
Dans un article paru ce mercredi 8 avril, nous évoquions la communication difficile avec le CHU qui refuse toute présence des journalistes au sein des centres hospitaliers (CHU) nord et sud. Cela alors qu'en Métropole des reportages sont réalisés tous les jours dans les hôpitaux qui font face à un afflux massif de malades et de cas graves. Ce qui n'est pas - et c'est heureux -, le cas à La Réunion.
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Raison invoquée par le CHU : "la situation est compliquée au sein des services" covid et réanimation. Raison de plus, selon nous journalistes, pour ouvrir les portes et nous permettre de montrer la réalité au quotidien de ces professionnels de santé. De ceux qui se mobilisent, en dépit du manque de moyens et d’anticipation autour de cette crise, pour sauver des vies.
Cet article a donc fait réagir certains acteurs de la santé. Sous couvert d’anonymat – ce qui en dit long sur le climat de défiance imposé à ces professionnels -, ils pointent du doigt l'agence régionale de santé et sa directrice, Martine Ladoucette.
La communication entre elle d'une part, les urgentistes et les médecins de ville d'autre part "est très compliquée, voire inexistante" déplorent des soignants. "Tout se passe comme si elle se méfiait de nous pour une raison aussi sombre qu'inconnue" lâche, agacé, un professionnel de santé.
Et selon ces soignants, ce serait la direction de l'ARS qui pèserait de tout son poids, nous a-t-on dit, pour que les portes du CHU restent fermées aux journalistes.
Nous avons fait notre job de reporter, nous avons voulu vérifier et interroger à ce propos la directrice de l'ARS et fonctionnaire du ministère de la Santé ce jeudi à l’occasion d’une conférence de presse. Réponse de l’intéressée : "il est quand même normal que les hospitaliers du CHU soient le plus possible protégés et puissent effectuer leur travail tranquillement et dans le calme". Elle a ajouté qu’il faut" tout faire pour préserver les conditions d’exercice des professionnels et de confidentialité dues aux patients hospitalisés".
- Les hôpitaux sont presque vides et c'est tant mieux -
Ces propos tombent sous le sens. Evidemment. Il convient toutefois de rassurer madame Ladoucette : les journalistes sont des professionnels sachant travailler en temps de crise sans interférer avec les intervenants et en respectant la tranquillité et l’anonymat des patients et de leurs soignants. Le tout dans le respect des règles sanitaires qui nous seraient imposées.
Dans le même temps, il faut noter, d'une part, que les services traditionnels du CHU sont quasiment vides, seuls les cas les plus graves étant pris en charge puisque le gouvernement a demandé de reporter les opérations à caractère non urgent.
D’autre part, de se réjouir que selon le bilan officiel fourni par l'ARS - c'est dire s'il est incontestable -, sur les 376 cas recensés de coronavirus, 199 personnes sont guéries, et 3 personnes sont hospitalisées actuellement en réanimation. Au plus fort de la crise, pour l’instant, 6 personnes étaient hospitalisées en même temps au sein de ce service dont les capacités ont été augmentées dès le début de l’épidémie sur l’île, pour atteindre les 112 lits disponibles.
Sans sous-estimer le travail difficile et formidable des professionnels mobilisés, autant dire que nous sommes très loin d’un service qui fonctionne à plein régime voire même en surrégime, contrairement à la Métropole où, rappelons-le une nouvelle fois, les services de réanimation sont accessibles aux journalistes.
Toujours selon nos informations, le 15 et donc le Samu, fortement sollicité en début de crise, enregistre depuis deux semaines une nette diminution des appels de personnes craignant une contamination au coronavirus.
Tant mieux et nous souhaitons que cette tendance se poursuive.
Mais alors si le nombre des patients guéris augmente, si les hôpitaux ne sont pas surchargés, si la pression sur le 15 baisse, pourquoi l'ARS a autant de mal à communiquer ?
- Transparence d'un côté, opacité de l'autre -
L'attitude interpelle d'autant plus qu'elle tranche avec celle de la Croix-Rouge. Dans un Ehpad, géré par cet organisme, une aide-soignante a été testée positive au virus.
La Croix-Rouge a accordé des interviews "en toute transparence" à tous les journalistes qui l'ont demandé. Elle a permis que soient réalisées des images de l'établissement ou encore de l'arrivée des équipes de dépistage du covid-19.
Fait à souligner : aucun journaliste n'a forcé les portes de l'Ehpad, ni déferlé dans les couloirs pour harceler les gramounes et le personnel.
A toutes ces interrogations s'ajoutent celles de la population réunionnaise ne comprenant par pourquoi il n'y pas une cartographie des cas de coronavirus à La Réunion. L'ARS a refusé de communiquer cette information. Information qui a pourtant fini par fuiter : une carte des cas répertoriés commune par commune et établie par Santé Publique France a été publiée sur les réseaux sociaux ce dimanche 5 avril.
Au cours de la conférence de presse de ce jeudi, Imaz Press Réunion a bien évidemment souhaité connaître la position de l’ARS quant à la publication de cette carte et à son éventuelle mise à jour.
- Question coupée -
Après avoir tenté de couper partiellement notre question et après un gros forcing de notre part, l’ARS a finalement accepté d’y répondre : "communiquer sur les adresses des personnes contaminées revient à dire qu’on veut tout simplement donner les adresses des voyageurs. Ça n’a aucun sens en terme épidémiologique et de stratégie sanitaire", a répondu Martine Ladoucette.
Curieuse "réponse". Il n’a jamais été question de révéler l’adresse des personnes contaminées, mais tout simplement de donner une répartition par commune des cas, comme ce qui se fait chaque semaine en ce qui concerne la dengue.
A Imaz Press nous ne polémiquons pas pour le plaisir de polémiquer surtout dans ce contexte de crise sanitaire hors du commun.
Nous avions même pris l'initiative de nous interroger sur la pertinence des appels à la démission lancés à l’encontre du préfet Jacques Billant et de la directrice de l’ARS alors que La Réunion, comme tout le territoire français, mène une guerre inédite face à un ennemi invisible et mortel.
Mais les méthodes de l’ARS et de sa directrice interpellent tant sur la gestion de crise que sur la communication qui en est faite.
Et ce n'est certainement pas l'envoi par le CHU ce jeudi soir d'une vidéo et de photos de "com" sur "les coulisses de l'hôpital" avec autorisation "d'utiliser les éléments de langage" (sans doute parce que les journalistes sont jugés incapables d'écrire seuls leurs articles) qui va clarifier la situation.
Bien au contraire.
mb / www.ipreunion.com / [email protected]
10 Commentaire(s)
2) les réunionnais ne sont pas plus "débiles" et irresponsables que le commun des Français (et je ne parle même pas de la situation particulière de certaines cités ou banlieues). Encore une fois je ne vois dans cette attitude qu'une volonté d'infantiliser la population reunionnaise, de toujours la considérer comme immature par nature, incapable de comprendre le pourquoi et le comment des choses.
Bref, nous avons l'exemple type d'un discours ( et de certains commentaires) teinté de néo colonialisme qui serait impensable ailleurs. Je profite de l'occasion pour persister et signer en disant que la gestion de la crise covid-19 n'à été depuis le début qu'une suite catastrophique d'impreparation et d'incapacité à agir et non pas à réagir sur les événements.
Si comme kreol y dit "n'a in jour y appelle demain", il faut juste espérer que ce jour "tantÃ't viendra".
Je remercie les journalistes pour leur boulot grâce auquel nous pouvons nous tenir informés de tout et à tous moments, mais parfois, un peu de recul ne serait pas du luxe.
Cependant vu l'hystérie sur certaines radios et sur les réseaux sociaux, vu l'hystérie de certains commentaires __parfois ici-même sur cette page ___ je comprends bien qu'ils n'aient pas spécialement envie de communiquer plus que nécessaire. Quand on est dans un domaine et qu'on voit comment un article de journal peut se tromper sur ce domaine particulier, alors peut comprendre que sur des sujets graves on ne s'étale pas dans les journaux.
1-Ça n'était au pire qu'une grosse grippe
2-Cette maladie ne quitterait pas les frontières de la Chine
3-Les masques ne servaient à rien
4-La mise en quarantaine des arrivants inutile
4-La désinfection des rues inutile
5-La Chloroquine est un poison
La liste est peut être bien plus longue, l'avenir nous le dira, et il faudra après ça en tirer des conclusions, et faire payer ces responsables payés très cher pour cette catastrophe sanitaire.