Tribune libre de Brigitte Croisier

La femme du poète

  • Publié le 2 juillet 2019 à 17:21
  • Actualisé le 2 juillet 2019 à 17:24

Boris Gamaleya, poète intensément inspiré par La Réunion, ses paysages, ses blessures et son appel à la liberté, illustré par l'épopée des marons, est parti vivre ses rêves lot koté la vi. Mais n'oublions pas celle qui l'a accompagné fidèlement, dans ses luttes politiques et sociales, dans la répression subie autour des années 60-70 mais aussi dans son exploration de l'histoire et de l'imaginaire réunionnais. La femme du poète, Clélie, a aussi écrit et publié.

Née au Bernica, à Saint-Paul en 1927 et portant alors le nom de Nosbé, elle devint professeur de lettres classiques. C'est le vécu des femmes qui l'inspira particulièrement, celles du présent qu'elle côtoyait en militant au sein de l'Union des femmes de La Réunion (devenue ensuite Union des femmes réunionnaises en 2004), mais celles aussi qui avaient laissé leurs empreintes discrètes sinon méconnues et pourtant essentielles.

Ainsi, sous l'égide de l'UFR, elle publie en 1984, Filles d'Héva, Trois siècles de la vie des femmes à la Réunion, publié à nouveau par Océan Editions en 1991. Des années plus tard, la présence des femmes dans le maronage fut d'ailleurs le centre de l'étude de Marie-Ange Payet Les femmes dans le marronnage à l'île de La Réunion de 1662 à 1848 (L'Harmattan, 2013).

Clélie ajouta à ce panorama historique les sensations du vécu dans L'île oubliée (Océan Editions, 2001), l'île de son enfance qu'elle avait quitté en embarquant à destination de Marseille sur le paquebot Champollion, pour poursuivre ses études. Avec d'autres femmes militantes, elle décrivait le quotidien féminin dans les "Pages-femmes" hebdomadaires de Témoignages. Dans le même esprit, Laurence Vergès et Clélie avaient créé le périodique Héva.
Très attentive aux autres, elle s'est investie dans différentes associations (l'UDAF, Union départementale des associations familiales), fut administratrice de la CAF et fondatrice de l'association SOS détresse. 

Son militantisme était toujours chaleureux, amical. Après un séjour  à la Plaine des Palmistes, le couple est parti vivre dans la région parisienne depuis quelques années. On sait que Clélie va affronter l'épreuve de la disparition de Boris avec sa détermination habituelle, on l'accompagne par la pensée. Elle continue à nous manquer.

Brigitte Croisier

 

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