Disparition du journaliste saoudien

L'Américain Pompeo à Ryad pour tenter de dénouer l'affaire Khashoggi

  • Publié le 16 octobre 2018 à 12:16
  • Actualisé le 16 octobre 2018 à 12:26

Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo, dépêché en urgence par le président Donald Trump, est arrivé mardi à Ryad pour tenter de faire la lumière, auprès du roi Salmane et du prince héritier, sur la disparition depuis deux semaines du journaliste saoudien Jamal Khashoggi.

M. Pompeo a été accueilli à sa descente d'avion par son homologue saoudien Adel al-Jubeir et par l'ambassadeur du royaume à Washington, le prince Khaled ben Salmane, fils du roi et frère du prince héritier Mohammed ben Salmane, a constaté un journaliste de l'AFP.

Lundi, après s'être entretenu au téléphone avec le roi Salmane, M. Trump a suggéré que la disparition de Jamal Khashoggi, un critique du pouvoir saoudien qui collaborait notamment avec le Washington Post, "pourrait être le fait de tueurs hors de contrôle".

Plus tard, des médias américains ont affirmé que l'Arabie saoudite envisageait de reconnaître la mort du journaliste lors d'un interrogatoire qui aurait mal tourné au consulat saoudien à Istanbul, au début du mois.
Selon CNN, citant deux sources anonymes, le pouvoir saoudien préparerait un rapport dans lequel il tenterait de minimiser son implication dans la disparition de l'éditorialiste, critique des autorités de Ryad et en particulier du prince héritier, surnommé "MBS".

Selon le Wall Street Journal, cela permettrait à la famille royale de "se dédouaner d'une implication directe" dans la mort de M. Khashoggi, 59 ans au moment des faits
Outre le roi Salmane, Mike Pompeo rencontrera également en soirée le prince héritier, 33 ans et homme fort du régime saoudien, a indiqué une responsable du Département d'Etat.
"Déterminer ce qui est arrivé à Jamal Khashoggi (...) revêt une grande importance pour le président" Trump, a ajouté la porte-parole du département d'Etat Heather Nauert, peu après l'arrivée de Mike Pompeo dans la capitale saoudienne.

Echantillons du consulat

Les autorités turques ont fouillé dans la nuit de lundi à mardi le consulat saoudien à Istanbul, où M. Khashoggi a été vu pour la dernière fois le 2 octobre.
Selon des responsables turcs, le journaliste a été assassiné par des agents saoudiens au consulat, ce que Ryad a démenti jusqu'ici.
Un convoi de six voitures était arrivé au consulat sous haute sécurité lundi peu après 19H00 (16H00 GMT). Les policiers, certains en uniforme et d'autres en civil, sont immédiatement entrés dans le bâtiment.
Un groupe de responsables saoudiens censés participer à la fouille était arrivé au consulat une heure environ avant la police turque.

A l'issue d'une perquisition sans précédent d'une durée de huit heures, les membres de l'équipe turque ont regagné leurs véhicules et quitté les lieux.
Ils ont emporté des échantillons, notamment de la terre du jardin du consulat, a déclaré un responsable présent sur place.
Cette fouille est intervenue au lendemain d'un entretien téléphonique entre le président turc Recep Tayyip Erdogan et le roi Salmane, au cours duquel ils ont évoqué le cas de Jamal Khashoggi.
L'éditorialiste saoudien, qui s'est exilé aux Etats-Unis en 2017, s'était rendu au consulat saoudien d'Istanbul pour des démarches administratives en vue de son prochain mariage avec une Turque, Hatice Cengiz.

Ryad a assuré jusqu'ici que le journaliste a quitté la représentation diplomatique, mais des responsables turcs ont affirmé le contraire et certains accusent les autorités saoudiennes d'avoir fait assassiner le journaliste à l'intérieur du consulat par un groupe d'agents envoyés spécialement à cette fin.
M. Erdogan a pressé à plusieurs reprises, en vain, les autorités saoudiennes de présenter des images prouvant que M. Khashoggi avait bel et bien quitté le consulat.
Selon l'agence de presse étatique turque Anadolu, après sa visite à Ryad, M. Pompeo doit se rendre en Turquie mercredi pour rencontrer le ministre turc des Affaires, étrangères Mevlut Cavusoglu.
M. Trump a déclaré pour sa part que Mike Pompeo "pourrait se rendre en Turquie ou pas".

Menaces et contre-menaces

Samedi, le président Trump, un grand allié de Ryad, avait pour la première fois estimé possible une implication de l'Arabie saoudite dans sa disparition et l'avait menacée d'"un châtiment sévère".
L'Arabie saoudite avait promis dimanche de riposter à d'éventuelles sanctions.
Alors que les investisseurs s'enthousiasmaient encore il y a quelques semaines des pharaoniques projets du prince héritier, l'affaire Khashoggi semble en avoir refroidi certains.

Le milliardaire britannique Richard Branson a annoncé geler plusieurs projets dans le royaume. Des partenaires prestigieux ont annoncé ne plus participer à la deuxième édition de la grande conférence "Future Investment Initiative", organisée du 23 au 25 octobre à Ryad.

Les dernières en date de ces personnalités sont les PDG des sociétés de gestion d'actifs Blackrock et Blackstone, respectivement Larry Fink et Steve Schwarzman, selon des personnes familières du dossier.
Cher au prince héritier, l'événement est boudé par des médias comme le Financial Times, le New York Times et The Economist, mais aussi par le patron d'Uber.

AFP

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