Tribune libre de Bruno Bourgeon, président de l'AID 974

ADEFAR : un combat inaperçu mais juste pour la qualité de la viande bovine réunionnaise

  • Publié le 15 décembre 2018 à 16:00

L'Adéfar, association de défense des agriculteurs réunionnais, mène un combat inaperçu, occulté par l'actualité des Gilets Jaunes. Pourtant, ce combat est nécessaire : pour la qualité de la viande bovine réunionnaise, et la qualité du cheptel réunionnais : rien de moins ! L'association créée en 2006 comptait 50 familles. Il n'en reste que 6, dont 3 éleveurs sont malades. En 2000, il y avait 151 exploitations laitières. 64 en 2013, moins de 60 actuellement, pour moins de 2000 vaches laitières. Il y a 260 éleveurs de vaches à viande, soit 6500 têtes. Le contrôle laitier était assuré par le Conseil Général, avec une publication mensuelle, qui a disparu depuis la création de l'association.

La filière lait est alimentée par l’Hexagone : 24 millions de litres produits localement en 2006, moins de 18 millions de nos jours. Les besoins s’établissent à 160 millions de litres annuels. La production locale en perte de vitesse n’assure que 11% des besoins. La publicité " Au bon lait des hauts " est un pieux mensonge : les produits laitiers réunionnais sont fabriqués à + de 90% avec du lait en poudre métropolitain. Les meilleurs éleveurs réunionnais produisent jusqu’à 7000 litres annuels/vache, grâce aux compléments alimentaires : rations sèches de granulés, tourteaux de soja OGM " Monsanto ", avec force antibiotiques de type macrolides. URCOOPA, importateur unique, gère les prix à sa guise.

Les petits élevages contaminés à 15%

La filière viande produit 1800 t/an pour 4567 t importées en 2015 (chiffres de la Chambre d’Agriculture).
La leucose bovine enzootique (LBE) touche surtout l’élevage laitier (du fait du mode principal de transmission) : 10 élevages en sont indemnes. La dernière étude de 2003, menée par l’ingénieur agronome Barbara Dufour, retrouve 70% de LBE ; elle met en place un plan d’éradication sur trois ans : repérer les vaches négatives pour la LBE et installer une banque de colostrum, l’allaitement étant le mode de contamination le plus important ; en effet la capacité vectorielle de la " mouche bœuf " (stomoxe) n’a jamais été prouvée, et les pratiques vétérinaires d’écornage et de piqûres sans changer les seringues sont devenues interdites. Ce plan n’a jamais été mis en place. Depuis, silence radio. Le rapport 2015 de l’ANSES extrapole les chiffres de 2002 et estime la contamination à 90% des élevages, pour 70% des animaux dans les élevages laitiers. Les petits élevages sont contaminés à 15%. La LBE épuise les cheptels, diminue les rendements laitiers, expose à d’autres maladies. La carcasse d’un animal infecté ne vaut rien, le lait est de mauvaise qualité, et enfin on a retrouvé du génome du virus de la LBE dans les cancers du sein de femmes en Californie (étude parue en 2015 de l’Université Berkeley).

Ce que dit la loi

Or il y a une législation. La réglementation française 1990 suit l’Europe : l’abattage de 2007, un instant envisagé, a été annulé. L’Adéfar attaque la Préfecture au Tribunal Administratif le 25/03/2013, la décision du 11/12/2014 ordonne de relancer une enquête épidémiologique. La Direction Régionale de l’Alimentation promet enquête et indemnisations en 2015. Rien n’est fait en 2016. En 2017, un arrêté ministériel est pris : la réglementation 1990 ne s’applique pas à La Réunion, et la LBE, classée en deuxième catégorie en métropole, est classée en troisième catégorie à La Réunion, c’est-à-dire que les soins que requiert cette maladie sont exclusivement à la charge des éleveurs. Nouveau combat judiciaire de l’Adéfar : cet arrêté ministériel est cassé. Un nouvel arrêté est rendu en octobre 2017 : le ministère peut prendre des dispositions particulières pour La Réunion, à nouveau exclue du dispositif 1990. Ce nouvel arrêté est également attaqué par l’Adéfar, l’affaire est en cours.

Voilà la réalité de l’Adéfar : tous les Réunionnais devraient soutenir ce combat, car il est juste, et respecte éleveurs et consommateurs. L’idée : " une vache (saine), un veau, pas plus, à La Réunion ", doit faire son chemin.

Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

www.aid97400.re

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