Tribune libre de Frédéric Vienne

La Chambre d'agriculture réclame une "nouvelle campagne de soutien d'urgence"

  • Publié le 5 avril 2022 à 16:43
  • Actualisé le 5 avril 2022 à 17:06

Leader en matière d'accompagnement et de conseil agricole sur le territoire, la Chambre d'agriculture doit faire face depuis quelques mois aux difficultés croissantes des productrices et producteurs réunionnais. Ces milliers de femmes et d'hommes en détresse qui doivent composer depuis plusieurs mois avec la multiplication de facteurs aussi bien endogènes qu'exogènes. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Endogènes d'abord à travers toute une succession d'aléas climatiques qui ont depuis plusieurs mois directement impacté la disponibilité des productions ainsi que les entreprises agricoles dans leur trésorerie et, donc, leur viabilité économique.

Après une des pires sécheresses qu'a connu l'île en 2020 et 2021 avec des décalages de culture et des impacts sur la canne et l'élevage, le monde agricole a dû composer avec deux phénomènes cycloniques (Batsiraï et Emnati) qui ont causé de graves dégats sur les filières végétales et animales avec des dizaines de millions d'euros de pertes de fonds et de récolte.

Avec l'accompagnement technique et administratif de la Chambre, les productions ont pu être relancées ce qui permettait d'entrevoir un retour à la normale au courant du mois de mai. Un retour à la normale qui aurait dû être conditionné par une météo clémente et le déblocage rapide d'aides locales et nationales d'urgence afin d'appuyer des trésoreries fortement mises à mal.

Ce week-end, alors que l'hiver semblait se profiler, un événement climatique majeur marqué par des records de pluviomètrie est venu alourdir les pertes cycloniques remettant ainsi en cause la remise en culture des parcelles. Cette nouvelle épreuve doit désormais nous interroger sur l'intégration concrète du changement climatique dans nos pratiques mais aussi sur les systèmes d'aides d'urgence proposés à celles et ceux qui nourrissent au quotidien les Réunionnais.

En parallèle à ces évenements impactants, différents contextes exogènes (Covid-19, raréfaction et explosion des coûts du frêt, conflit ukrainien...) sont venus peser sur l'activité agricole locale (outils de production, matières premières, intrants...) rendant le métier et les productions de plus en plus difficiles.

L'heure est donc grave et en tant que président de Chambre, je ne peux laisser cette situation perdurer. Notre priorité aujourd'hui est de sauver les exploitations mais aussi de subvenir aux besoins des familles qui vivent des productions végétales et animales et qui donnent à La Réunion une des meilleures diversifications végétales du territoire national. Il y a donc urgence à relancer les productions. C'est pourquoi, nous avons interpellé aujourd'hui Département et Etat sur l'impérieuse nécessité de relancer une nouvelle campagne de soutien d'urgence pour les agriculteurs des communes les plus impactées et d'accélérer les procédures engagées. Il en va de la survie de nos exploitations alors que de nombreux sacrifices ont déjà été consentis par le monde agricole qui a plus que jamais besoin de solidarité et de soutien.

La Chambre que je préside avec mes élu(e)s est et restera au chevet du monde agricole et poursuivra sa pleine mobilisation en matière d'accompagnement. Aujourd'hui, l'île se relève péniblement mais je crois en la résilence, au savoir-faire et à la volonté de nos productrices et producteurs que nous continuerons d'accompagner avec toute la vigilance que nécessite cette difficile période.

Frédéric Vienne
Président de la Chambre d’agriculture de La Réunion

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2 Commentaires
BatoFou
BatoFou
2 ans

Chères agricultrices, chers agriculteurs !Plusieurs fois par jour, chacune, chacun d'entre-nous consomme les produits de la terre, les produits agricoles simplement pour se maintenir en vie... Légumes, fruits, chair animale: mais hélas, le presque million d'habitants qui réside sur l'île se nourrit à plus de 80% de produits importés! 20% seulement d'origine locale: ce sont ceux-là dont vous nous parlez, qui brutalement peuvent se raréfier sur les marchés locaux car tributaires de situations imprévues sous forme d'intempéries majeures qui mettent à mal les sols, les récoltes et les installations agricoles elles-mêmes. Ces 20% de produits locaux sont aussi terriblement dépendants de l'usage de produits importés, intrants chimiques, pesticides, aliments OGM pour les animaux d'élevage, semences, etc. Quand leur approvisionnement est réduit, interrompu, quand leur prix d'achat grimpe, c'est tout un système de production agrochimique qui est menacé. Vous le décrivez en citant "aléas climatiques", "dégats sur les filières végétales et animales avec des dizaines de millions d'euros de pertes de fonds et de récolte"; "records de pluviomètrie est venu alourdir les pertes cycloniques remettant ainsi en cause la remise en culture des parcelles", "Covid-19, raréfaction et explosion des coûts du frêt, conflit ukrainien...". Et vous concluez:. "cette nouvelle épreuve doit désormais nous interroger sur l'intégration concrète du changement climatique dans nos pratiques mais aussi sur les systèmes d'aides d'urgence proposés à celles et ceux qui nourrissent au quotidien les Réunionnais."Comment donc ne pas alors entendre la voix de la raison, celle qui déjà depuis plus de 20 ans annonce et décrit scientifiquement l'évolution de notre planète Terre et les risques majeurs qu'entraine le changement climatique' Comment ne pas s'engager aujourd'hui, de toute urgence, délibérément, corps et âme, avec toute la population réunionnaise, dans une transition profonde de notre système agro-alimentaire actuel pour nous prémunir des pénuries alimentaires, vers une auto-suffisance alimentaire durable, totalement adaptée au territoire et préservant des pollutions les sols, les écosystèmes, les plantes et les animaux, les humains' La chambre d'agriculture, avec ses professionnels, pourrait en être le fer de lance: avec audace, courage, professionnalisme, bien au delà de plans et de projets qui ne font que reproduire des pratiques inadaptées au contexte du temps présent, même si elles ont la vertu de vouloir servir les agricultrices et les agriculteurs, sinon tous les consommateurs. Amies agricultrices, amis agriculteurs, oui vous méritez le soutien de la collectivité, en particulier dans les moments les plus difficiles! N'oubliez-pas aussi que ce que vous décidez, ce que vous faîtes vous rend responsable de la bonne santé de notre île et de ses habitants. Nou artrouv...

Papaye
Papaye
2 ans

Demain vous, nos agriculteurs auront la tâche de nourrir 900 000 réunionnais car importer de la nourriture comme on le fait actuellement est une folie au regard de la consommation de pétrole et des échanges internationaux fragiles. Il faut que vous poussiez dans le sens de la diversification et de la sécurisation de vos cultures par le soutien actif de l'état. Vous êtes notre avenir en somme et celui de nos enfants.