Débat

Coronavirus : le sacrifice des personnes fragiles

  • Publié le 17 juin 2020 à 02:56
  • Actualisé le 21 juin 2020 à 08:20

Nous poursuivons notre série de publications des avis de nos internautes sur la gestion de la crise sanitaire. A vos commentaires et à vos avis

Le diimanche 14 juin 2020 Emmanuel Macron, Président de la République, s'est adressé aux Français, depuis l’Elysée, afin de diffuser son bilan de la crise sanitaire et dévoiler les suites du " déconfinement ".  Il a déclaré,  sans frémir : " Nous pouvons être fiers de ce qui a été fait et de notre pays(…) Je veux que nous tirions toutes les leçons de ce que nous avons vécu… "

La première leçon à tirer, et sans doute à médité, devrait porter sur le sacrifice involontaire des personnes âgées, dans les EHPAD et autres établissements sociaux et médico-sociaux : 10.881 aux dernières nouvelles, un bilan à réactualiser à la hausse sous peu.

Une hécatombe un temps passée sous silence et non comptabilisée dans la mortalité officielle, limitée aux décès en milieu hospitalier, jusqu’au mois d’avril. Les personnes dépendantes, les plus fragiles, ont un temps constitué un angle mort de l’épidémie en France, car leur état de faiblesse, leurs polypathologies, leur âge tout simplement, les ont exclues de l’offre de soin, le système étant sidérés par la pression épidémique. Le réseau des centres hospitaliers publics dédiés à la prise en charge des patients Covid+ préservait sa capacité d’accueil, et refusait la prise en charge de patients dont on pensait qu’ils ne supporteraient pas un hospitalisation longue et à fortiori des procédures de réanimation.

La situation sanitaire est devenue dramatique dans ces établissements d’hébergement collectif, du fait de la pénurie en masques, tests et équipements de protection, le personnel soignant véhiculant lui-même le virus, quand les familles ne le faisaient pas elles-mêmes, sans le savoir.

En cas de maladie, le confinement - initié sur les 850 000 résidents - ajoutait à la solitude et à la dépression. Et comme, gestion de la pénurie oblige, la stratégie nationale consistait à tester les trois premiers cas suspects d’un même établissement, les autres devaient se contenter d’examens cliniques, en attendant… Les malades étaient " soignés " sur place, sans bénéficier d’une hospitalisation pour des soins de suites, et les ARS n’ont pas jugé utile de faire bénéficier de la capacité d’accueil des établissements du secteur privé que l’on avait contraint à l’interruption d’une part importante de leurs activités, pour soutenir les hôpitaux en première ligne.

- Une euthanasie molle, sur simple ordonnance -

La crainte d’une saturation de la capacité d'accueil des hôpitaux en services de réanimation, initialement évaluée à 5 000 lits, étendue à 10 000 par la grâce de réaménagements et de redistribution des besoins, a conduit à ce que les résidents des EHPAD et autres établissements médico-sociaux servent de variable d’ajustement, et évitent la saturation de la capacité " réa ".

Le milieu médical s’est trouvé confronté à des " choix "difficilement recevables au plan éthique.

L’administration de la Santé a donc cogité sur un document destiné à apporter une aide conceptuelle à la décision d’admettre, ou pas des patients, en service de " réa " en fonction de paramètres établissant le caractère prioritaire ou pas, des dits patients. L’un des paramètres étant la disponibilité en lits de soins critiques, d’autres portant de façon plus tranchée sur l’âge des patients, le fait qu’ils soient porteurs d’affections chroniques, de polypathologies…

Les malades atteints d’insuffisance rénale chronique, et donc dialysés, n’étaient pas non plus admis au statut prioritaire, ils étaient même exclus de toute intervention chirurgicale, dès qu’ils s’avéraient CoviD+.  Et si on a appelé à l’organisation de soins palliatifs pour ces exclus de l’offre de soin, on a dans le même temps insisté sur  le droit des patients " à une analgésie proportionnée, à une sédation proportionnée ou profonde et continue maintenue jusqu'au décès… "

Ce faisant, Edouard Philippe, par décret (n° 2020-360 du 28 mars 2020), a autorisé la prescription, extraordinaire - hors AMM -  de Rivotril, jusqu’au 15 avril 2020, sur des patients possiblement touchés par le virus, légalisant de fait une euthanasie molle, sur simple ordonnance ; une manière présumée palliative de prise en charge en temps de coronavirus… et de pénuries généralisées.

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