Etude de l'Insee

Un Réunionnais sur dix déclare être en mauvaise santé

  • Publié le 4 mai 2021 à 15:19
  • Actualisé le 5 mai 2021 à 07:33

"Un Réunionnais sur dix s'estime en mauvaise ou très mauvaise santé en 2019. Cette part est plus élevée qu'en métropole, alors que la population réunionnaise est plus jeune relève l'Insee dans une étude publiée ce mardi 4 mai 2021. "Les Réunionnaises sont davantage concernées que les Réunionnais par l'obésité (20 %) et le manque d'activité physique (17 %), plus fréquents qu'en métropole. Ils engendrent davantage de maladies chroniques, comme le diabète ou l'hypertension artérielle mais aussi les rhumatismes" note encore l'institut de la statistique. Nous publions son communiqué ci-dessous

En 2019, avant le début de la crise sanitaire de la Covid-19, 10 % des Réunionnais de 15 ans ou plus se plaignent de leur santé : 8 % se déclarent en mauvaise santé et 2 % en très mauvaise santé. C’est moins qu’aux Antilles (14 %), mais plus que dans l’Hexagone (7 %) .

Pourtant, la population de La Réunion est nettement moins âgée : seuls 12 % des Réunionnais ont 65 ans ou plus, contre 20 % des Antillais et 20 % des habitants de la France métropolitaine. À l’inverse, 65 % des Réunionnais se perçoivent en bonne ou très bonne santé en 2019. Les habitants de la Guyane et de Mayotte se déclarent davantage en bonne santé. Ils sont bien plus jeunes encore : seulement 6 % des Guyanais ont plus de 65 ans, et 3 % des Mahorais.

L’état de santé perçu à La Réunion, plus mauvais que dans l’Hexagone, fait écho à des taux de mortalité à chaque âge plus élevés sur l’île, ainsi qu’une espérance de vie inférieure d’un an et demi à celle de l'Hexagone, quel que soit le sexe. Si la population réunionnaise est encore jeune, son vieillissement est cependant rapide : en 2050, 22 % des Réunionnais seront âgés de plus de 65 ans, soit presque deux fois plus qu’en 2017.

L'âge, l'inactivité physique ou professionnelle sont des facteurs de mauvaise santé

L’avancée en âge est la première cause de la dégradation de l’état de santé : les capacités physiques et les aptitudes fonctionnelles baissent progressivement au cours de toute la vie d’adulte. À partir de 65 ans, la part de personnes en mauvaise santé augmente sensiblement : un quart des Réunionnais de 65 ans ou plus s’estiment en mauvaise ou très mauvaise santé. Les moins de 25 ans sont rarement dans ce cas.

L’absence d’activité physique est également préjudiciable à l’état de santé. Parmi les personnes ne produisant jamais d’effort physique, ni au travail ni en dehors, 24 % déclarent une santé altérée. Dès la moindre activité physique hebdomadaire, seuls 7 % sont concernés.

Davantage que le niveau de revenu, c'est le niveau de diplôme qui est le plus discriminant sur l'état de santé. Les personnes diplômées du supérieur se déclarent bien moins souvent en mauvaise santé (3 %) : elles seraient mieux informées et sensibilisées à la nécessité d'une bonne hygiène de vie. À l’opposé, 15 % des personnes sans diplôme s’estiment en mauvaise forme. La majorité des non-diplômés éprouvent ainsi des difficultés à comprendre les recommandations des professionnels de la santé (57 % contre 13 % des diplômés du supérieur).

L’inactivité professionnelle pèse aussi sur l’état de santé. En dehors des étudiants et des retraités, 17 % des autres inactifs (hommes et femmes au foyer, personnes en incapacité de travailler, etc.) se disent affectés par un mauvais état de santé. Au-delà de l’insuffisance de leurs revenus, ces personnes pourraient souffrir d’un manque d’interactions sociales. L'état de santé peut aussi être un frein à l'activité professionnelle.

Par ailleurs, autant de femmes que d’hommes trouvent leur santé dégradée. Mais 25 % des hommes s’estiment en très bonne santé contre 18 % des femmes. Les femmes, en s’occupant davantage des enfants et de leur santé, auraient une appréhension plus objective de leur propre état de santé [Boulevart, 2016].

Le lieu de naissance influe aussi sur l’état de santé : les natifs de La Réunion se déclarent davantage en mauvaise santé que les non-natifs (10 % contre 6 %). Au-delà des écarts de niveaux de vie et de diplôme entre natifs et non-natifs, cela s'explique par des différences de mode de vie et d’habitudes, notamment alimentaires.

L’obésité, plus fréquente à La Réunion que dans l’Hexagone

En 2019, 45 % des Réunionnais sont en surcharge pondérale, dont 28 % sont en surpoids et 16 % sont obèses. La proportion de personnes obèses est supérieure à celle de l’Hexagone (14 %). L’obésité constitue un problème majeur de santé publique. Stable à un niveau élevé depuis vingt ans à La Réunion, l’obésité prédispose en effet à d’autres maladies chroniques.

En particulier, la moitié des Réunionnais obèses souffrent de rhumatismes. Les personnes obèses souffrent aussi de problèmes cardiovasculaires (38 %), respiratoires (21 %) et de diabète (20 %). La Réunion est cependant le Drom le moins touché : dans les autres Drom, 20 % des habitants en moyenne sont obèses.

L’obésité affecte davantage les Réunionnaises que les Réunionnais (20 % contre 12 %), alors qu’en métropole femmes et hommes sont également touchés. Les personnes d’âge intermédiaire sont les plus concernées, avec 21 % de personnes obèses chez les 25 à 50 ans. Ils ne sont que 7 % parmi les moins de 25 ans et 13 % chez les 65 ans ou plus. À La Réunion, les générations nées à partir de 1970 sont davantage touchées, phénomène qui s'observe dès les générations nées dans les années 1950 dans l'Hexagone.

Le manque d’activité physique favorise l’obésité : plus du quart des personnes ne faisant aucun effort physique sont obèses, soit deux fois plus que les autres. Sûrement mieux avertis et plus conscients des risques associés au surpoids, les diplômés du supérieur sont nettement moins souvent obèses que les personnes moins diplômées. Le niveau d’études joue davantage que le niveau de revenu dans la probabilité d’être obèse.

Quatre Réunionnais sur dix déclarent être atteints d’une maladie chronique

En 2019, 39 % des Réunionnais se déclarent atteints d’une maladie chronique, c’est-à-dire d’un problème de santé récurrent ou de caractère durable. Si cette part est identique dans l’Hexagone, le dépistage des maladies peut toutefois être différent entre les territoires.

À âge égal, les maladies chroniques sont plus fréquentes à La Réunion. Ainsi, 72 % des Réunionnais de 65 ans ou plus déclarent souffrir d’une maladie chronique, soit 14 points de plus que parmi les habitants de cet âge dans l’Hexagone. De fait, les seniors réunionnais sont davantage dépendants : en 2015, 19 % des 60 ans ou plus ont perdu leur autonomie, contre 15 % dans l’Hexagone. Le nombre de seniors en perte d’autonomie triplerait à l’horizon 2050 à La Réunion, en lien avec le vieillissement de la population.

Certaines maladies sont aussi plus courantes sur l’île. C’est le cas des maladies vectorielles spécifiques aux territoires tropicaux et transmises par les moustiques, le chikungunya et la dengue, affectant 10 % des habitants. En 2019, 5 % de la population réunionnaise déclare subir des séquelles du chikungunya, qui a sévi de 2005 à 2006 à La Réunion.

En lien avec le surpoids, le diabète touche davantage les Réunionnais que les habitants de l'Hexagone (10 % contre 7 %). Mais le diabète traité est deux fois plus fréquent sur l’île. L’hypertension affecte autant les Réunionnais que les Métropolitains (17 %). Cependant, 47 % des Réunionnais se déclarent concernés à partir de 65 ans, contre 39 % en métropole.

La prévalence des maladies chroniques augmente en vieillissant : de 15 % des 15 à 24 ans à 72 % des 65 ans ou plus. Avec l’âge, les douleurs articulaires se font plus présentes : deux tiers des 65 ans ou plus se plaignent de rhumatismes. En effet, l’arthrose atteint principalement les plus âgés : 20 % de la population à partir de 50 ans, près de la moitié dès 65 ans. Le mal de dos affecte 20 % des moins de 25 ans et jusqu’à 45 % des 65 ans ou plus. Le diabète est rare avant 25 ans mais 27 % des Réunionnais sont concernés dès 65 ans, soit bien plus qu’en métropole (moins de 20 %).

Les problèmes cardiovasculaires sont une des premières causes de mortalité à La Réunion, avec un décès sur quatre imputable à une cause cardiaque ou circulatoire, comme le cancer. Si peu de jeunes sont concernés, 36 % des personnes de 50 à 64 ans et 57 % des 65 ans ou plus en souffrent.

Les problèmes respiratoires, plus fréquents à La Réunion qu’en métropole, sont de nature différente selon l’âge. Ainsi, l’asthme touche particulièrement les jeunes adultes réunionnais : 13 % des moins de 35 ans, soit plus que dans l’Hexagone (10 %). À l’inverse, la bronchite chronique affecte surtout les aînés : 11 % à partir de 65 ans.

Les femmes déclarent davantage de maladies chroniques

Les femmes se déclarent plus souvent affectées par une maladie chronique (42 %) que les hommes  (35 %) (figure 4). Elles sont en effet plus âgées en moyenne que les hommes, vivant plus longtemps qu’eux. Mais même à âge égal, les femmes se disent davantage concernées par certaines maladies chroniques, du fait notamment de problèmes plus prononcés de surpoids. En particulier, près de cinq femmes sur dix se plaignent de rhumatismes ou de maux de dos, contre quatre hommes sur dix. De surcroît, 26 % d’entre elles souffrent de problèmes cardiovasculaires, contre 20 % des hommes. Cela concerne notamment l’hypertension : 20 % des femmes contre 13 % des hommes.

L’arrivée de la ménopause est concomitante avec une dégradation de l’état de santé perçu. Le passage de la cinquantaine chez les femmes marque le premier fort décrochage quant à la perception d’une bonne santé : de 63 % entre 44 et 49 ans à 53 % entre 50 et 54 ans. Près de la moitié des femmes (47 %) se déclarent alors atteintes d’une maladie chronique, contre 38 % de celles de 44 à 49 ans.

Pas assez d’activité physique ni de fruits et légumes

L’activité physique contribue fortement à un meilleur état de santé. Mais 14 % des Réunionnais déclarent ne jamais produire le moindre effort physique quel qu’il soit, et les femmes davantage que les hommes (17 % contre 11 %) (figure 5). En métropole, seuls 6 % des habitants sont dans ce cas.

L’activité physique est ainsi nettement moins répandue à La Réunion que dans l’Hexagone : seuls 24 % des Réunionnais suivent la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) d’effectuer au moins 30 minutes de marche ou de vélo par jour (31 % dans l’Hexagone).

De même, seuls 35 % des Réunionnais pratiquent une activité sportive de loisir chaque semaine, soit dix points de moins que dans l’Hexagone. Les Réunionnais les plus aisés se démarquent avec une pratique sportive de loisir plus fréquente que les autres Réunionnais (40 % contre 30 %).

Les habitants de l’île ont toutefois un temps de sédentarité limité. L'OMS définit comme un excès de sédentarité le fait de rester au moins 7 heures par jour assis ou allongés sans dormir. Les Réunionnais sont moins concernés que les résidents de l’Hexagone (23 % contre 32 %). En effet, ils sont moins souvent en études, à la retraite ou en emploi que les Métropolitains, et moins en emploi de cadres en particulier. Les étudiants, les retraités et les cadres sont en effet les plus sédentaires. Parmi les Réunionnais en emploi, seuls 7 % des ouvriers sont en excès de sédentarité contre 47 % des cadres, davantage assis en bureau.

Par ailleurs, seuls 9 % des Réunionnais suivent la recommandation du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) de consommer au moins cinq portions de fruits et légumes par jour, contre 20 % des habitants de l’Hexagone. La consommation de fruits et légumes est plus rare encore chez les jeunes : près de six Réunionnais de 15 à 24 ans sur dix ne consomment pas de fruit ou légume tous les jours à La Réunion. La consommation de fruits et légumes est cependant plus courante parmi les ménages les plus aisés : seuls 32 % n’en mangent pas quotidiennement, contre 48 % pour les autres ménages.

Lire aussi : Assiette réunionnaise : pas assez de fruits et légumes, trop d'huile, de sucre et de boissons sucrées

Un quart des Réunionnais ont déjà renoncé à des soins

Les Réunionnais bénéficient presque tous d'une couverture médicale complète ainsi que du tiers-payant généralisé en 2019. En plus de la sécurité sociale, 37 % des Réunionnais bénéficient de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C, devenue Complémentaire Santé Solidaire), attribuée par l'État sous conditions de ressources. Cette part élevée (8 % dans l'Hexagone) est le reflet du plus faible niveau de vie à La Réunion. Les autres adhèrent en général à une mutuelle.

Pour autant, 26 % des Réunionnais ont déjà renoncé à un besoin médical dans l'année écoulé (29 % en métropole). Si le motif financier est invoqué par un Réunionnais sur dix, le délai trop long pour obtenir un rendez-vous est le principal frein : 18 % des Réunionnais ont renoncé à une consultation pour cette raison. C’est moins qu’en métropole (24 %), alors que la densité de spécialistes est plus faible à La Réunion (144 spécialistes pour 100 000 habitants en 2019, contre 172 dans l’Hexagone) [Agence régionale de santé de La Réunion, 2020].

Le délai d’obtention d’un rendez-vous occasionne plus de renoncement parmi les femmes : 21 % renoncent à consulter pour ce motif, contre 14 % des hommes. Le nombre de jours moyen d’attente pour une consultation de gynécologie, destinée donc aux femmes, est en effet de 28 jours à La Réunion en 2014.

 

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