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Dix ans après les émeutes, Valls met l'accent sur la lutte contre les discriminations

  • Publié le 26 octobre 2015 à 23:39

Offensives contre les communes en retard sur le logement social, "testing", caméras piétons sur les policiers: Manuel Valls a annoncé ou confirmé lundi des mesures contre les discriminations et pour la mixité sociale, dix ans après les émeutes urbaines.


Aux Mureaux, commune populaire dans la grande périphérie de Paris, le Premier ministre, flanqué de pas moins de 17 membres du gouvernement, est venu "amplifier" une première série d'annonces faites en mars pour combattre l'"apartheid social, territorial et ethnique" qu'il a dénoncé.
"Il y a dix ans, notre pays a été secoué par plusieurs semaines de troubles qui n?ont laissé personne indemne. La douleur, les images, les cicatrices sont encore là", a estimé M. Valls.
"Laisser faire, c?est prendre le risque d?une explosion permanente de notre société", a-t-il averti.
Attaqué à droite sur ce thème, le Premier ministre, qui s'est promené avec des ministres dans des quartiers largement déserts de la cité des Yvelines, s'est défendu de viser avec François Hollande une "reconquête" électorale des "quartiers", qui avaient massivement contribué à l'élection du président en 2012.
"Tous ceux qui ne voient les choses qu'à travers cet angle se trompent lourdement, sur les défis que notre pays traverse", a-t-il affirmé.
Entre la visite d'une mission locale, du chantier de construction d'un commissariat et d'un nouveau quartier, M. Valls et les ministres ont déambulé dans des rues des Mureaux en ne croisant que quelques rares habitants. Mardi, il participera à une émission spéciale du Bondy Blog pour le dixième anniversaire des émeutes de 2005.
Comme en mars, le logement social a occupé une large part du discours de l'exécutif.
Le Premier ministre a rendu publique une liste de 36 communes récalcitrantes à leurs obligations en matière de construction de logement social, 15 ans après l'adoption de la loi SRU imposant des quotas minimaux. Dont des communes emblématiques: l'ancien fief de Nicolas Sarkozy, la très fortunée Neuilly-sur-Seine, ou Fréjus, une mairie passée au FN l'an dernier.
Provence-Alpes-Côte d'Azur est la région la plus représentée, avec 17 communes, devant l'Ile-de-France (8), le Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes (5 chacune) et l'Aquitaine (1).
Nicolas Dupont-Aignan (DLF) s'est plaint que sa ville de Yerres soit "injustement mise à l'index" tandis que le maire de Neuilly-sur-Seine Jean-Christophe Fromantin (UDI) a fait état "des efforts importants" de sa ville, où "80% des opérations réalisées sont des opérations sociales".
Une deuxième liste doit suivre au 1er semestre 2016.
Ces communes seront particulièrement ciblées pour appliquer les mesures coercitives annoncées en mars, notamment la délivrance de permis de construire par le préfet à la place du maire ou l'achat de logements anciens par préemption pour en faire des logements sociaux, a précisé Matignon à l'AFP.

- Accusé de faire de la 'retape' -

M. Valls a également annoncé une mesure qui vient s'ajouter à celles décidées début mars: les préfets pourront se substituer aux maires récalcitrants pour désigner des candidats sur leurs quotas de logements sociaux. Une façon aussi de combattre d'éventuels cas de "copinage" discriminatoires.
Evoquant "le besoin de lever les incompréhensions qui existent encore trop souvent entre nos forces de l'ordre et une partie de notre jeunesse", M. Valls a confirmé une généralisation des "caméras piétons" fixées sur le torse des policiers, et qui filment leurs interventions.
Le Premier ministre a aussi confirmé pour la fin de l'année la campagne de "testing" promise par le gouvernement dans le marché du travail, pour combattre les discriminations à l'embauche.
Un programme de renouvellement des origines sociales des élèves des écoles administratives sera en outre mis en oeuvre progressivement à partir de la rentrée 2016.
Enfin, dix délégués du gouvernement vont être nommés dans dix villes ayant des quartiers difficiles, dont Trappes (Yvelines) et Avignon (Vaucluse).
Les Républicains, par la voix de la porte-parole du parti, Lydia Guirous, ont accusé le gouvernement de faire de la "retape" en banlieue. Europe Ecologie-Les Verts a dénoncé l'"hypocrisie" du gouvernement, rappelant ses "récentes manoeuvres (...) pour enterrer le CV anonyme" et l'abandon par François Hollande de sa promesse de mettre en place un récipissé pour lutter contre les contrôles au faciès.


Par Rusmir SMAJILHODZIC - © 2015 AFP
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