IRT - Enquête controversée sur le ressenti des touristes

Polémique sur une phrase jugée raciste

  • Publié le 2 décembre 2010 à 14:35

Extraite d'une étude commandée par l'Île de La Réunion tourisme (IRT) sur le ressenti des touristes de passage dans l'île, la phrase "les Cafres du Chaudron et du Port sont agressifs" continue de provoquer de vives protestations. Le Cran (conseil représentatif des associations noires) et Ankraké (une association pour la promotion de la culture réunionnaise) se disent "indignés". La ligue des droits de l'Homme (LDH) dénonce un "comportement provocateur et raciste". Gilbert Annette, maire de Saint-Denis, fustige "l'auteur de l'étude qui a commis une faute en reproduisant une expression raciste". Depuis ce mercredi 1er décembre 2010 l'étude a été retirée du site de l'IR. Pascal Viroleau, directeur de la structure, parle "de propos isolé" auquel "l'IRT "ne s'associe en aucune façon" et "ne reflétant absolument pas l'état d'esprit" de la structure qu'il dirige.

L'étude, visant à déterminer les points de satisfaction ou d'insatisfaction des touristes à l'issue de leur séjour à La Réunion, avait été commandée par l'IRT en 2009. Les résultats ont été transmis par le Cabinet d'études mi 2010. L'intégralité de l'étude, soit plus de 130 pages, a ensuite été mise en ligne sur le site de l'Île de La Réunion tourisme. "C'est la pratique. Cela permet aux professionnels du tourisme d'utiliser tous les éléments de l'enquête pour améliorer encore leurs prestations" explique Pascal Viroleau. Dans l'un des chapitres de cette enquête, il est noté que certains des 1 600 touristes interrogés jugent que "les Cafres du Chaudron et du Port sont agressifs".


Le site de l'IRT est bien sûr accessible au grand public. Le Quotidien a donc publié des extraits de l'enquête, dont cette appréciation, dans son édition du vendredi 26 novembre. La levée de boucliers n'a pas tardé. Soutenus par plusieurs associations culturelles, le Cran et Ankraké sont montés au créneau lors d'une conférence de presse tenue ce mercredi 1er décembre. Erick Murin président du Cran estimait que cette phrase "porte atteinte au groupe ethno-culturel cafre".

Le même jour la ligue des droits de l'Homme publiait un communiqué dans lequel elle relevait "sous couvert d'une étude d'opinion, se donnant pour objectif d'éclairer la politique touristique de notre Île, les auteurs prétendent faire état d'une statistique de "2%" de touristes mécontents du "climat social" pour mettre en exergue ce commentaire". La LDH s'insurgeait ensuite "le parti pris de publier de tels propos pour éclairer prétendument la politique touristique relève d'un comportement provocateur et raciste". La ligue des droits de l'Homme commentait "s'il s'agissait de rappeler que quelques touristes peuvent tenir ou tiennent des propos racistes, il n'était nul besoin de reproduire des propos ouvertement racistes, en omettant de les qualifier. S'il s'agissait de souligner un possible sentiment d'insécurité dans certains quartiers dits populaires, le ciblage des "cafres" (qui font peur...!) n'avait pas lieu d'être".

Questionné par Imaz Press Réunion ce jeudi 2 décembre, Gilbert Annette, le maire de Saint-Denis, tenait sensiblement le même langage. "L'auteur de l'étude qui a commis une faute en reproduisant une expression raciste qui ne reflète pas l'opinion des Réunionnais" souligne l'élu dionysien. Et cela "même s'il s'agit d'une opinion exprimée par une toute petite minorité". Il termine en demandant que cette phrase qui "déshonore notre île" soit retirée du site de l'Île de La Réunion tourisme

Ce qui est chose faite depuis ce mercredi. Interrogé par Imaz Press Réunion ce jeudi, Pascal Viroleau ne rejette aucune de ces condamnations et fait plutôt profil bas. "L'IRT regrette cette affaire et ne s'associe aucunement à ce jugement isolé (sur une agressivité supposée d'une partie ciblée de la population - ndlr)" dit-il . Il explique : " je n'ai pris connaissance que des synthèses de l'étude. Cette phrase ne se trouvait pas dans les documents que j'ai examiné, sinon, Il est évident qu'elle n'aurait jamais été mise en ligne".

Dans un communiqué publié en milieu de journée, l'IRT note aussi "il ressort de cette étude, une satisfaction très marquée pour plus de 98% des sondés, à l'égard de notre région et plus particulièrement sur l'accueil des Réunionnais". À propos de la phrase sur les "Cafres agressifs", la structure ajoute "l'IRT regrette que ce commentaire ait été mis en avant, et ne s'associe en aucune manière, à quelque discrimination ou stigmatisation. Il ne s'agit que d'un propos isolé qui ne reflète en aucune façon ni la philosophie de l'IRT et encore moins (...) de l'accueil de notre population".

Pascal Viroleau annonce par ailleurs qu'une "analyse va être faite en interne" afin de savoir comment la phrase incriminée a pu être mise en ligne. "Les études sont publiées sur notre site après avoir été validées par tous les services de l'IRT" note encore Pascal Viroleau. "Si des erreurs ont été faites nous allons remonter sur toute la lignée de décision pour déterminer quels sont les filtres qui n'ont pas fonctionné" affirme-t-il.

Mahdia Benhamla pour
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