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Chili: Nicolas le singe alcoolique, symbole du trafic d'animaux

  • Publié le 29 octobre 2015 à 13:46

Près de Santiago au Chili, un centre un peu particulier, aux airs de forêt tropicale, héberge Nicolas, un petit singe capucin qui a réussi à surmonter son addiction à l'alcool et a pu finalement retrouver une vie de primate.


Nicolas appartenait à des commerçants de la capitale chilienne. Il est arrivé dans le centre de désintoxication pour primates de Peñaflor, dans la banlieue de Santiago, privé de ses crocs et dépendant à l'alcool et au tabac.
"Les anciens propriétaires lui donnaient de l'alcool parce qu'ils aimaient sa réaction. Il devenait plus agressif et cela les faisait rire", raconte Nicole Rivera Helbig, la vétérinaire responsable du centre, en caressant le petit singe qui semble perturbé par la présence de la caméra de l'AFP.
Après avoir été secouru par la police, Nicolas a reçu un traitement similaire à ceux que les humains reçoivent pour traiter les addictions. Il est passé par toutes les étapes de la désintoxication, et pour supporter l'abstinence, il reçoit un traitement d'antidépresseurs.
S'il a maintenant bien récupéré, son cas est loin d'être isolé.
L'alcool, avec "la cigarette et la drogue, sont couramment donnés aux singes, parce qu'ils perçoivent cela comme un jeu", explique la vétérinaire.
Dans le centre il y a également un singe qui a été dressé pour voler discrètement des bijoux, ainsi qu'une femelle âgée qui a subi de nombreux traitements hormonaux dans un laboratoire.
C'est dans une dense végétation, qui tente de recréer l'habitat naturel des 150 individus recueillis, que tous ces animaux qui portent sur leurs corps les marques de harnais, des mutilations et autres signes d'un passé douloureux, tentent de se reconstruire.
Cet établissement un peu particulier a été créé par Elba Muñoz, une amoureuse des animaux qui consacre désormais, avec sa famille, sa vie à cette passion.
"Ici les singes apprennent qu'ils sont des singes. Lorsqu'ils sont dans une maison, ce ne sont pas des singes: ils ne peuvent pas développer les comportements propres à leur espèce - ils ne sont donc pas des primates, ni des enfants non plus... en fait ils ne sont rien", explique Mme Muñoz à l'AFP.

- Nouvelle mode: les reptiles -

Elle raconte avec fierté comment son centre a ouvert en 1994.
C'est après avoir adopté un singe comme animal de compagnie qu'elle a ouvert les yeux et s'est rendu compte de la souffrance de ces animaux exotiques lorsqu'ils vivent en captivité.
Désormais, un concert de hurlements et de sauts de joie accueille chaque matin l'équipe de soigneurs venue distribuer fruits et légumes aux singes, répartis dans une dizaine de box.
Pendant des années au Chili, posséder un singe était perçu un signe de richesse. Cette mode semble aujourd'hui passée, mais le trafic d'espèces exotiques continue d'être l'un des plus lucratifs au monde.
Le commerce des singes "est en perte de vitesse, mais il existe toujours", on recense des cas de "possession de primate de manière sporadique, un, deux au maximum trois par an", explique Carlos Muñoz, sous-commissaire à la Brigade d'enquête des délits contre l'environnement.
La loi chilienne prévoit jusqu'à 60 jours de prison et de fortes amendes pour les personnes reconnues coupables de trafic, avec des peines plus importantes en cas de récidive, mais cela ne semble pas suffisant pour endiguer l'entrée d'animaux exotiques en provenance d'Argentine, du Brésil, du Pérou ou de la Bolivie.
Et si au début des années 90 les primates étaient à la mode, aujourd'hui c'est une autre catégorie d'animaux que des milliers de Chiliens adoptent : "depuis cinq ans, les reptiles sont les plus touchés par le trafic. Le marché des reptiles au Chili est énorme", déplore M. Muñoz.
Iguanes, lézards et boas constrictor... les Chiliens ont échangé la classique photo avec chien et chat pour des selfies avec l'une de ces espèces. Et avant les reptiles, les oiseaux colorés comme les toucans ou les aras ont eux aussi été, un temps, les rois du marché noir.
Mais ces animaux "transmettent des maladies qui peuvent être graves pour l'homme", prévient Carlos Muñoz : "Les primates par exemple peuvent être porteurs de la rage ou de la tuberculose. Les reptiles, eux, peuvent transmettre des maladies comme la salmonellose".



Par Laure BRUMONT - © 2015 AFP
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