
Après l'incendie dramatique qui a coûté la vie à cinq personnes dont quatre enfants, et fait plusieurs blessés dont deux graves, le SAFPTR hausse le ton : "il y a eu de graves dysfonctionnements au sein du Sdis" affirme Jean-Pierre Lallemand, président du syndicat. "La direction ment : au début, ils ont manqué de bras. Les pompiers entendaient les habitants crier, appeler à l'aide, mais il n'étaient pas suffisamment pour les sauver."
- 13 pompiers au lieu de 17 ? -
Cette nuit-là, 12 pompiers étaient de garde, auxquels s'ajoute le standardiste soit 13 personnes mobilisées en tout. "Normalement c'est minimum 17 et maximum 22" indique Michel Mani, à la tête de la branche pompiers de la SAFPTR. "Notre métier c'est de sauver des vies. Et pourtant on a des morts sur la conscience." Pour lui l'obligation vaccinale renforce le manque d'effectifs déjà présent auparavant, par la suspension des pompiers non vaccinés.
Les deux syndicalistes s'apprêtent à déposer une plainte, "pour obtenir une enquête générale et faire la lumière sur cette affaire". Jean-Pierre Lallemand ajoute au manque d'effectifs un problème de bouche d'eau lors de l'arrivée des sapeurs-pompiers. "Elle ne fonctionnait pas, ça n'a pas été vérifié." Lui et Michel Mani fustigent aussi la lenteur de l'intervention du Sdis.
Interrogé à ce sujet, le président du Sdis, Stéphane Fouassin s'offusque de ces accusations. "C'est archi faux. Monsieur Mani est un pompier à la retraite. Ce syndicaliste ne sait pas ce qu'il s'est passé. Il encourage les pompiers à ne aller se faire vacciner et ensuite il dénonce le manque d'effectifs." 90 sapeurs-pompiers sont non opérationnels en ce moment, sur 900 professionnels et volontaires.
Stéphane Fouassin, nouveau président délégué du conseil d'administration du Sdis depuis août dernier, affirme faire le maximum pour augmenter les effectifs. "D'août à novembre nous avons recruté plus de 100 sapeurs-pompiers volontaires et 100 professionnels via le concours de la fonction publique soit près de 250 pompiers supplémentaires", indique-t-il. "Mais il faut rappeler que ces personnes recrutées doivent ensuite suivre un temps de formation de six mois, elles ne peuvent pas venir renforcer les équipes dans l'immédiat."
Au 10 décembre, le Sdis a également signé 35 contrats de sapeurs pompiers volontaires, pour prise de poste ce 15 décembre. "Il n'y a pas de manque d'effectifs" martèle Stéphane Fouassin. Le soir de l'incendie, les équipes étaient suffisantes lors de leur première intervention, affirme-t-il. "Oui il faudrait 17-18 pompiers, ce serait mieux bien sûr. Mais la loi dit qu'à 13 personnes, ça roule bien et que nous sommes en capacité d'intervenir. Sur une structure en bois comme celle-là, quelques pompiers en plus ça n'aurait rien changé."
Autre élément selon lui : une autre intervention le même soir, sur un feu en sous-sol, ce qui explique que les équipes n'étaient pas au complet dès le début. "Mais ensuite nous avons fait venir toutes les équipes, il n'y a eu aucun retard." Au total près de 110 pompiers ont été mobilisés sur l'incendie.
- Un manque de suivi psychologique -
Jean-Pierre Lallemand et Michel Mani accusent aussi le Sdis de laisser ses pompiers livrés à eux-mêmes, sans suivi psychologique, après une intervention de cette ampleur. "Imaginez, voir des corps d'enfants carbonisés... pourtant les pompiers ne sont absolument pas suivis après" fustige l'un quand l'autre raconte que ses collègues "sont à plat, trois jours plus tard, certains ne dorment toujours pas la nuit."
A ces accusations, Stéphane Fouassin rappelle que deux médecins et des psychologues sont pourtant mis à disposition des pompiers du Sdis. "Pour un incendie de cette ampleur, l'impact psychologique est très violent et très dur. Et bien évidemment le Sdis est là pour effectuer un suivi de ces pompiers" assure-t-il.
Si les syndicalistes affirment "ne pas être là pour accuser à tort", le président du Sdis, lui, appelle à "ne pas se tromper de cible, ne pas se tromper de bouc émissaire". "Nos pompiers ont sauvé 15 personnes grâce à leurs échelles. Qu'on ne les mêle pas à cette polémique.
Un avis partagé par le colonel Frédéric Léguillier, directeur du Sdis. Si lui aussi estime que le départ des pompiers s'est fait de façon "conforme" à savoir un premier départ de six sapeurs-pompiers, il rappelle aussi qu'il est impossible de mobiliser l'ensemble de la garde, afin de ne pas risquer un manque de pompiers disponibles en cas d'autre incident ou incendie ailleurs.
"J'ai avant tout une pensée pour les victimes. Des personnes sont décédées, des centaines d'autres sont sinistrées à quelques jours de Noël. Il faut rester humble et ce genre de polémique est inaproprié" déclare le colonel. L'incendie, "hors de proportions", ne permet pas "de tirer des conclusions sur le quotidien". "Au-delà du fait que l'intervention s'est faite dans les normes, l'incendie lui a connu de nombreux facteurs aggravants : en pleine nuit quand les habitants dorment, avec du vent, des bouteilles de gaz qui explosent, des voitures mal garées qui gênent l'intervention des pompiers..." liste-t-il. Mais l'intervention s'est faite dans un enchaînement classique, "avec tous les moyens dont on dispose" et le maillage territorial disponible. "Cet incendie, c'est une situation sans précédent à La Réunion."
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