Actualités du monde

Loi santé: les blouses blanches en grève contre le tiers payant

  • Publié le 13 novembre 2015 à 09:36

Pour ce "Black friday", pas de soldes, mais une grève des soins.

Médecins, dentistes ou encore infirmiers libéraux sont invités à fermer leurs cabinets à partir de vendredi, une énième charge contre le projet de loi santé et le tiers payant généralisé.
L'ensemble des syndicats de médecins libéraux (CSMF, MG France, FMF, SML, Bloc) ont fait front commun avant le retour lundi du projet de loi de la ministre de la Santé Marisol Touraine à l'Assemblée nationale, où il sera examiné en deuxième lecture.
Rejoints depuis par SOS Médecins et d'autres professions, ils bénéficient aussi du soutien de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), elle aussi remontée contre un texte accusé de "menacer l'exercice libéral".
"Cette unité médicale était importante, elle est demandée par la base depuis plus d'un an", se réjouit Eric Henry, président du SML.
Conséquence de la mobilisation des chirurgiens, des opérations seront déprogrammées dans les établissements privés, tandis que les urgences pourront être transférées vers l'hôpital public. Des grèves des gardes sont également à prévoir ce week-end et au-delà.
"Le mouvement du 13 sera extrêmement suivi", promet Jean-Paul Ortiz, le président de la CSMF, avec des villes ou régions plus touchées que d'autres, selon Lamine Gharbi, le président de la FHP, notamment Toulouse, Lyon ou Grenoble.
"Toutes les dispositions nécessaires" ont été prises "pour que chaque patient puisse être pris en charge dans de bonnes conditions", assure de son côté le ministère de la Santé, les agences régionales de santé pouvant réquisitionner des praticiens.
Pas assez pour rassurer la Fédération hospitalière de France (FHF), inquiète pour les hôpitaux publics, "laissés seuls" face "aux besoins de santé des Français" quand "certains feront fi de leurs obligations".
Des rassemblements ou des opérations escargot seront organisés à Paris et en région, avant une manifestation lundi à proximité de l'Assemblée nationale.
- 'Contre les droits des gens' -

Les instances les plus radicales, comme le Bloc ou l'association UFML, qui coordonne localement des organisations de médecins sans étiquette, appellent d'ores et déjà à un arrêt d'activité "de plusieurs jours".
Objectif, montrer "ce qui se passera demain" si la loi s'applique. Et surtout torpiller sa mesure phare, la généralisation du tiers payant à tous les assurés d'ici à 2017.
Grâce à elle, les patients n'auront plus à avancer les frais lors d'une consultation chez le médecin, directement remboursé par l'assurance maladie et les mutuelles. Mais pour les syndicats, aucun doute : le dispositif sera inapplicable et inappliqué.
Favorables à un "tiers pays social" pour les plus modestes (bénéficiaires de la CMU-C ou de l'aide à la complémentaire santé), ils refusent son extension à l'ensemble de la population, synonyme selon eux de calvaire administratif et d'impayés.
"C'est la plus forte angoisse" sur le terrain, assure Claude Leicher, le président de MG France, qui aimerait un tiers payant facultatif.
Marisol Touraine comme François Hollande ont toujours promis que le dispositif serait "simple". Mais le rapport commandé aux organismes d'assurance maladie, qui avaient jusqu'au 31 octobre pour proposer des solutions techniques, se fait toujours attendre.
Partisan de la réforme, le Ciss, un collectif qui représente les patients, a de son côté dénoncé le conservatisme des médecins, et une grève menée "contre les droits des gens".
A défaut de pouvoir empêcher le vote d'une loi élaborée, selon eux, "sans concertation", les médecins espèrent bien peser sur la rédaction des décrets. Mais leurs relations avec le gouvernement sont au plus bas.
Tous ont décidé de boycotter la grande conférence de santé voulue par le Premier ministre Manuel Valls le 11 février, date choisie pour leurs "assises de la médecine libérale".
L'Ordre des médecins, d'ordinaire discret, a appelé le gouvernement à leur fournir des "réponses rapides", soulignant sa "responsabilité" dans "l'exaspération" de la profession.
Pas sûr qu'il obtienne gain de cause. D'autant plus que les internes, mobilisés en mars auprès de leurs aînés, n'appellent pas à la grève, préférant se concentrer sur l'avenir...



Par Jérôme CARTILLIER - © 2015 AFP
guest
0 Commentaires