Les magasins rouvriront-ils toute la journée le dimanche ? (actualisé)

Travail dominical à Monsieur Bricolage : la Cour d'appel rendra sa décision le 17 décembre

  • Publié le 3 décembre 2019 à 09:50
  • Actualisé le 3 décembre 2019 à 10:57

Ce mardi 3 décembre 2019, l'affaire du travail dominical à Monsieur Bricolage a été plaidée devant la Cour d'appel. La décision sur ce dossier sera rendue le mardi 17 décembre. Il s'agira également de statuer sur le fond de l'affaire, ce qui devrait prendre 12 à 18 mois selon les avocats. Ce dossier oppose la direction de la SAS Sorebric (Société réunionnaise de bricolage) et la CGTR (confédération générale du travail de La Réunion). Au milieu, les salariés de l'entreprise, eux, souhaitent continuer à travailler le dimanche tandis que le syndicat s'appuie sur un arrêté préfectoral de 1966 qui interdit le travail dominical dans les commerces. En première instance, la CGTR a obtenu gain de cause, la direction de Monsieur Bricolage a donc fermé ses quatre magasins en partie ou toute la journée le dimanche mais les patrons du commerce espèrent que la décision rendue par le Cour d'appel jouera en leur faveur.

Maître Olivier Chopin, qui prenait la défense de la Sorebric ce mardi 3 décembre, évoque "deux arguments de droit" dans cette affaire : "un argument de procédure, où on a une irrégularité a priori sur la rédaction du jugement, et ensuite les conséquences manifestement excessives". Pour l'avocat, il y a "une distorsion dans la concurrence, puisque les magasins Monsieur Bricolage seront fermés pendant que les autres peuvent ouvrir", sans compter "les conséquences sur les salariés qui sont volontaires pour une meilleure rémunération. Et les étudiants surtout qui comptent sur cette rémunération pour pouvoir vivre et continuer leurs études".

Un jugement sur le fond est également attendu, l'avocat a déjà fait appel et la Cour rendra un arrêt d'ici 12 à 18 mois, selon Maître Olivier Chopin. "Je fais ce métier depuis suffisamment longtemps pour estimer qu'il ne faut ni faire preuve d'optimisme ni faire preuve de pessimisme. La décision est entre les mains du premier président."

Selon Maître Nasser Zair, qui remplaçait Maître Vincent Richard, avocat de la CGTR, "les arguments de procédure qui ont été soulevés sont irrecevables, puisque la Sorebric a demandé au président de considérer que le jugement de première instance était nul, or ce sont des accusations un peu insidieuses qui laisseraient penser que le jugement était un faux, aucune preuve n'a été apportée sur ce point-là".

Concernant la situation des étudiants, "c'était assez piquant de voir qu'on se cache derrière le sort des étudiants en disant qu'ils ont de graves difficultés" estime-t-il, "alors que la Sorebric aurait dû prouver que c'est elle-même qui va subir des conséquences excessives. Ce sont des manoeuvres dilatoires. On a voulu profiter de l'absence de l'avocat principal de ce dossier pour essayer de nous mettre en difficulté".

Né en 1966, l'avocat Olivier Chopin estime que l'arrêté préfectoral est peut-être dépassé : "ça me parle les arrêtés de cette époque, je ne me trouve justement plus très jeune, et je me dis que La Réunion a vraiment changé depuis, il serait de bon aloi de se pencher sur ses textes pour les revoir". Le préfet s'est dit ouvert à la question et serait prêt à rediscuter de cet arrêté préfectoral datant de plus de 50 ans. Sur ce point, Maître Nasser Zair estime également "qu'il faut de la souplesse", mais l'accord permet déjà selon lui de travailler le dimanche matin, "tout peut se négocier entre les partenaires sociaux".

Deux ans de procédure

Tout est parti d’un constat de la CGTR. Le syndicat, qui assure avoir consulté plusieurs salariés de Monsieur Bricolage, affirme que ces derniers sont obligés de travailler le dimanche, que l'enseigne "exploite" les étudiants et les volontaires. Suite à cela, le syndicat lance une action en justice et après deux ans de procédure, le tribunal de grande instance lui donne raison en se basant sur l’arrêté préfectoral de 1966. Une victoire retentissante pour l’organisation syndicale qui n’est pas du goût de tout le monde...

En première ligne, les salariés du magasin, cette décision du tribunal administratif, ils ne l’ont pas vue venir, pire, ils ne le comprennent pas. Premièrement, ces salariés affirment ne pas avoir été consultés par le syndicat qui aurait fait cavalier seul. Deuxièmement, les salariés rappellent que le travail dominical ne leur est pas imposé par la direction de Monsieur Bricolage. Travailler le dimanche se fait sur la base du volontariat. La fermeture de l’entreprise le dimanche crée un manque à gagner no  négligeable pour ces salariés, entre 1000 et 1400 euros par an. Et c’est sans doute la quarantaine d’étudiants qui travaillent dans l’entreprise qui va payer le plus lourd tribut, à partir de janvier prochain, leur contrat ne seront sans doute pas renouvelés.

Lire aussi : travail dominical : la loi est respectée mais à quel prix...

Cependant, la CGTR ne se démonte pas et accuse la direction d’instrumentaliser le débat " les accords de 1966 n’interdisant pas les ouvertures dominicales, bien au contraire, ils ne font que les encadrer. Les ouvertures dominicales peuvent se faire le dimanche jusqu’à 12H00, avec une obligation de fermeture du dimanche 12H00 au lundi 12H00. Sauf sur Monsieur Bricolage de Sainte Clotilde, les 3 autres enseignes (Saint-Paul, Saint-Pierre et Sainte-Suzanne) peuvent donc ouvrir leurs portes à leur clientèle le dimanche jusqu’à 12H00. " affirme Georges Caro, secrétaire général de la CGTR Commerces et Services.

Lire aussi : Tribune libre de Georges Caro, secrétaire général de la CGTR Commerces et Services

Alors que les magasins pouvaient continuer à ouvrir les dimanches matins en toute légalité alors le syndicat se questionne "cette manoeuvre vise à opposer les salariés entre eux et les étudiants contre nous. Elle porte atteinte aux intérêts des salariés du magasins (volontaires pour travailler le dimanche) et des étudiants ayants un contrat sur ce magasin."

Lire aussi : Affaire Mr. Bricolage : "ne nous trompons pas de débat"

La direction de l’enseigne ne s’est pas épanchée sur l’affaire mais espère bien que la décision de la Cour d’appel ira dans son sens en s’appuyant sur la loi Macron entrée en vigueur en 2015 qui accorde quelques dérogations sur le travail dominical en fonction des commerces.

www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

guest
0 Commentaires