Tribune libre de la députée Ericka Bareigts

Plan de gestion de la pêcherie de la légine australe, quelques propositions

  • Publié le 31 mai 2019 à 09:31
  • Actualisé le 31 mai 2019 à 11:08

En 2017, l'État a accordé à " Réunion Pêche Australe " un quota de pêche de 100 tonnes de légine (sur plus de 6 000 tonnes de quota à distribuer à l'époque), afin que les pêcheurs de La Réunion puissent bénéficier d'une partie des retombées de cette ressource extrêmement profitable, jusque-là réservée à quatre acteurs économiques qui se partageaient les 80 à 100 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel généré par cette pêche. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Dans le même temps, l’État a fait le constat que les règles d’entrée et de progression dans cette pêcherie, réglementée par l’administration des TAAF, devaient être revues en profondeur. Les objectifs de cette réforme étaient clairs : " concilier stabilité des investissements dans la pêcherie, l’exigence de concurrence tout comme de compétitivité, et l’amélioration des retombées pour l’emploi et l’ensemble de la pêche de La Réunion1 ".

Or, le nouveau projet de plan de gestion de cette pêcherie, publié sur le site de la préfecture des TAAF le 9 mai 2019, effectue un virage à 180 degrés par rapport à ses objectifs initiaux, en aggravant comme jamais les conditions de la concurrence, et en ne s’intéressant quasiment pas aux retombées de cette pêcherie pour La Réunion. Il résulte de tout ceci que les pêcheurs de La Réunion, qui avaient fait l’effort de s’organiser au sein de " Réunion Pêche Australe " pour proposer un projet crédible et vertueux à l’État, sont désormais certains d’être durablement exclus de la pêcherie à la légine, au profit d’une protection sans précédent accordée par l’État aux quatre opérateurs historiques.

Cette décision est aussi incompréhensible qu’injuste : les pêcheurs de La Réunion ne doivent pas être les seuls pêcheurs d’Europe à être exclus de cette pêcherie, opérée depuis leur territoire et dont la ressource se situe à leurs portes. Elle est d’autant plus incompréhensible que, tandis que l’État se fixe comme objectif prioritaire d’introduire davantage de concurrence en Outre-mer, il organise un véritable oligopole dans les TAAF.

Ce nouveau projet de plan de gestion est actuellement en phase de concertation à la préfecture des TAAF, jusqu’au 30 mai. L’État doit le revoir en profondeur pour rendre plus justes et plus équitables les conditions d’accès à  cette pêcherie, et mieux prendre en compte les retombées pour La Réunion, conformément à ses objectifs initiaux.

1. Réintroduire une plus juste concurrence entre les opérateurs économiques

Le projet de plan de gestion introduit une procédure nouvelle, préalable à la répartition des quotas entre armateurs, qui consiste à noter (sur 20) les différents opérateurs demandant à bénéficier de quotas, selon des critères d’antériorité, environnementaux et socio-économiques. Or, cette nouvelle procédure rend en fait impossible l’entrée d’un nouvel armement dans la pêcherie.

Tout d’abord, parce que cette procédure donne un poids colossal au critère dit " d’antériorité ", qui compte pour 8 points sur 20. C’est-à-dire qu’alors que l’État a rouvert le plan de gestion pour introduire plus de concurrence, il commence par donner 8 points sur 20 aux opérateurs historiques et à eux seuls ! Ces 8 points ne reposant que sur l’antériorité, ils sont par définition inaccessibles aux nouveaux entrants qui, eux, ne peuvent donc espérer atteindre que la note de 12/20 au maximum.

En outre, le nouveau projet de plan de gestion prévoit d’attribuer 3 points / 20 aux armements détenteurs de l’écolabel " MSC ". Or, par définition, pour être certifié MSC, encore faut-il avoir déjà pêché de la légine, si bien que ce critère " environnemental " est en réalité encore un bonus donné aux armements en place. En définissant un nouveau critère impossible à atteindre pour les nouveaux entrants, le nouveau plan de gestion dégrade encore la note des nouveaux entrants de 3 points, faisant tomber la note maximum que peut obtenir un " non-historique " à 9/20.

Or, l’État a introduit une note éliminatoire en vertu de laquelle les dossiers dont la note est inférieure à 10/20 seront automatiquement rejetés. L’application combinée de ces trois dispositions fait que le nouvel entrant a l’assurance d’être en dessous de la note éliminatoire : en l’état, personne ne pourra donc entrer dans cette pêcherie.

Il conviendrait donc :
- de valoriser, dans les critères d’antériorité, l’expérience des pêcheurs réunionnais dans leur pêcherie
- de valoriser l’engagement pris par les pêcheurs réunionnais d’obtenir l’écolabel MSC dans les trois ans qui suivront leur attribution de quota de légine
- de supprimer la note éliminatoire de 10/20, qui est extrêmement discriminante.

2. Réintroduire l’objectif de meilleures retombées locales de cette pêcherie pour La Réunion

Le plan de gestion ne prévoit quasiment aucune retombée sérieuse pour le territoire réunionnais. Les seules obligations concernent l’obligation d’avitaillement local, et celui de faire le plein de gasoil à La Réunion. Or, l’amélioration des retombées locales de cette pêcherie pour La Réunion faisait partie, à raison, des objectifs prioritaires de l’Etat au moment où il a décidé de réformer le plan de gestion de la pêcherie à la légine. Il convient donc d’inclure, dans les " critères socio-économiques " prévus par le projet de nouveau plan de gestion, une clause permettant de s’assurer que le territoire bénéficie davantage des retombées de cette pêcherie qui est opérée depuis son port : emplois locaux, transformation de niveau 2 réalisée sur place, distribution de dividendes à des Réunionnais, cotisations versées à la filière pêche locale.

À titre d’exemple, l’article 73 de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, que j’ai portée en tant que ministre des Outre-mer, prévoit une sous-traitance des marchés publics au bénéfice des petites et moyennes entreprises locales. L’objectif de cet article, et plus particulièrement de cette loi votée à l’unanimité, est de favoriser l’émergence de nouveaux acteurs et de meilleures externalités positives pour les entreprises de La Réunion.

Pour être incitative et efficace, cette clause de " retombées locales " doit représenter au moins la moitié des points obtenus par les armateurs au titre des " critères socio-économiques ".

3. Offrir à chaque armement une chance égale sur la ligne de départ

Lors des différentes consultations qui ont eu lieu pour préparer le nouveau plan de gestion, il a été demandé aux armateurs quelle serait la quantité minimale de quota qui leur permettrait d’équilibrer leurs exploitations. Les armements historiques ont fixé ce seuil plancher à 700 ou 800 tonnes par navire, tandis que Réunion Pêche Australe a estimé avoir besoin d’au moins 400 tonnes au minimum.

Or, les critères de répartition des quotas entre armateurs ne permettent pas d’atteindre ce niveau minimum de 400 tonnes pour un nouvel entrant. En effet, le nouvel entrant ne pourrait bénéficier que de la part fixe des quotas, la part variable reposant nécessairement sur les performances constatées lors des campagnes de pêche précédentes. Le nouveau plan de gestion a proposé d’attribuer 45% des quotas disponibles à chaque armateur, c’est-à-dire, sur la base du quota actuel, 332 tonnes par navire2. Il résulte de ce qui précède qu’en l’état actuel du plan de gestion, un nouvel entrant ne pourrait pas avoir un quota suffisant pour pouvoir assurer l’équilibre commercial de son exploitation, fixé par le moins-disant de tous les armateurs (RPA) à 400 tonnes au minimum.

Il conviendrait donc d’augmenter la part du quota fixe réparti à égalité entre les armateurs, pour le porter au minimum à 55%, ce qui assurerait à un nouvel entrant environ 405 tonnes de quota3. Pour plus de sécurité, il pourrait également être indiqué en toutes lettres, dans le plan de gestion, que le quota attribué à chaque armateur ne peut pas être inférieur à 400 tonnes.

4. Réduire le risque d’une nouvelle décision arbitraire de l’Etat

Le nouveau plan de gestion donne la possibilité à la préfecture des TAAF de fixer, tous les 3 ans, le nombre de bateaux autorisés à pêcher dans les deux ZEE de Crozet d’une part, et de Kerguelen d’autre part. Cette disposition a déjà été utilisée, dans le passé et jusqu’en 2016, pour bloquer l’entrée de tout nouvel armement dans la pêcherie, sur des critères arbitraires. En effet, les TAAF utilisaient cette disposition pour bloquer à 7 le nombre de bateaux pouvant bénéficier d’une licence de pêche pour les deux ZEE, alors que la position du Museum d’histoire naturelle était de ne pas autoriser plus de 7 bateaux en action de pêche simultanée dans chacune des deux ZEE. C’est pourquoi le gouvernement a été obligé, en 2016, de modifier cet arrêté pour permettre l’entrée d’un nouvel armement (en l’occurrence RPA).

Compte-tenu de l’historique de cette disposition et de son utilisation " politique " par le passé, il convient de centrer son utilisation uniquement sur des critères scientifiques et environnementaux, et donc de supprimer la possibilité nouvelle offerte par le projet de plan de gestion de pouvoir réduire le nombre de bateaux autorisés à pêcher en fonction " de la nécessité de conserver une évaluation des performances efficiente, telle que prévue au point 4.3.2 ", critère subjectif s’il en est.

Au moment où les annonces du Président de la République, Emmanuel MACRON, sur le renouvellement de la flotte de pêche, faites en septembre 2017 en Guyane, ne se mettent pas en place, et où les pêcheurs de La Réunion ont vécu deux des pires campagnes de pêche de ces dernières années (-38% de prises en 2017 par rapport 2016, idem sur 2018), les 80 pêcheurs artisans et côtiers de La Réunion qui sont associés au capital de Réunion Pêche Australe ne comprennent pas pourquoi on leur refuserait une place dans cette pêcherie particulièrement profitable.

Ceci leur permettrait de moderniser leurs bateaux, d’absorber avec un peu moins d’angoisse la baisse du nombre de captures et la hausse du coût des appâts, voire même d’envisager plus sereinement pour certains la transmission de leur activité à leurs enfants et leur départ en retraite. Ce projet n’est pas moins digne de considération que celui qui consiste à soutenir, toujours un peu plus, des acteurs historiques dont l’intérêt pour le territoire réunionnais est à préciser. Cette position est en outre conforme aux objectifs définis initialement par l’État, et rappelés à deux reprises par voie de communiqué de presse des TAAF.

Éricka BAREIGTS

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2 Commentaires
Pecheur
Pecheur
4 ans

Qui son ses pêcheurs reunionnais Qu on décrit dans cette tribune publicitaire de REUNIMER on parle de retomber pour les pêcheur reunionnais et on incite bien la dessus mais pour mémoire sapmer. Pêche avenir cap bourbon ne sont ils pas reunionnais ne sont ils pas des pêcheurs reunionnais venez sur le port quand un palengrier arrive vous verrez venez visiter ces entreprise vous verrez venez voir les investissent Qu il font pour la réunion sans ce venter tout les 4 matin à coup de campagne de communication et marketing comme peut le faire cette ba'de de pourri de RPA ARIPA REUNIMER et les loobistes en plus que je sache le label msc beaucoup de pêcherie autre que la legine l on alors faut pas raconter de connerie les politique on peur de pas toucher leur retomber promis par RPA c est pour ça Qu il monte au créneau non bande de fossaire vous me faite vomir honte à vous de prendre les reunionnais et la pêche pour des cons Qu on manipule à l aide la presse et des politique véreux qui comprennent rien.

lavédi
lavédi
4 ans

emmanuel macro i vey o grain kiet pa