salariés qui étaient très inquiets sur leur avenir. Alors cet avenir, parlons-en ! Prenons-le à bras le corps ! Posons les choses. (Photo d'illustration : rb/www.ipreunion.com)
Comme chaque Réunionnaise et chaque Réunionnais, je suis très fier de notre compagnie aérienne régionale et au-delà de ce patriotisme
local, c'est bien plus qu'une question d'argent dont il est question. Bien sûr, il s'agit d'argent public et il faut bien le gérer. Il faut dire aussi que la
survie de la compagnie, son développement et son déploiement au national et à l'international pose selon moi la question des monopoles et
d'un marché commercial qui ne s'étend pas à l'infini.
Rappelons-nous que pendant des décennies, les prix des billets étaient excessifs sinon abusifs et que la liaison France-Réunion Aller-Retour était un couloir économique et commercial réservé aux majors de l'aérien. La concurrence s'est tour à tour cassé les dents comme Minerve, AOM, Air Bourbon, etc. On ne joue pas comme on veut dans la cour des grands et c'est exactement ce que nous, Réunionnais, avons fait avec Air Austral.
C'était à l'époque de ce développement une question éminemment politique. Elle l'est tout autant aujourd'hui. Mais nous avons changé d'époque et avec la gravité de la crise sanitaire, la compagnie doit trouver toutes les ressources nécessaires pour démontrer son agilité et son sens de l'adaptation aux dures réalités économiques. On voyage différemment aujourd'hui, on veut payer uniquement le ou les services que l'on décide de consommer avant, pendant et après le voyage lui-même.
La question est double : Sommes-nous capables de gérer nous, Réunionnais, à La Réunion, une compagnie aérienne de cette envergure ? Pouvons-nous trouver un modèle économique viable ? La réponse est évidemment OUI ! A condition toutefois que l'on ré-initialise Air Austral aux exigences du 21e siècle.
Nous sommes en 2022 et non plus dans les années 1990 ou 2000. Je crois au développement du fret quand je vois que la CMA-CGM investit massivement dans ce secteur économique. Je crois au low-cost aussi et je prétends que AIr Austral a une carte à jouer sur ce marché quand beaucoup de Français, de Réunionnais ont énormément de difficultés à boucler leurs fins de mois.
Je crois enfin qu'il ne faut pas lâcher les tri-classes et qu'il faut adopter peut-être une politique plus agressive et donc plus profitable pour le
consommateur. Tout cela doit se faire en toute transparence et en collaboration très étroite avec les personnels de notre compagnie. Je ne
doute pas de la volonté de ses dirigeants ni de ses actionnaires.
Au regard de la situation de la compagnie, tout cela demande des investissements financiers énormes. La Région Réunion à elle-seule n'aura sans doute pas les fonds nécessaires de cette ambition d'autant plus qu'il ne s'agit pas de sa principale compétence. L'Etat et les actionnaires privés devraient massivement investir à ses côtés, mais nous devons leur proposer un modèle rentable, pérenne et agile.
Nous sommes capables de le faire. Si nous ne le faisons pas, alors il faut accepter à terme le rachat, le démantèlement ou la disparition d'Air Austral, son enfermement économique sur le régional avec une clientèle qui n'est pas forcément riche. Si nous n'y prenons garde, demain, les
Réunionnais voyageront vers la France et le monde en passant exclusivement ou presque par les hubs tout-puissants du Moyen-Orient
qui eux ont un modèle économique bien précis qu'ils déploient pas à pas dans l'Océan Indien.
Sommes-nous condamnés à assister à un si triste spectacle ? Je crois que NON. Et si la Commission de l'Océan Indien devenait bien plus qu'un machin ? Depuis le temps que l'on nous vend l'espoir d'une compagnie aérienne de l'Océan Indien, si elle devait voir le jour, elle existerait. Ce n'est pas le cas et personne n'en veut semble t-il.
Par-contre, une stratégie concertée entre nous les principaux aéroports de l'Océan Indien, sur cela, il y a quelque chose à tracer. Si la coopération régionale ne débouche sur rien de concret ou pas grand chose pour les populations de cette partie du monde, c'est qu'il faut la penser et la travailler différemment en phase avec l'Etat français à nos côtés.
Choose La Réunion deviendrait alors réalité. Moi, je choisis toujours La Réunion et je suis un fervent défenseur du Made in La Réunion.