Tribune libre de Youssouf Omarjee

De la symbiose identitaire

  • Publié le 27 octobre 2021 à 08:29
  • Actualisé le 27 octobre 2021 à 08:31

Dans cette tribune, je voudrais vous décrire les conditions nécessaires à l'obtention de la symbiose identitaire. Et, nul besoin d'argent pas plus que de structure organisée pour la mettre en oeuvre, chaque personne étant en capacité d'apporter sa contribution fort de son portefeuille relationnel et de son écosystème humain. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Il nous faut tout d’abord œuvrer au renoncement des rancœurs pour reconstruire les liens intergénérationnels et interethniques, le métissage étant une action favorable à la réalisation de cet objectif. Sans renier notre Histoire et ses blessures, parfois encore toutes béantes, il nous faut faire cet effort nécessaire et indispensable à faire du " travail en commun " la pierre angulaire de notre édifice social.

Ensuite, il nous faut procéder à un réel renforcement des réseaux relationnels pour une meilleure reconnaissance de nos compétences endogènes. Ceci passe par l’entraide associative, sociale, culturelle, environnementale et économique des générations, déjà bien implantées sur la place et ailleurs dans le monde au travers de leurs multiples appartenances aux différents cercles d’influence, et ce, en faveur des générations montantes.

De même, il en va de notre responsabilité tant individuelle que collective et/ou institutionnelle d’agir sur tous les leviers possibles pour que la question du " retour au péï " de celles et ceux qui ont fait le choix courageux de partir se former aux quatre coins du monde, principalement en Hexagone et en Europe ne se pose plus comme une question qui ne trouve pas de réponse pertinente. Chacun de nous connaît quelqu’un dans son entourage qui lui-même connaît quelqu’un, ainsi de suite, à même de devenir un maillon facilitateur dans la chaîne de solidarité pour le développement de l’emploi des jeunes talents locaux. Ce sujet mérite qu’on s’y attache en dehors de vaines polémiques et au-delà des revendications identitaires déchirantes et qui stérilisent le débat en empêchant de marquer des points en vue d’afficher un bon bilan de ce point de vue.

Par ailleurs, il semble incontournable de reconnecter les responsables locaux (les décideurs privés comme publics) avec les réalités locales de la situation de nos jeunes, lesquels ne peuvent pas à la fois être surdiplômés et sous-payés pour des jobs qui ne sont pas des métiers dans lesquels le niveau d’épanouissement est élevé et dont la question du sens reste limité à la contrainte alimentaire de nourrir sa propre famille, et ce, lorsqu’on y arrive sans entrer dans la spirale du surendettement.
Nonobstant, il ne faut pas se décourager, avec l’avènement du numérique (LinkeDin notamment, mais aussi WhatSapp et Instagram), de concourir à la restauration des rouages décisionnels en les mettant au service de l’intérêt général, en vue de regagner durablement la confiance de toute la population qui reste en attente de transparence et d’équité.

Parallèlement à tout cela, il paraît essentiel de réaffecter les ressources et crédits affectés à la formation aux filières et cursus émergents et qui se rendent réellement au service des métiers d’avenir tout comme ils concourent à développer les métiers liés aux services à la personne non menacés par les technologies du présent et de l’avenir. Si beaucoup de métiers vont disparaître et bon nombre de métiers du futur n’existent pas encore à ce jour, alors il faut tout aussi bien veiller à capitaliser sur les métiers pour lesquels l’intelligence artificielle ne sera d’aucune utilité ou presque, tout en formant nos jeunes et nos adultes à constamment s’adapter aux contraintes du marché du travail en perpétuelle métamorphose et toujours plus exigeant de jour en jour. Ainsi, la formation tout au long de la vie ne doit pas rester qu’un slogan, mais doit se traduire réellement pour être au service des individus et de leur accomplissement.

De la même façon, il faut réconcilier nos jeunes avec l’esprit d’entreprise, en défiscalisant dans la limite de 2 SMIC annuels, les revenus issus de l’entrepreneuriat de nos jeunes jusqu’à leur 30ème anniversaire. Un dispositif similaire pourrait être envisagé pour encourager l’entrepreneuriat de nos séniors à compter de 55 ans.

Il faut également se redonner la chance de rebondir après un premier échec en procédant à la remise des dettes sociales et fiscales dans une certaine limite pour toute la tranche d’âge qui va de 30 à 55 ans et qui, fonctionnaire ou pas, aura tenté l’aventure entrepreneuriale. Faire de la France une " start-up Nation " implique de consacrer plus d’attention à l’humain et de créer des liens tangibles, réels et vivants.

Il nous faudra, de la même manière, savoir répondre aux attentes des séniors et aux défis à venir notamment liés au vieillissement et à l’épanouissement de nos aînés, pour qu’ils puissent être en mesure de toujours mener une existence en pleine autonomie, sans pour autant se lancer dans la création de structures d’accueil " hors normes " à moins que cela se fasse au vert, au grand frais, pour qu’ils se sentent comme étant toujours dans le cadre agréable et idéal des vacances.

Enfin, il nous faudra rassembler au-delà des seules personnes qui nous ressemblent, car c’est en cela que réside notre vraie richesse, car notre diversité est un véritable trésor à nul autre pareil. C’est pourquoi, il est primordial de se souvenir que nous avons tous et toutes un réel devoir de solidarité à exercer les uns envers les autres dans le respect de nos différences, sachant que tout doit bien être mis en œuvre pour donner à chacun(e) ses chances sur un territoire fort exigu et où le chômage bat des records. Nous avons besoin de construire le futur de notre île avec des réunionnais de cœur pour que les réunionnais du monde s’épanouissent en toutes circonstances et à tout moment si le désir de revenir à leur terre natale se fait jour. Il faut pour cela y substituer à la notion de " préférence régionale " s’apparentant à la culture du repli, la notion de " tropisme régional " s’inscrivant dans le registre de l’ouverture et de la réciprocité, car, oui, en effet, beaucoup, de celles et ceux qui ont foulé la terre réunionnaise un jour, ont connu des destins exceptionnels en Métropole et ailleurs dans le monde et ce sont de ces personnes-là dont notre jeunesse a besoin, comme d’un véritable relais, qui pour un coup de pouce pour un emploi, qui pour trouver un stage, qui pour bénéficier du soutien moral loin de leur île. Il en va du bien être de notre jeunesse comme il en va de notre avenir si nous le désirons rendre radieux et agréable à vivre.

Youssouf OMARJEE

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