Insultes, détournements, moqueries...

Coronavirus : sachons raison garder

  • Publié le 21 mars 2020 à 14:25
  • Actualisé le 21 mars 2020 à 14:33

Cela ne vous a pas échappé, l'atmosphère est quelque peu tendue en ce moment et il règne un vent de panique sur toute l'île... Avec ses 38 cas confirmés, La Réunion est bel et bien touchée par le coronavirus. Mais est-ce une raison pour perdre son sang-froid et se laisser aller aux insultes les plus basses ? La peur est compréhensible, plus encore quand les nouveaux cas de coronavirus sont annoncés par la préfeture en toute fin de conférence de presse, après les questions des journalistes, et donc sans la possibilité de demander le moindre détail sur ces nouvelles contaminations... Pour autant les réseaux sociaux se transforment en vaste tribunal populaire et chaque y va de son jugement... un peu trop vite. (Photo rb/www.ipreunion.com)

"La haine, la haine, comme un serpent dans vos âmes, la haine, la haine, qui vous fait juge et vous condamne." La citation n'est pas issue des plus illustres chanteurs de notre époque puisqu'elle vient d'une comédie musicale (Roméo et Juliette, 2001), elle n'en est pas moins parfaitement exacte.

Car en ce cinquième jour de confinement, force est de constater que la peur fait place à la haine. Une haine souvent gratuite, irrationnelle, intolérante.

- Une peur largement compréhensible -

Difficile pourtant de ne pas se mettre à la place des Réunionnais.e.s qui voient le nombre de cas exploser en ce moment sur l'île. D'abord un ou deux par jour, puis 14 d'un coup ce jeudi, et 10 nouveaux cas ce vendredi…

Difficile aussi de critiquer les habitant.e.s inquiet.e.s quand les informations ne sont données qu'à moitié par les autorités compétentes. Ainsi ce vendredi 20 mars, l'annonce de 10 nouveaux cas a presque failli passer inaperçue. Face aux huit interlocuteurs présents - tous collés les uns aux autres, soi-disant en passant -, deux journalistes TV seulement. Les autres ont suivi la conférence de leur bureau ou de chez eux, confinement oblige. Seule une question par journaliste était autorisée, via un canal de discussion avec la communication de la préfecture.

C'est seulement après cette série de questions et en clôturant la conférence de presse que le préfet a souhaité annoncer, "en toute transparence", 10 nouveaux cas de coronavirus à La Réunion, faisant donc passer le total, l'air de rien, à 38.

Impossible de poser la moindre question sur ces cas, faute de présence physique. La conférence se terminera sur cette annonce, lancée comme un boulet de canon, alors qu'une poignée de minutes plus tôt, l'ARS parlait des "28 cas avérés à La Réunion".

Ce n'est que bien plus tard dans la soirée que quelques informations seront transmises par communiqué sur ces nouveaux cas : 7 d'entre eux ont été contaminés en Métropole et les 3 autres par contacts intra-familiaux via des voyageurs également rentrés de Métropole. Pas de précision cependant sur leur état de santé.

Difficile donc, nous l'avons dit, d'en vouloir à ceux qui soupçonnent, se posent des questions, et dénoncent la transparence parfois inégale des autorités. Pourtant cela ne donne pas tous les droits.

- Le débat oui, l'insulte non -

Il n'y a qu'à voir le tollé qu'a provoqué notre propre live Facebook à l'aéroport de Gillot ce mercredi 18 mars. On y voit un homme et sa famille sortir, valises sur le chariot. Fraîchement arrivés de Paris, ils avouent ne pas être résidents à La Réunion mais se rendre sur l'île pour retrouver "papy et mamie" en ces temps de confinement et de télétravail. "On s'est dit qu'on serait mieux ici plutôt qu'à Paris" explique l'homme interviewé.

Une phrase, quelques mots seulement, qui ont provoqué un déferlement de haine long de 48 heures, jusqu'à ce que l'équipe d'Imaz Press décide de supprimer la vidéo en question. S'il convient à chacun de juger – dans sa tête – l'intérêt ou non de se rendre chez ses parents ou beaux-parents pendant le confinement, il convient de rappeler que l'interdiction des vols d'agrément n'a été actée que ce vendredi 20 mars. Soit deux jours après la vidéo.

Un rappel important pour tous les internautes qui ont incendié notre journaliste pour avoir osé souhaiter à ce monsieur un "bon séjour".

Les critiques, c'est une chose. Les insultes, c'en est une autre. Voilà qu'à travers un montage reprenant un extrait de notre live, la vidéo commence à faire le tour des groupes Facebook de La Réunion. Ce Parisien sera insulté, sa famille retrouvée et menacée en message privé, d'autres passagers de ce vol aperçus dans la vidéo aussi… C'est donc une violence incontrôlable qui s'est répandue, telle une traînée de poudre, en l'espace de deux jours.

- Remarques xénophobes -

Cet exemple illustre très concrètement cette perte de sang-froid que l'on observe actuellement sur les réseaux sociaux, que l'on entend à la radio ou à la télévision. Et avec eux une flambée de remarques xénophobes. Yeux trop bridés, peau un peu trop claire, accent italien… terminé, ces gens viennent forcément d'Asie, d'Europe ou d'Amérique et sont tous atteints de coronavirus. La réalité est (évidemment) bien différente.

Si les cas de coronavirus que compte l'île sont "importés" c'est parce qu'il s'agit d'une maladie attrapée en Métropole et ramenée sur le territoire, pas qu'il s'agit nécessairement de Métropolitains. D'ailleurs, la majorité des cas importés sont des Réunionnais.

- Médias ou gouvernement : "tous menteurs !" -

L'anonymat de Facebook permet un défoulement sans pareil… Ainsi toutes les médias mentent, la préfecture ment, l'ARS ment, le gouvernement ment. Systématiquement. C'est ce qu'il faut parfois retenir des commentaires haineux, n'ayant que faire des articles de "fact-checking" visant à rétablir la vérité.

Mais si les annonces des autorités compétentes, des instituts officiels de santé ou des médias qui enquêtent ne sont pas prises au sérieux, lesquelles le seront ? Il est plus facile parfois de croire à une vidéo qui circule anonymement parce qu'elle confirme une peur, qui elle est bien réelle. Ce n'est pas pour autant que cette source est sûre, ce n'est pas pour autant que les médias ou les autorités mentent. Quel intérêt d'ailleurs à le faire ?

Calmons le jeu. C'est nécessaire, c'est vital. Seulement cinq jours de confinement et l'on fait déjà face à un élan de violence difficile à tempérer dans les commentaires de chacun.e.

"C'est la peur qui va nous tuer" nous disait une internaute lors de l'arrivée de plusieurs paquebots de croisière il y a de ça environ trois semaines. Une phrase qu'il conviendrait de méditer…

mm / www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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13 Commentaires
Mary
Mary
4 ans

Comme quoi, la bêtise se répand plus rapidement que le SARS CoV 2. Si nous pouvions arrêter d'écrire ne serait-ce que pendant 14 jours, le web reprendraient sans doute de la couleur, telles les eaux de Venise. Humainement, comment en vouloir à cette famille ? Si des protocoles d'accueil spécifiques avaient existé, elle s'y seraient pliée volontiers. Comme tous ces réunionnais qui sont rentrés par le même avion. Alors on arrête de cracher sur la continuité du territoire quand cela nous arrange et on met en oeuvre le confinement et les gestes barrières, histoire que nos hôpitaux n'aient pas à choisir entre deux vies parce qu'ils seront débordés voire dépassés. N'oublions pas l'épisode du chikungunya en 2005. On n'en menait pas large. Alors il faut se dire que l'émergence d'un virus ne connait pas de frontière. Lorsqu'un saut d'espèce survient, on fait face. C'est le meilleur moyen d'améliorer nos capacités de lutte. Si le SARS CoV 2 a révélé que nous n'étions pas prêts, il révèle aussi notre côté le plus sombre. Cela fait bizarre de savoir que l'on vit parmi des gens qui seraient prêts à vous faire du mal si l'occasion leur était donnée. Et c'est une réunionnaise qui l'écrit.

Bruno
Bruno
4 ans

Bonjour. Désabusé par le mensonge, le laxisme, le manque d'empathie, et la mascarade. Les saint Bernard du gouvernement veulent s'afficher comme les sauveurs. Sauveurs de quoi ? certainement pas du manque d'anticipation, du manque de cohérence, et de logique. Policiers, corps médical, travailleurs sociaux (mon cas). Ou sont les protections, il n'y en a pas. Ile de la Réunion, aéroport ouvert, aucun contrôle de santé (5 ,premiers jours) après et enfin cri d'alarme de médecin. Monsieur le directeur de L'ARS, et oui je vous l'apprend, vous êtes le directeur. Restons sérieux. Et vous voulez gouverner... Simplement une réflexion.

sissi974
sissi974
4 ans

Pouvons-nous passer de commentaires ? ni non ! de la bienveillance pour tous, sera la bonne conduite à tenir !

Phil, depuis son mobile
Phil, depuis son mobile
4 ans

Informer c'est bien !! Commenter ça devient impossible !! Il faut donc suspendre les commentaires.
Bon courage à vous !!

Daniel
Daniel
4 ans

Tous sa par la faute des dirigeant de L'ARS que j'accuse de maltraitance, il refuse les teste les masques, les incompétents de l'ARS le chik, responsable et coupable,la Dingue,pareil, le Virus, ces incompétents de l'ARS

St
St
4 ans

L' ignorance amène la Peur,la Peur amène la Colère,la Colère amène la Violence.

Arrêt en sa
Arrêt en sa
4 ans

Svp cessez d'utiliser l'écriture inclusive dans vos papiers ! arrêt fe linteresan !

Anne976
Anne976
4 ans

C'est a Vous d'arrêter De montrer des vidéos dans lesquelles on peut reconnaître les gens ; vous allumez le feu et après vous faites semblant de le dénoncer ; scandaleux !

FAFA
FAFA
4 ans

Votre analyse me semble juste, mais il faut cependant comprendre l'homme et les femmes réunionnaises. Nous vivons actuellement une crise majeure au même titre que l'ensemble de monde. À ce titre , la première attente que l'on puisse avoir est que les autorités compétence jouent leurs rÃ'les et protègent coÃ"te que coÃ"te les citoyens. En lieu et place de cette logique, nous avons eu une pléthore d'injonction contradictoire. L'avenir du territoire Réunionnais a été confié un ensemble de personnes métropolitaines naviguant à vue. Dans ce contexte, comment ne pas critiquer les attitudes des journalistes, de l'ARS de représentant de l'état, etc. Toute personne douer de raison ne peux que critiquer cette situation qui va à l'encontre de l'avenir Reunionnaise. Une sage décision aurait était de fermer l'aéroport et d'imposer comme l'on fait nos voisins mauriciens une quarantaine. A contrario, l'aéroport de Gillos a maintenu son activité et a volontairement mis en danger la vie des citoyens réunionnais. Un journalisme éclairer aurait souligner se manquement (comme a pu le faire Mr Souprayen sur la 1er). Il faudra payer les conséquences de ses actes dès lors que cette crise sera terminée. C'est pourquoi cher journaliste, nous ne vivons pas dans un monde Bisounours, le système français à mis en danger notre île, il en faut désormais payer les conséquences. Le déferlement de haine n'est qu'à mon sens la première étape d'un long processus de remise en question de l'ordre établi et le paysage médiatique fait partie de cette ordre...

<3, depuis son mobile
<3, depuis son mobile
4 ans

Mano
Mano
4 ans

Poste Philip....j'adhère!....un fléau plus qu'un réseau...de par son utilisation!

Nanou
Nanou
4 ans

Moi je pense qu'il faut fermer l'aéroport totalement en vue des circonstances il faut arrêter avant que se virus nous tuent

Philp
Philp
4 ans

D'où l'intérêt de limiter et filtrer l'information pour votre bien être, perso pas d'actualité à la télé, pas de radio, très peu de réseau sociaux (juste pour garder le contact avec des proches), l'excès d'information vous fera focaliser sur ce mal être et vous allez monter en pression et développer la peur ce qui aura pour conséquence de faire baisser votre système immunitaire donc à éviter impérativement. Profitez de ce temps libre pour profiter de vos enfants, faites des activités avec eux, profitez de votre compagne, faite du sport, de la lecture, du développement personnel, prenez le temps de cuisiner sainement, bref prenez le contre pied de la situation et profitez de ce temps qui vous est offert au lieu de le gaspiller, restés sur les événements que vous maîtrisez resté dans votre présent et sachez l'apprécier, ont dit souvent "ma point le temps fait ci ma point le temps fait ça" aujourd'hui vous avez le temps, sans doute le bien le plus précieux, ne le gaspiller...