Fact-checking

Non, ces tableaux ne montrent pas les "effets secondaires connus" des vaccins anti-covid

  • Publié le 29 septembre 2021 à 16:00
  • Actualisé le 29 septembre 2021 à 17:25

Des tableaux tirés du site de l'Agence fédérale des médicaments belge ont été partagés plusieurs centaines de fois sur Facebook en quelques jours. L'internaute affirme qu'il s'agit des "effets secondaires connus" des vaccins anti-covid. En réalité, ces tableaux montrent des effets indésirables apparus après une injection et signalés à l'agence de pharmacovigilance. On ne peut pas d'emblée établir de lien direct entre ces effets et les vaccins.

Dans cette publication de la page "Alerte attentat Belgique", on voit quatre tableaux de l'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) belge. Chaque tableau liste, selon la description de l'AFMPS, les "effets indésirables rapportés en Belgique" pour chacun des quatre vaccins anti-covid utilisés dans le pays (Pfizer BioNTech, AstraZeneca, Janssen, Moderna).

Pour l'auteur de la publication, partagée 370 fois depuis le 25 septembre, il s'agit de "la liste des effets secondaires connus en date du 21 septembre 2021 des 4 vaccins disponibles en Belgique".

Capture d'écran de la publication trompeuse réalisée le 29/09/2021 sur Facebook

Dans les commentaires, certains internautes se montrent prudents sur l'interprétation de ces chiffres.

Captures d'écran réalisées sur Facebook le 28/09/2021

Les chiffres des effets indésirables signalés après vaccination, disponibles en ligne, sont régulièrement mal interprétés ou instrumentalisés et ont à plusieurs reprises fait l'objet d'une vérification de l'AFP - ici, ici ou encore ici par exemple.

Que montrent ces tableaux ?

L'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé publie tous les mois un aperçu des effets indésirables "signalés suite à l'administration d'un vaccin contre la COVID-19 en Belgique".

Les tableaux relayés dans cette publication sont bien réels et disponibles dans l'aperçu mensuel du 23 septembre 2021, qui liste les effets indésirables signalés depuis le début de la campagne de vaccination jusqu'au 21 septembre 2021. Il faut se rendre dans l'onglet "Présentation par classe d’organes du système (System Organ Class, SOC – terminologie MedDRA)" et cliquer sur chaque vaccin distribué en Belgique: Pfizer BioNTech, Moderna, AstraZeneca et Janssen. Les effets rapportés sont classés dans diverses catégories: affections du système nerveux, infections et infestations, affections des organes de reproduction et du sein...

Attention: une même personne peut signaler plusieurs effets indésirables et donc figurer plusieurs fois dans le tableau.

Mais contrairement à ce qu'affirme l'auteur de la publication que nous vérifions, il ne s'agit pas des "effets secondaires connus" des vaccins, mais des "effets indésirables présumés, notifiés à l’AFMPS", a expliqué à l'AFP Ann Eeckhout, porte-parole de l'AFMPS, interrogée le 28 septembre 2021. "Tous les effets indésirables rapportés dans ces tableaux n’ont pas été nécessairement reconnus comme ayant formellement un lien causal avec le vaccin concerné", a-t-elle ajouté.

Comme l'explique l'Agence sur son site, les chiffres rapportés dans chaque aperçu mensuel sont des "effets indésirables suspectés, par exemple des événements médicaux ayant été observés après la vaccination, mais qui ne sont pas obligatoirement liés ou dus au vaccin". Ces informations ne doivent donc pas être interprétées comme signifiant que le vaccin "provoque l'effet observé ou que son utilisation présente un risque". Les liens entre l'effet observé et le vaccin doivent faire l'objet d'une enquête approfondie des agences de pharmacovigilance.

Comment sont signalés les effets indésirables des vaccins ?

Depuis le début des campagnes de vaccination anti-covid, les autorités sanitaires prêtent une attention particulière aux effets indésirables signalés après une injection. Au niveau européen, la plateforme Eudravigilance, mise en place par l'Agence européenne des médicaments (EMA), permet de collecter "des déclarations d'effets indésirables suspectés d'être liés aux médicaments" autorisés dans l'Espace économique européen (Union européenne + Islande, Liechtenstein et Norvège).

Les tableaux de l'AFMPS utilisés dans la publication que nous vérifions mentionnent que ces donnés proviennent d'Eudravigilance.

Les médecins et les particuliers peuvent y faire remonter l'existence d'effets secondaires potentiels apparus plus ou moins longtemps après une injection, sur lesquels les autorités sanitaires devront enquêter pour déterminer si un lien peut ou non être établi avec le vaccin. Ils peuvent également passer par les agences de pharmacovigilance nationales, telles que l'AFMPS en Belgique ou de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en France. Ces agences transmettent ensuite ces notifications d'effets indésirables à Eudravigilance et à la plateforme de pharmacovigilance de l'OMS (Vigibase).

Comme l'AFMPS, le site d'Eudravigilance précise que les informations qu'il donne "concernent des effets indésirables suspectés, par exemple des événements médicaux ayant été observés après l'utilisation d'un médicament, mais qui ne sont pas obligatoirement liés ou dus au médicament".

De très rares effets secondaires graves

Au 21 septembre 2021, indique l'AFMPS sur son site, 8 525 913 personnes avaient reçu au moins une dose de vaccin en Belgique et 28 771 rapports d’effets indésirables avaient été notifiés à l'Agence, dont 8 292 considérés comme graves. 213 signalements concernent des décès, dont à ce stade quatre "sont considérés comme probablement liés au vaccin".

Parmi les effets indésirables signalés considérés comme graves, "la grande majorité" est liée à "de la fièvre, des douleurs musculaires, un malaise et des réactions au point d'injection", indique l'AFMPS. Cela correspond aux chiffres indiqués dans les tableaux partagés dans la publication Facebook: pour chaque vaccin, les "troubles généraux et anomalies au site d'injection" réunissent le plus grand nombre de signalements. L'AFMPS précise que "ces réactions sont des effets indésirables connus et sont décrits dans la notice" des différents vaccins.

Certains effets indésirables rapportés font l'objet d'enquêtes des agences de pharmacovigilance: c'est le cas par exemple des troubles menstruels, qui font partie de la catégorie "Affections des organes de reproduction et du sein". L'ANSM les classe depuis fin juillet comme "signal potentiel", sans pouvoir à ce stade établir de lien avec la vaccination.

Interrogée à ce propos en août 2021, l'AFMPS avait confirmé à l'AFP avoir reçu des notifications de troubles menstruels suite à l'administration des vaccins contre la COVID-19: "La grande majorité de ces effets indésirables n'étaient pas graves et se sont résolus spontanément. À ce jour, aucune relation de cause à effet ne peut être établie", avait-elle précisé.

"Comme pour tous les médicaments, les effets indésirables connus sont mentionnés dans la notice et dans le résumé des caractéristiques du produit de chaque vaccin contre la COVID-19. Cette information est continuellement actualisée", a indiqué à l'AFP Ann Eeckhout.

Les notices et les résumés des caractéristiques du produit des vaccins ont été mis en ligne par la Commission européenne et l'Agence européenne des médicaments. On y trouve des listes des effets indésirables très fréquents, fréquents, peu fréquents et rares de chaque vaccin, réunis dans des tableaux très similaires à ceux de l'AFMPS. On peut retrouver les dernières versions en anglais sur le site de l'EMA: ici pour Cominarty (Pfizer/BioNTech), ici pour Moderna, ici pour Vaxzevria (AstraZeneca) et ici pour Janssen (Johnson & Johnson).

Ces notices signalent certains effets indésirables correspondant aux catégories reprises dans les tableaux l'AFMPS répertoriant les signalements, comme les nausées, qui font partie des troubles gastro-intestinaux.

D'autres effets, plus graves, ont été ajoutés a posteriori dans les notices, comme les caillots sanguins, qui sont répertoriés depuis avril 2021 comme un effet secondaire "très rare" des vaccins AstraZeneca et Johnson and Johnson.

Début juillet, l'EMA a reconnu un "lien probable" entre les vaccins à ARN Messager (Pfizer, Moderna) et des problèmes cardiaques, qui ont ensuite été ajoutés aux notices. Enfin, le 22 juillet, l'EMA a répertorié le syndrome de Guillain-Barré comme un effet secondaire "très rare" du vaccin Johnson & Johnson - il figure désormais dans la notice du vaccin.

Au contraire, certains effets signalés et répertoriés dans les tableaux de l'AFMPS n'apparaissent pas à ce stade dans les notices ou dans les résumés des caractéristiques des vaccins, comme les affections de l'oreille par exemple (qui apparaissent seulement dans la notice du vaccin Janssen).

Marie Genries, AFP Belgique

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2 Commentaires
HULK
HULK
2 ans

J'espère vraiment que vous publierez les "fake news" du gouvernement et des "autorités sanitaires" à quelque niveau que ce soit : local,national et international. En effet, publier quelques ramassis de fausses nouvelles c'est facile, les réseaux sociaux en sont pleins. Par contre traquer la désinformation de nos gouvernants traduit un véritable travail de journalisme. En serez-vous capable' Pour l'instant ce n'est pas évident. Il y a encore du travail à faire.

Rousseaux, depuis son mobile
Rousseaux, depuis son mobile
2 ans

Bonjour, il y a un travail très simple à faire, en tout cas en France, car toutes les données sont connues de la DREES. On prend depuis disons 10 ans, tous les décès, qui nous donnent date et lieu de naissance, date et lieu de décès, donc l'âge. On prend ensuite le fichier des personnes vaccinées, quelle que soit la vaccination, grippe, tétanos, covid, etc , nominatif et daté, on le croise avec celui des personnes décédées, et on peut donc faire ressortir, par tranche d'âge, tous les décès survenus dans les 28 jours (4 semaines, c'est le chiffre communément admis, on peut en choisir un autre) après leur injection. On ne se préoccupe même pas de savoir s'il y a un lien avec un supposé effet indésirable. Et on observe les courbes obtenues, sur une durée de dix ans, ou plus si on peut. À ma connaissance , ce n'a pas été fait ( ou publié ) et tant que ce ne l'aura pas été , ça laissera la place à toutes les rumeurs, complotistes ou non.